Suisse
Travail

Les socialistes exigent un salaire minimum en Suisse

Samira Marti (PS/BL) veut augmenter la couverture des conventions collectives de travail en Suisse.
Samira Marti (PS/BL) veut augmenter la couverture des conventions collectives de travail en Suisse.Image: KEYSTONE

«5000 francs serait un bon début»: le PS veut un salaire minimum

La Suisse a besoin de réformes en matière de protection salariale, affirme Cédric Wermuth, coprésident du PS. Les socialistes exigent un salaire minimum de 5000 francs après l'apprentissage. Ce faisant, ils s'inspirent de l'Union européenne.
14.03.2023, 11:55
Othmar von Matt / ch media
Plus de «Suisse»

En Suisse, en 2020, un quart des travailleurs avec un apprentissage professionnel gagnaient moins de 5000 francs bruts par mois. Et un demi-million d'entre eux gagnaient même moins de 4100 francs bruts par mois. La Suisse compte ainsi un million de travailleurs pauvres.

Cela doit changer, estime le parti socialiste suisse (PS). «Celui qui a fait un apprentissage doit gagner au moins 5000 francs par mois», souligne la conseillère nationale Samira Marti. Elle veut y parvenir en augmentant la couverture des conventions collectives de travail en Suisse (CCT): «Une CCT aide à atteindre cet objectif».

Pour Samira Marti (PS/BL), «une protection salariale forte ne dépend pas uniquement de l'UE».
Pour Samira Marti (PS/BL), «une protection salariale forte ne dépend pas uniquement de l'UE».Image: KEYSTONE

Ce qui est explosif, c'est que le PS veut moderniser la protection salariale suisse en la rendant compatible avec le droit européen, et ce par le biais de la directive européenne sur le salaire minimum. C'est précisément le parti qui était très critique à l'égard d'un rattachement institutionnel à l'UE en raison de la protection des salaires, qui veut maintenant reprendre les mesures de protection des salaires de l'UE.

«Avec la directive sur le salaire minimum, l'UE emprunte de nouvelles voies pour protéger les salaires et le pouvoir d'achat», déclare Marti à ce sujet.

«Et si nous pouvons améliorer la protection des salaires de manière compatible avec le droit européen, nous devrions le faire»
Samira Marti (PS/BL)

Samira Marti a en tête les entretiens exploratoires pour une solution globale que la Suisse mène avec l'UE. «Ces questions doivent être discutées et résolues au niveau technique et nous attendons aussi de la Commission qu'elle fasse preuve d'ouverture», dit-elle. «Mais une protection salariale forte ne dépend pas uniquement de l'UE».

La Suisse doit également «tout faire en politique intérieure» pour pouvoir recréer une alliance européenne porteuse, allant des syndicats au Centre et au PLR, en passant par le PS, les Verts et les Verts'libéraux. «Et pour cela, il faut renforcer la protection des salaires en Suisse».

Presque tous les pays de l'UE ont un salaire minimum

Le Conseil européen a approuvé en octobre la directive sur les salaires minimums à laquelle le PS se réfère. Il souhaite ainsi améliorer les conditions de travail et de vie des personnes en Europe, écrit-il, avec un cadre pour des salaires minimums suffisants.

A l'exception du Danemark, de la Finlande, de l'Italie, de la Suède et de l'Autriche, tous les pays de l'UE ont aujourd'hui un salaire minimum. Le Luxembourg est le plus élevé avec 13,8 euros, devant l'Allemagne (12 euros). En bas du classement, on trouve la Bulgarie avec 2,41 euros.

L'UE veut créer des salaires minimums par le biais des conventions collectives de travail, qui correspondent aux conventions collectives de travail en Suisse. Le Conseil établit une équation simple: plus il y a de conventions collectives, meilleures sont les conditions de travail pour les travailleurs.

L'UE exige donc des Etats membres une couverture de 80% par des conventions collectives. Ceux qui n'y parviennent pas doivent élaborer un plan d'action pour encourager la négociation collective.

