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Chasse aux loups: Comment Rösti a tout fait pour les décimer

Les loups en Suisse: chasse autorisée par Rösti

Albert Rösti est impitoyable avec les loups

Malgré les oppositions juridiques, deux meutes ont déjà été exterminées en Valais. Des documents de l'administration montrent à quel point le conseiller fédéral Albert Rösti a appuyé sur l'accélérateur en matière de gestion du loup.
07.01.2024, 06:5905.02.2024, 11:01
Benjamin Rosch / ch media
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Si l'on s'en tient aux chiffres, la chasse préventive au loup se déroule avec «succès»: 32 bêtes ont déjà été abattues. Une grande partie d'entre eux (21) l'ont été en Valais, 9 autres dans le canton des Grisons, comme le montrent les données publiées le 4 janvier. Un loup a été abattu à Saint-Gall et un autre au Tessin. Il s'agit le plus souvent de tirs isolés. Il est toutefois très probable que deux meutes aient déjà été exterminées en Valais.

Depuis longtemps, la confrontation avec le grand prédateur n'occupe pas seulement les chasseurs, mais aussi les juges. Dans plusieurs cantons, le Tribunal administratif fédéral a mis un terme à la chasse de certaines meutes. Ceci après que des associations de protection de l'environnement s'y sont opposées juridiquement. Des décisions définitives sont encore attendues, mais le jugement contre les décisions d'abattage a un effet suspensif – et les chasseurs n'ont donc plus beaucoup de temps. La chasse au loup dure encore jusqu'à fin janvier.

Une partie de l'imbroglio juridique concerne la manière dont la chasse spéciale au loup a été soudainement organisée. Des documents de l'administration fédérale transmis à la rédaction montrent en détail comment Albert Rösti et son cabinet ont procédé: le conseiller fédéral a fait fi des réserves émises entre autres par la Chancellerie fédérale, mais aussi par l'Office fédéral de la justice.

Un loup capturé de nuit le 18 décembre 2023 par un piège photographique en Argovie.
Un loup capturé de nuit le 18 décembre 2023 par un piège photographique en Argovie.

Une procédure accélérée

Lorsque Rösti prend en charge le département de l'environnement il y a environ un an, il ne montre encore aucun signe d'une action vigoureuse contre le loup. Il approuve un calendrier visant à réguler le loup de manière anticipée à partir de septembre 2024: «en ordre», note-t-il à la main sur un document relatif à la mise en œuvre d'une nouvelle ordonnance sur la chasse.

En mai 2023, tout change. Lors d'une réunion, Albert Rösti informe son office qu'il souhaite mettre en œuvre la nouvelle loi sur la chasse en deux étapes: les tirs préventifs de loups doivent être possibles dès décembre 2023, le reste de la révision devant suivre plus tard. Le conseiller fédéral UDC ordonne un rapport spécial en juin et un autre en août.

Il est fort possible qu'une décision de l'ensemble du Conseil fédéral joue un rôle dans ses réflexions: en mars, celui-ci a décidé de «renoncer à augmenter les finances pour différents projets, dont la loi sur la protection de la chasse», peut-on lire dans un document de l'OFEV.

Le procès-verbal du rapport spécial du mois de juin est rédigé de manière succincte, mais il ne permet qu'une seule conclusion: les représentants de l'Office fédéral de l'environnement perdent du terrain. Ceux-ci ont toujours défendu le point de vue selon lequel 20 meutes de loups constituaient la limite inférieure pour la Suisse afin d'être en accord avec la Convention de Berne. C'est trop, selon Albert Rösti: son secrétariat propose trois variantes: quinze, quatorze ou dix meutes. Au final, il ne devrait y en avoir plus que douze.

Dès le mois d'août, le secrétariat général d'Albert Rösti prend les choses en main. Il s'empresse de vérifier auprès de la Chancellerie fédérale si la procédure d'introduction en deux étapes nécessite une consultation spécifique. Après tout, selon son argumentation, les positions sont connues depuis le débat sur la révision de la loi sur la chasse (rejetée par le peuple). La Chancellerie fédérale lui fait part de ses réserves par retour du courrier. Mais elle écrit aussi:

«En fin de compte, la responsabilité du renoncement à la consultation incombe à l'unité administrative responsable»

En bref, Albert Rösti envisage d'inviter les conseillers d'Etat compétents, comme le suggère un mail de son secrétariat général. Mais en raison de la brièveté du délai, cela ne serait pas acceptable. En lieu et place, ils devraient s'exprimer par écrit sur une consultation des offices, ainsi que quelques organisations de protection de l'environnement, d'agriculture et de chasse.

Rösti suit le lobby de l'agriculture et de la chasse

Le tollé suscité par la procédure abrégée est grand. Les associations de protection de l'environnement, les différents partis, les offices et même la Conférence des cantons alpins expriment leurs doutes quant à la procédure turbo d'Albert Rösti. La Chancellerie fédérale déclare qu'une consultation ordinaire est nécessaire.

Le contenu du projet suscite également une grande résistance. Le département de la biodiversité de l'OFEV fait une dernière tentative pour augmenter la limite minimale des meutes de loups à 20, ce qu'approuve l'Office vétérinaire. L'Office fédéral de la justice estime quant à lui qu'il manque une justification pour une valeur seuil de seulement douze meutes. La conformité avec la Convention de Berne est «discutable». Les associations de protection de l'environnement annoncent d'ores et déjà leur intention de faire examiner le projet par la justice.

Mais le ton est donné par d'autres représentants d'intérêts: «Les milieux proches de l'agriculture sont favorables à une action rapide pour une régulation efficace et une forte réduction de la population de loups», peut-on lire dans l'évaluation de la consultation. Le 1er novembre, Albert Rösti présente la nouvelle ordonnance: le seuil fixé est de douze meutes de loups, la chasse débute un mois plus tard.

Remplir les quotas

Résultat: la confusion. Dans le canton des Grisons, par exemple, l'Office de la chasse et de la pêche ne répertorie que six tirs selon la nouvelle législation; trois autres ont dû être classés ultérieurement, suite à un recours juridique, non pas comme tirs préventifs, mais comme tirs de régulation, selon les anciennes décisions. Quatre meutes ne peuvent pas être chassées.

«En revanche, nous voulons remplir autant que possible le quota que nous avons le droit d'atteindre», déclare Arno Puorgner, de l'Office de la chasse et de la pêche des Grisons.

«D'ici fin janvier, j'ai bon espoir d'ajouter quelques tirs supplémentaires»

Traduit et adapté de l'allemand par Tanja Maeder

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