S'il y a bien un sujet dont il ne faudra pas parler à Noël cette année, c'est le vaccin. Ce n'est pas nous qui le conseillons, mais Florence Felley, psychologue et médiatrice en Valais. Avec une troisième dose de vaccin à l’horizon pour toute la population, le débat chaotique sur la vaccination est de nouveau au cœur de nos conversations.
Du côté des vaccinés, c’est l’incompréhension qui règne: pourquoi le reste de la population ne suit pas le mouvement? Tandis que pour les non-vaccinés, la liste des arguments s'allonge: la peur des effets à long terme, un vaccin qui serait plus dangereux que le virus lui-même ou même carrément inutile.
Mais alors comment renouer le dialogue entre les vaccinés et les non-vaccinés? Et pourquoi est-ce si difficile d'entendre un raisonnement qui n'est pas le nôtre? Florence Felley, psychologue et médiatrice, nous aide à comprendre.
Florence Fellay: Dialoguer, implique, je cite, «de croire l’autre autant capable de vérité que soi» (cit. Michel Ponce), c’est donc chercher à se comprendre, se comprendre soi-même et comprendre l'autre, et non chercher à convaincre. Il faut dans un premier temps être d’accord de ne pas être d’accord. Ensuite, il faut sortir de l’échange croisé où chacun campe sur ses positions et considère que c’est l’autre qui a tort.
Il faut accepter et valider les peurs de chacun, car chacun va prendre une décision en fonction de ses peurs: si j’ai plus peur du virus que du vaccin, je me ferai vacciner. Mais cela ne veut pas dire que j’ai raison.
Si c’est un problème de ne pas avoir le même point de vue sur le vaccin, on ne va pas le résoudre en restant sur ses positions. On va le résoudre en essayant de trouver une manière de passer les fêtes dans le respect de chacun.
Finalement, dans les familles, on est habitués à ne pas aborder les sujets qui fâchent, donc si on veut passer de belles fêtes, il faut se concentrer sur les solutions pour se protéger au maximum sans aborder la question du vaccin.
Par rapport au vaccin, je pense que cela touche à des questions de valeurs et de croyances. Il y a ce besoin de se sentir libre de se vacciner ou pas. Ce sont des enjeux personnels, mais aussi identitaires «je suis libre de décider, je vis dans une démocratie».
Si on vient sur le plan humain, chacun fait comme il peut avec cette question du vaccin, pour autant que chacun se protège et fait attention à l’autre, vacciné ou pas d’ailleurs. Il faut mettre l’attention sur la responsabilité de chacun, indépendamment du vaccin, de se protéger et de protéger son environnement.
Il faut accepter le conflit pour ce qu’il permet, il est socialisant et il permet de se différencier par rapport à l’autre. La vraie question est d’y faire face, de le gérer au mieux. C’est justement quand on n'accepte pas le conflit qu’il dégénère. C’est quand on n'accepte pas que l’autre soit d’un avis différent et que l’on va essayer de le convaincre de changer d’avis que cela dégénère.
En fait, ce n’est ni plus juste, ni plus faux d’avoir une sensibilité ou une autre. Cela devient délicat, quand l'on part du principe que ce que je ressens moi est plus juste que ce que tu ressens toi.
J’ai eu quelques patients qui sont venus me voir avec ce souci-là dans la famille, et très franchement, la clé, c'était quand même d'être d'accord de ne pas être d'accord et de ne pas chercher à convaincre, mais plutôt respecter la position de l’autre avec ce qu’il y a derrière et composer avec les besoins de chacun.