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Abus dans l'enseignement à domicile: Vaud va dévoiler son plan

Abus dans l'école à domicile: Vaud va dévoiler son plan de lutte

Près d'un an après le drame de Montreux, le chef du Département vaudois de l'enseignement et de la formation professionnelle, le libéral-radical Frédéric Borloz, peaufine un projet de révision d'une loi de 1984 au contenu sensible.
10.01.2023, 18:5311.01.2023, 09:11
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La socialiste Cesla Amarelle non réélue au Conseil d’Etat vaudois aux dernières élections, qu’allait devenir l’ambitieux et périlleux projet de révision de la loi sur l’école à domicile et l’enseignement privé? Son successeur au Département de l'enseignement et de la formation professionnelle (DEF), le libéral-radical Frédéric Borloz, entré en fonction le 1er juillet, allait-il reprendre le dossier à son compte ou le ranger pour longtemps dans un tiroir? L’enjeu est d’importance: le canton de Vaud passe pour l’un des plus libéraux, sinon permissifs en termes d’enseignement non public, ce qui donne lieu parfois à des abus.

Dans le contexte du drame de Montreux

Cesla Amarelle et son département souhaitaient donner un tour de vis à une loi datant de 1984. L’avant-projet de révision était sur le point d’être présenté au Conseil d’Etat lorsque la ministre a été battue au second tour du scrutin cantonal, le 10 avril. Au contexte électoral s’ajoutait le drame de Montreux, survenu à la même période, au cours duquel une famille de cinq personnes, dont deux enfants déscolarisés, l’un d'eux suivant supposément des cours à domicile, se jetait du haut d'un appartement situé au septième étage.

La direction de l’enseignement obligatoire du canton de Vaud, ne parvenant pas à s’assurer de la réalité du suivi scolaire de l'un des enfants, avait alerté les services préfectoraux, qui avaient ordonné une visite domiciliaire, dont nul ne pouvait prévoir qu’elle déboucherait sur une tragédie.

Il y aura bien un projet de révision de la loi de 1984. Frédéric Borloz a pris la suite du travail législatif entamé par Cesla Amarelle, a appris watson auprès du Département de l'enseignement et de la formation professionnelle. «En fonction de l’avancée de ce travail et de l’agenda du Conseil d’Etat, le projet de révision de la loi devrait être mis à l’ordre du jour du gouvernement dans les semaines à venir», indique mardi Julien Schekter, responsable de la communication du DEF. «S’il est adopté, poursuit ce dernier, il sera ensuite transmis au Grand Conseil pour une mise à l’ordre du jour du Parlement vaudois.»

Pressions et résistances

Mais il n’est pas certain que Frédéric Borloz reprenne telle quelle la mouture dont il a hérité. A compter de son intronisation, le successeur de Cesla Amarelle a d’ailleurs entamé un nouveau cycle de consultations auprès de partenaires directement touchés par le projet de réforme. Le libéral-radical pourrait se montrer moins exigeant que la socialiste.

C’est ce qu’espère la coprésidente d’Instruire en liberté (IEL), Jeanne Rektorik, dont l’association regroupe 400 familles du canton. «J’ai rencontré M. Borloz fin novembre, début décembre, je vais peut-être le revoir bientôt», rapporte-t-elle.

Les grands axes de la réforme, tels que définis par Cesla Amarelle, laquelle entendait notamment lutter contre les dérives sectaires, sont les suivants:

  • Introduction d’une autorisation préalable à tout retrait d’un enfant de l’école obligatoire. Pour l'heure, rien ne fait obstacle à un tel retrait, sinon l'absence de garantie d’un suivi scolaire à domicile.
  • La demande parentale sera renouvelée chaque année, l’autorisation étant aujourd'hui reconduite automatiquement.
  • Le parent préposé à l’enseignement de son ou de ses enfants devra désormais justifier d’un diplôme équivalant au moins à un CFC, quand aucun titre n’est actuellement exigé.

Le DEF, dirigé par Frédéric Borloz, ne souhaite pas fournir d’informations sur le contenu du projet de révision qui sera soumis à ses collègues du gouvernement. Jeanne Rektorik croise les doigts:

«On peut attendre d’un homme de droite qu’il ait à cœur de préserver la liberté d’instruction des familles»

La coprésidente d’IEL aimerait voir disparaître ou amendées plusieurs mesures du projet de révision, à commencer par la principale d’entre elles, l’autorisation préalable à tout retrait d’un enfant de l’école obligatoire. Elle l’estime contraire à l’article 36 de la constitution vaudoise, qui reconnaît «la liberté de choix de l’enseignement». «M. Borloz a entendu nos réserves à ce sujet», affirme Jeanne Rektorik. Qui voudrait aussi qu’en lieu et place d’un diplôme équivalant au minimum à un CFC, l’Etat de Vaud se contente d’une «expérience professionnelle» propre à mener une instruction à domicile.

Ces parents qui abusent

Jeanne Rektorik reconnaît des «abus»:

  • Lorsque des parents prennent prétexte d’une instruction à domicile pour partir en vacances avec leur(s) enfant(s) hors calendrier scolaire, puis les réinscrivent à l’école publique à leur retour de congé.
  • Lorsque des parents exercent auprès de professeurs un chantage au retrait de leur(s) enfant(s) de l’enseignement public.

La proportion d’élèves vaudois scolarisés à domicile (0,92%) est à peu de chose près la même que celle des élèves du canton inscrits dans une école privée (1 sur 10, soit environ 11 000). C’est l’autre pan du projet de réforme de la loi de 1984. Et il en va ici comme dans l’enseignement à domicile. Le canton de Vaud veut reprendre la main en introduisant, là aussi, une permis d'enseigner.

A ce titre, «une autorisation d’exploiter sera octroyée par le service lorsque les conditions suivantes, fixées par l’avant-projet de loi, puis précisées par son règlement d’application, sont remplies». Cela concerne notamment les locaux et les équipements, qui doivent satisfaire aux conditions d’hygiène et de sécurité.

Associé à la notion de liberté, l’enseignement donné dans un cadre privé est un sujet politique sensible. Frédéric Borloz voudra peut-être présenter un projet faisant apparaître des compromis par rapport à la première mouture.

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