Elle est venue. Elle a vu. Elle a vaincu. Puis a décidé qu'elle n'était pas sûre de vouloir prendre son siège. Puis elle l'a pris. Voici Anna Rosenwasser, la candidate socialiste zurichoise qui a tenu la Suisse alémanique en haleine durant deux jours.
Cette activiste LGBTIQ+ est surtout connue auprès des jeunes alémaniques pour ses prises de position dans les médias, sur son site et un livre qu'elle a écrit: Le livre rose: Textes queer qui viennent du cœur (Rosa Buch. Queere Texte von Herzen) ainsi que comme organisatrice et animatrice d'ateliers. Elle a pris la parole lors de la Pride de Zurich, en juin dernier. Le Tages-Anzeiger la décrit comme «la plus grande influenceuse sur les questions LGBTIQ+ de Suisse» — comprendre: de Suisse alémanique, bien évidemment.
Si la journaliste indépendante de 33 ans est plutôt branchée Instagram que TikTok, son message touche tant les jeunes millenials que les plus âgés des Gen Z.
Bien que membre du PS depuis plusieurs années, la politique politicienne n'est pas vraiment le fait d'Anna Rosenwasser, qui lui préfère le débat public et les places de cheffe de campagne. Un espace qu'elle occupe en ligne depuis une dizaine d'années, note le Tages-Anzeiger, mais sans jamais avoir eu de mandat politique.
Dimanche, la candidate n'était d'ailleurs pas dans son stamm du centre-ville zurichois. Un collègue alémanique de watson l'avait suivie dans un village votant principalement UDC pour y rencontrer quelques locaux. Puis, les premiers résultats tombent. La jeune femme est neuvième de la liste socialiste, alors que huit sièges sont à pourvoir.
L'activiste lance sur Instagram un post où elle laisse entendre qu'elle pourrait rentrer au National, avec un «WTF» en commentaire. Elle dit espérer y laisser sa place à la huitième candidate d'alors. La présidente des jeunes socialistes, Tamara Funiciello, également engagée sur les questions LGBTIQ+, l'appelle pour lui faire comprendre que les résultats pourraient tourner en sa faveur.
Puis, les résultats définitifs tombent: elle termine huitième, soit le dernier siège de la délégation du Conseil national. D'un coup, l'histoire à l'eau de rose se transforme en grand doute: «Je m'étais inscrite pour donner des voix au PS, pas pour siéger à Berne», avoue alors soudainement la jeune femme dans la foulée, dimanche. Elle déclare:
Suivie par 37 000 personnes sur Insta, elle a été élue avec 92 000 voix – en 2019, également candidate, elle en avait récolté 8000. Elle a allègrement dépassé plusieurs membres du Grand Conseil zurichois et de conseillers communaux de la première ville de Suisse, et même le président des Jeunesses socialistes, Nicola Siegrist. Interrogée par notre collègue de watson sur la suite, elle répond:
Il faut dire qu'en campagne, Rosenwasser ne donnait pas l'impression de ne pas vouloir être élue. Présence massive sur les réseaux sociaux, distribution en grand nombre de flyers, visibilité importante dans les médias, lancement d'un crowdfunding et quizz politique en ligne: sa campagne fut totale.
Si d'autres politiciens rêvent d'être élus sous la Coupole et sont mal à l'aise avec leur campagne, Anna Rosenwasser s'est montrée parfaitement à l'aise avec la sienne, et moins sur son entrée au National. Elle déclare sur Instagram:
Après le thé et les câlins du dimanche soir, la nuit fut agitée. La candidate avait donc prévu, une fois les élections terminées, d'avoir perdu — et de passer la journée tranquille avec sa compagne, dans le canton de Lucerne. A la place, elle se réveille en panique au milieu de la nuit:
Dès potron-minet, lundi matin, c'est donc le stress et les coups de téléphone qui ont rythmé sa journée. Dans la foulée, le Tages-Anzeiger écrit un article complet sur son profil et son hésitation publique. Les réactions à son encontre, souvent outrées, se multiplient sur les réseaux sociaux.
Mardi soir, après deux jours de réflexion et soubresauts médiatiques en Suisse alémanique, la jeune femme a bel et bien confirmé qu'elle irait à Berne. Un temps de réflexion suffisamment long pour faire jaser en long et en large. Un édito du Tages-Anzeiger (encore lui) paru sur ces deux jours d'indécisions commence ainsi:
Mais le journal, bon joueur, lui offre toutefois cette conclusion: