Deux ans après le début de la guerre en Ukraine, près de 40 000 Ukrainiens en âge de travailler vivent en Suisse. Contrairement aux personnes qui passent par la procédure d'asile normale, ils sont autorisés à travailler dès le premier jour après l'obtention du statut de protection S. Aujourd'hui, un cinquième d'entre eux ont un emploi.
Bien que le taux d'activité soit ainsi plus élevé que pour les réfugiés d'autres pays ou régions du monde, il ne suffit pas au Conseil fédéral. Son plan? Que 40% des personnes en quête de protection trouvent un emploi d'ici la fin de l'année - un taux deux fois supérieur à aujourd'hui. Un objectif ambitieux fixé par le gouvernement en novembre dernier, lorsqu'il a décidé de prolonger le statut S jusqu'en mars 2025, faute de voir la fin de guerre se profiler.
Un taux d'activité de 40% est-il réaliste? Interrogé à ce sujet, le Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM) parle d'un «objectif stratégique» que la Confédération, les cantons et l'économie devraient s'efforcer d'atteindre ensemble. Le Conseil fédéral s'attend à ce que les personnes en quête de protection travaillent.
D'après les statistiques, le taux d'activité des Ukrainiens varie énormément d'un canton à l'autre. Fin janvier, plus d'une personne sur deux en quête de protection travaillait en Appenzell Rhodes-Intérieures, contre seulement une sur dix à Genève ou dans le canton de Vaud. D'une manière générale, la Suisse romande et le Tessin sont en difficulté. Fribourg et Neuchâtel, les deux meilleurs cantons romands atteignent à peine les 15% alors que la moyenne suisse se situe à 21%.
Selon le SEM, ces taux «dépendent en premier lieu du marché du travail régional, du chômage local et donc de la place économique». Du point de vue de la Confédération, il n'est donc pas possible d'établir des liens directs entre les cantons «performants» et «moins performants». Indirectement, toutefois, le gouvernement sait où le bât blesse.
En novembre dernier, le Conseil fédéral n'a pas seulement formulé l'objectif de 40%. Il a aussi édicté des directives plus contraignantes pour l'utilisation des fonds fédéraux. Jusqu'alors, les cantons étaient en principe libres d'utiliser la contribution annuelle à l'intégration de 3000 francs par personne comme ils l'entendaient. Désormais, les cantons doivent prévoir des cours de langue pour tous les Ukrainiens et évaluer le potentiel et les besoins d'encouragement au cas par cas.
Avec seulement 11% de réfugiés ukrainiens qui travaillent, le canton de Vaud est à la traîne dans les statistiques nationales. Mais la conseillère d'Etat Isabelle Moret compte empoigner le problème au plus vite.
Pour ce faire, le canton souhaite lancer des formations pilotes dans les domaines «où il n'est pas nécessaire de développer des carrières sur dix ans». L'hôtellerie, la restauration ou la pose de panneaux photovoltaïques sont notamment évoqués.
Interrogée par la RTS, Isabelle Moret s'est toutefois demandée comment étaient établies les statistiques.
L'élue a souligné que sur les 6000 Ukrainiens présents dans le canton, «environ 2000 personnes ne suivent ni cours de français, ni cours d'intégration, ni ne cherchent un emploi.» Ces dernières seront donc prochainement convoquées pour se voir proposer un suivi individualisé. Des amendes seront adressées à ceux qui ne répondront pas aux convocations.
(Traduit et adapté par Chiara Lecca)