C’est un accord troublant qu’a conclu la conseillère fédérale, Viola Amherd, pour faire avancer la transition numérique au sein de son Département de la défense, de la protection de la population et des sports (DDPS). D’un montant de près de 500 000 francs, il aurait légalement dû faire l’objet d’une procédure d’appel d’offres public. Il n’en a rien été.
Le DDPS a choisi de travailler de gré à gré avec la société allemande ADA Learning GmbH, pratique possible qu’en cas exceptionnel. La justification? Selon l’équipe de Viola Amherd, «en raison des spécificités techniques ou artistiques du contrat ou pour des raisons de protection de la propriété intellectuelle», seule la société ADA Learning peut être prise en compte. Les programmes d'autres prestataires de formation ne semblent pas avoir été une option. Dans sa décision d'attribution, le département décrit l'entreprise allemande comme «le seul fournisseur compétent que nous connaissons».
Dès son accession à la tête du Département de la défense, de la protection de la population et des sports (DDPS) fin 2018, Viola Amherd a été claire: la numérisation est une chance pour le monde de la politique. «Mais si nous voulons vraiment l'utiliser, nous devons aussi faire quelque chose pour nous améliorer. Nous devons aller de l’avant avec la technologie», avait-elle précisé.
A cette fin, le Département de la défense a fait appel à un conseil externe. Ce dernier a engagé un cabinet de conseil allemand pour faire avancer la transformation numérique. La société allemande ADA Learning GmbH s'est donc vu attribuer ce contrat d'une valeur de 484 650 francs par le Parlement. Une porte-parole nous a confirmé que le programme proposé par l'entreprise est destiné à élargir les formations continues au sein du Département de la défense.
Vingt-sept employés du Département de la défense seront sélectionnés pour le programme, ce qui représente près de 18 000 francs par personne. Ils auront la possibilité «d'approfondir leur formation sur les thèmes centraux de la numérisation, dans le cadre d'un programme de formation de douze mois. Ils pourront également acquérir des compétences approfondies en matière de méthodologie, de technologie et de culture», selon la cheffe du département Viola Amherd.
A-D-A? Dans le jargon de l'armée, ces trois lettres sont très connues. Depuis longtemps, l'abréviation « AdA » signifie «Angehöriger der Armee», en français «membre des forces armées». Maintenant, il prend une autre signification avec l’arrivée de l’entreprise allemande.
La société ADA Learning GmbH propose un programme d’apprentissage numérique. L’entreprise affirme qu’elle offre «des prestations à haute valeur ajoutée». Les événements sur site en font partie, de même qu'une plateforme interactive sur laquelle des ateliers sont organisés et du contenu est partagé. En outre, les diplômés ont l'occasion d'établir un réseau avec des personnes d'autres organisations et entreprises.
La fondatrice et directrice d'ADA Learning GmbH, Miriam Meckel, est une éminente professeure allemande. Elle enseigne la gestion de la communication à l’Université de Saint-Gall. Elle écrit des best-sellers et est une consultante en stratégie très demandée. Auparavant, Miriam Meckel a été, entre autres, rédactrice en chef du magazine économique «Wirtschaftswoche». Elle a également été secrétaire d’Etat du Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, animatrice de son propre talk-show télévisé et, un temps, la plus jeune professeure d’une chaire universitaire en Allemagne.
Avec l'aide du programme de l’entreprise ADA Learning, le Département de la défense veut «former une large base d'employés aussi rapidement que possible», déclare sa porte-parole. Après tout, la transformation numérique doit inclure tous les domaines et tous les niveaux. Concrètement, les employés sélectionnés devront traiter en détails les thèmes centraux de la numérisation au cours de leur formation continue. Dans le discours officiel des responsables du programme, il est question de la «mise en œuvre» de nouvelles formes de leadership ou de «domaines d’application des technologies futures». (saw/ch media)
Article traduit de l'allemand par Charlotte Donzallaz