Les activistes de Renovate Switzerland ont tenu à montrer de quel bois ils continueraient de se chauffer, malgré l’adoption de la loi climat, dimanche, par le peuple. Lundi matin, sept d’entre eux, dont cinq, mains collées au bitume, ont bloqué des sorties d’autoroutes dans la région de Zurich, avec ce message: la loi votée est un «demi-premier pas» vers l’urgence climatique. Insuffisant, donc.
Occuper la chaussée tant que le Conseil fédéral n'aura pas décrété l'«urgence climatique»: telle semble être l’intention des Renovate Switzerland et autres Extinction Rébellion. Ces actions perturbatrices, qui étaient mal vues d’une majorité de la population avant la votation, se justifient-t-elle encore, dès lors que les Suisses ont clairement dit «oui» à des innovations permettant de converger vers la neutralité carbone en 2050? Qu'en pensent les Verts, la «branche politique» du climat?
«Je n’ai pas vraiment à répondre à cette question, les militants climatiques font ce qu’ils veulent», réagit le conseiller national Fabien Fivaz. L’écologiste neuchâtelois complète sa réponse: «J’estime que c’est dans le champ politique que les choses fonctionnent. La loi votée dimanche, de nature programmatique, doit maintenant être mise en œuvre.»
La Genevoise Delphine Klopfenstein Broggini n'entend pas plus jeter la pierre aux éveillés du réchauffement climatique. «Les actions des militants, pour peu qu’elles s’inscrivent dans un cadre pacifique, font partie du débat démocratique», dit-elle. Et la conseillère nationale de poursuivre:
La cause du climat doit marcher sur ses deux jambes, l’institutionnelle et la révolutionnaire, comprend-on. Mais ce compagnonnage ne risque-t-il pas de porter préjudice aux Verts? Le baromètre électoral de mars de la SSR a en partie répondu à la question: les écologistes perdent 1,5% d’intentions de vote par rapport aux élections fédérales de 2019. Ce recul pourrait s’accentuer si les activistes climatiques, forts du soutien implicite des Verts, devaient persister dans ce que Delphine Klopfenstein Broggini nomme leur «mode opératoire».
Préjudice électoral? A voir, nuance le politologue René Knüsel.
En embuscade, les Verts’libéraux, 1,5% de voix en plus au baromètre de mars de la SSR, gain équivalant à la perte des Verts, font figure de bons élèves. La conseillère nationale vert’libérale vaudoise Céline Weber fayoterait-elle un brin? Elle déclare:
«Ce n’est pas une façon d’agir, à terme, ça va se retourner contre nous, on nous met parfois dans le même panier que les Verts, constate la parlementaire vaudoise. Ça nous oblige à condamner d’autant plus les menées des activistes, à nous en distancier avec plus de force encore.»
Son camarade de parti, le conseiller national François Pointet, vaudois également, abonde:
Et si on enterrait un peu vite les Verts? La votation de dimanche leur donnera peut-être un coup de fouet, les «pots de colle» du bitume apparaissant comme un épiphénomène au regard du défi climatique. Deux lois sont en chantier, l’une sur l’approvisionnement en électricité, l’autre sur le CO₂. Une initiative des écologistes, intitulée «pour une transition rapide vers le solaire», est dans le pipe-line, si l’on ose dire. En octobre, les électeurs pourraient préférer l’original écolo à tout autre copie. Les prochains baromètres renseigneront à ce propos.