Suisse
Russie

L'ambassade russe à Berne profère des menaces en toute impunité

Sergei Garmonin est l'homme de Poutine à Berne. Dans le passé, il a souvent été remarqué par ses déraillements verbaux.
Sergei Garmonin est l'homme de Poutine à Berne. Dans le passé, il a souvent été remarqué par ses déraillements verbaux.keystone

Pourquoi l'ambassade russe à Berne peut proférer des menaces en toute impunité

Cette semaine, l'ambassadeur russe à Berne a menacé un journaliste suisse. Le Département fédéral des affaires étrangères a réagi, mais cela risque d'avoir peu d'effets.
21.04.2023, 18:5005.05.2023, 12:52
Reto Wattenhofer / ch media
Plus de «Suisse»

Pour une fois, la Suisse s'affirme: «Ce procédé est inacceptable et nous allons le faire savoir sans équivoque à l'ambassadeur russe», a écrit jeudi le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) sur Twitter. L'élément déclencheur de ces propos virulents? Une prise de position qui fait la Une des journaux depuis mercredi. L'ambassadeur russe y menace le journaliste de la Neue Zürcher Zeitung (NZZ) Ivo Mijnssen d'arrestation s'il se rend en Russie.

👉Suivez en direct l'évolution de la guerre en Ukraine👈

L'«apologie publique du terrorisme et de la propagande terroriste» est passible d'une peine d'emprisonnement de cinq à sept ans, prévient l'ambassade russe à l'attention du correspondant en Europe de l'Est. Un article paru seulement deux semaines auparavant a mis les représentants russes en colère. Ivo Mijnssen y évoque en effet la résistance ukrainienne dans la région de Zaporijjia, occupée par les Russes.

L'ambassade russe reproche au journaliste d'essayer de «donner au lectorat l'impression que tout le monde ou presque dans la ville déteste la Russie». Ivo Mijnssen reprendrait «les inventions et les rumeurs les plus ridicules» propagées par «le régime de Kiev et ses sbires». Ce n'est pas la première fois que les diplomates russes s'en prennent à des journalistes suisses. Ils avaient déjà nourri des doutes sur la santé mentale du correspondant de la NZZ à Bruxelles.

Intimidation non «tolérée»

Les observateurs sont cependant unanimes: avec la menace explicite d'emprisonnement, le statut de la Russie en Suisse a pris une nouvelle dimension. Les collaborateurs du DFAE parlent d'un «comportement inconvenant» et d'un «no-go absolu». Ce n'est donc pas un hasard si la Suisse proteste publiquement sur les réseaux sociaux.

Jeudi, le DFAE en a rajouté une couche en convoquant l'ambassadeur russe en Suisse. Le département fédéral lui a fait savoir «que les propos tenus [étaient] inacceptables et que ce type d'intimidation des journalistes ne [serait] pas toléré».

«Les journalistes doivent pouvoir exercer leur travail essentiel au bon fonctionnement d'une démocratie sans intimidation ni peur»
DFAE

Ce sont des paroles très claires. La plupart du temps, les conflits diplomatiques sont abordés à huis clos, loin des projecteurs. Le contenu des discussions confidentielles n'est que rarement rendu public.

Mais il y a peu de chance que la prise de position de la Suisse soit suivie d'action. La Convention de Vienne à propos des relations diplomatiques rend les diplomates pratiquement intouchables. Ils bénéficient de l'immunité et ne peuvent pas être poursuivis pénalement dans le pays d'accueil. Ils peuvent même ignorer les amendes de stationnement.

Pas d'actions prévues

Malgré tout, la Suisse a des moyens d'agir. Elle pourrait, par exemple, expulser l'ambassadeur russe Sergei Garmonin. Il serait ainsi déclaré «persona non grata», soit personne indésirable. Et la Suisse n'aurait même pas à donner de raison pour justifier sa décision. Car en théorie, elle peut, à tout moment, faire savoir à la Russie que le chef de mission ou un autre collaborateur de l'ambassade ne convient pas.

«Cette mesure, très rarement prise, n'est appliquée que dans des cas particulièrement sensibles»
DFAE

Une telle décision serait «un signal politique fort» et ne serait en principe pas communiquée publiquement. Il est néanmoins peu probable que cela se produise, surtout dans le contexte de la guerre en Ukraine. La Suisse est également réticente à recourir à de tels procédés compte tenu de sa longue tradition de bons offices.

En 2012, le DFAE avait pourtant expulsé une ambassadrice syrienne, en réaction au massacre de Houla par les troupes du dirigeant syrien Bachar el-Assad, qui avait fait plus de 100 morts.

Traduit et adapté de l'allemand par Tanja Maeder

Des chants anti-guerre durant un concert à Moscou
Video: watson
Ceci pourrait également vous intéresser:
4 Commentaires
Comme nous voulons continuer à modérer personnellement les débats de commentaires, nous sommes obligés de fermer la fonction de commentaire 72 heures après la publication d’un article. Merci de votre compréhension!
4
Ces mystérieuses camionnettes rapportent gros à la Confédération
D'étranges vans bleus et blancs intriguent les automobilistes depuis quelque temps. Ils rapportent gros à la Confédération, mais ce ne sont pas des radars.

Depuis peu, plusieurs vans bleu et blanc ont été aperçus en Suisse romande, semant le doute chez les automobilistes, certains, comme le dit 24 Heures, craignent qu'il s'agisse de terrifiants radars mobiles. En réalité, ils sont là pour vérifier que les poids lourds s’acquittent correctement de la RPLP, la taxe au kilomètre pour les véhicules de plus de 3,5 tonnes. Et la tâche est essentielle, puisque cette taxe rapporte 1,7 milliard par année.

L’article