«C'est décevant»

C'est là que la Samira Marti intervient. La Suisse n'atteint aujourd'hui que 50% de couverture par des conventions collectives de travail. En comparaison internationale, c'est «une valeur inférieure à la moyenne», dit-elle. Et d'ajouter:

«Dans les branches dotées de CCT, il existe une protection salariale efficace, mais pas dans les branches sans réglementation»
Samira Marti (PS/BL)

La Suisse a donc besoin de plus de conventions collectives de travail pour que les salaires et les conditions de travail soient améliorés, explique-t-elle. «Surtout dans le commerce de détail, la logistique, le journalisme ou l'agriculture». Elle demande au Conseil fédéral d'exposer dans un rapport comment il pourrait augmenter la couverture, par exemple en simplifiant la déclaration de force obligatoire.

La Suisse n'a pas encore de salaire minimum national. «Ce serait bien sûr la meilleure solution», déclare Samira Marti. Mais les partis bourgeois s'y seraient jusqu'à présent strictement opposés. «5000 francs pour les professionnels qualifiés serait un bon début».

Quatre cantons connaissent actuellement un salaire minimum:

  • Genève: 23,27 francs
  • Bâle-Ville: 21 francs
  • Neuchâtel: 20,08 francs
  • Jura: 20 francs
  • Tessin: 19 à 19,50 francs

Pour le coprésident du PS, Cédric Wermuth, cela ne fait aucun doute:

«Il est clair que la Suisse a besoin d'une réforme de la protection des salaires»
Cédric Wermuth (PS/AG)

«Nous avons essayé d'obtenir des signatures de parlementaires bourgeois pour le postulat», ajoute-t-il. «Mais peu d'entre eux ont signé. C'est décevant».

Une conclusion explosive

Cédric Wermuth en arrive à une conclusion explosive: «Il apparaît très clairement que les syndicats ont mis en garde, à juste titre, contre le peu d'empressement à renforcer la protection des salaires sur le plan de la politique intérieure. Nous voyons plutôt des efforts pour l'affaiblir encore plus».

De son côté, l'organisation patronale a toujours dit ces derniers mois qu'il ne fallait pas réduire la protection salariale, mais qu'il ne fallait pas non plus l'étendre.

C'est ce que prouve également, selon Wermuth, l'attaque du conseiller national du centre Erich Ettlin contre les salaires minimums cantonaux: il demande dans une motion que les conventions collectives de travail (CCT) aient plus de poids que les dispositions des cantons sur les salaires minimums. Ces derniers ont été édictés par les cantons en tant que mesures de politique sociale afin d'éviter les travailleurs pauvres. La motion a été adoptée par le Parlement.

L'évolution des conventions collectives de travail en Suisse même montre une forte tendance à la hausse. Alors que le pays ne comptait que 14 conventions collectives de travail étendues en 1995, il en avait déjà 46 en 2020. «C'est un triplement qui est fortement lié à la libre circulation des personnes et à ses mesures d'accompagnement», explique Daniel Lampart, économiste en chef de l'Union syndicale suisse (USS). «Depuis, les salaires ont mieux évolué et nous avons pu mieux lutter contre le dumping salarial». Les grèves ont également diminué.

Vous avez mérité des photos de lapins fluffy:
1 / 13
Vous avez mérité des photos de lapins fluffy:
source: imgur
partager sur Facebookpartager sur X
0 Commentaires
Comme nous voulons continuer à modérer personnellement les débats de commentaires, nous sommes obligés de fermer la fonction de commentaire 72 heures après la publication d’un article. Merci de votre compréhension!
Swisscom écope d'une amende de 18,4 millions
Swisscom bloquait l'accès à son réseau de fibre optique. La Commission de la concurrence vient de mettre 18,4 millions de francs d'amende à l'opérateur.

La Commission de la concurrence (Comco) a infligé une amende de 18,4 millions de francs à Swisscom, dans le cadre de la procédure autour du développement du réseau de fibre optique du géant bleu. Le gendarme de la concurrence considère que l'ancienne régie fédérale a entravé l'accès de ses concurrents audit réseau, violant ainsi le droit des cartels.

L’article