Les CFF ont renoncé à leur projet de franchissement rapide des courbes pour leurs trains duplex sur le trafic grandes lignes (TGL). Lors d'une conférence de presse, vendredi, le directeur général Vincent Ducrot a mis en avant un manque de fiabilité et de confort.
Le Fribourgeois a expliqué que les courses de test réalisées avaient mis en lumière des effets négatifs sur le confort des voyageurs. De plus, cette technologie de franchissement des courbes assisté par la compensation du roulis dans les trains à deux étages TGL s'avère être exigeante en matière d'entretien et sa fiabilité est sujette à débat.
Désignée par le terme Wako, cette technique pendulaire empêche les wagons de pencher vers l'extérieur dans les courbes. Il permet ainsi une vitesse de courbe pouvant être jusqu'à 15% supérieure à celle des compositions conventionnelles de trains à deux étages. Alstom, qui fournit les duplex TGL, explique même que la compensation du roulis réduit les forces d'accélération latérale, ce qui améliore le confort des passagers dans les virages.
C'est pourtant là que le bât blesse d'après les CFF. Comme l'explique Vincent Ducrot:
L'autre argument soulevé vendredi pour justifier le renoncement à cette technique de franchissement rapide des courbes résidait dans la fiabilité de cette dernière. Mis en service il y a environ quatre ans, les trains à deux étages TGL avaient connu des débuts mouvementés avec plusieurs pannes techniques et retards massifs.
A l'époque, les CFF avaient parlé d'un «accouchement au forceps» et avaient critiqué en partie le fabricant Alstom-Bombardier. Un retour des trains n'est pas envisageable, a déclaré Vincent Ducrot. Il n'y a pas d'alternative dans le parc des CFF. Entre-temps, 60 des 62 rames duplex commandées ont été livrées, a-t-il été précisé. Les deux dernières suivront en juillet et en août.
Petite lueur d'espoir cependant, la sensibilité de la technologie aux pannes a été améliorée par le passé et continuera de l'être, a déclaré le directeur des CFF. Elle se situe aujourd'hui à 15 000 kilomètres avant qu'une nouvelle panne ne survienne. Il y a deux ans, la valeur était de 2500 kilomètres. Les trains duplex parcourent 4500 kilomètres par jour.
Lors des premiers tests menés il y a environ dix ans, les Chemins de fer fédéraux avaient estimé que le franchissement rapide des courbes était la meilleure solution pour l'avenir. Comment dès lors expliquer cette volte-face ? «En dix ans, il y a eu beaucoup de changements, nous n'avions pas les mêmes conditions de tests», explique M.Ducrot.
Les CFF ont néanmoins investi 32 millions pour l'infrastructure ferroviaire. Vincent Ducrot tempère:
En compensation, les CFF annoncent avoir misé sur une infrastructure plus résistante et plus durable.
Ce renoncement a également une conséquence sur les objectifs de réduction de temps de trajet des CFF. Le gain de cinq minutes sur la ligne Lausanne-Berne et de deux minutes sur celle entre Winterthour (ZH) et Saint-Margrethen (SG) à partir de 2036 ne sera pas atteint. Les CFF veulent néanmoins poursuivre en ce sens et ont demandé une adaptation du concept d'offre 2035 auprès de l'Office fédéral des transports (OFT).
Cette décision des CFF a également fait réagir la Conférence des transports de Suisse occidentale (CTSO). Cette dernière estime que l'abandon par les CFF de la technologie de compensation de roulis «renforce le décrochage de la Suisse occidentale» du reste du pays. La CTSO estime désormais que la Confédération doit débloquer les moyens nécessaires pour une infrastructure performante sur l'axe Berne-Lausanne. (jod/ats)