Mardi, une délégation suisse a décollé en direction de Washington. A bord: la présidente de la Confédération, Karin Keller-Sutter et le vice-président, Guy Parmelin. Mais aussi Gabriel Lüchinger, envoyé spécial du Conseil fédéral pour les Etats-Unis, Helene Budliger Artieda, secrétaire d'Etat du Secrétariat d'Etat à l'économie (Seco), et Daniela Stoffel, secrétaire d'Etat aux questions financières internationales.
Ils participeront les 23 et 24 avril à l'assemblée de printemps du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale. Une réunion des ministres des Finances du G20 se tiendra en parallèle à Washington.
Martina Hirayama, secrétaire d'Etat à l'éducation, à la recherche et à l'innovation, est arrivée outre-Atlantique lundi déjà. Elle y a assisté au lancement d'une fusée et a rencontré des représentants de la Nasa. Hirayama rejoindra ses compatriotes mercredi.
Cela faisait longtemps qu'on n'avait pas vu une délégation de si haut vol. Et ce n'est pas un hasard. L'enjeu économique est de taille. Keller-Sutter et Parmelin veulent éviter que Donald Trump n'acte pour de bon la taxe de 31% qu'il a annoncée le 3 avril, avant de la suspendre pour 90 jours.
La présidente de la Confédération, Keller-Sutter a jusqu'à présent un rendez-vous d'assuré - celui avec le ministre américain des Finances, Scott Bessent. Il fait partie de la «team douane» rapprochée du président. Le matin du 9 avril, lorsque Karin Keller-Sutter a téléphoné à son homologue pendant 25 minutes à 9 heures, heure américaine, Bessent était dans le bureau ovale. Tout comme Kevin Hassett, directeur du Conseil économique national, formellement le principal conseiller de Trump.
On sait qu'il a également assisté personnellement à l'échange téléphonique avec Berne. C'était «incroyablement sympathique», a-t-il déclaré. Il est fort probable que Bessent ait également entendu la conversation.
Quelques heures plus tard seulement, Trump a annoncé qu'il suspendait les droits de douane pendant 90 jours. C'est le secrétaire américain au Trésor qui, immédiatement après, a donné des informations à des dizaines de journalistes. L'ancien gestionnaire de fonds spéculatifs est ainsi devenu le «visage public de cette décision», conclut la BBC. C'est Bessent qui aurait influencé le président de manière décisive durant un vol d'Air Force One le week-end précédant le 9 avril et le matin même encore.
En outre, on peut aussi s'interroger sur le programme de Guy Parmelin. Le 7 avril, il a eu un contact avec le représentant au Commerce, Jamieson Greer. Il a la réputation d'un dur à cuire en matière de douane. Il n'était en revanche pas dans le bureau ovale le 9 avril, ce qui laisse supposer, selon la BBC, qu'il a perdu de son importance auprès du président.
Pour la SonntagsZeitung, il est envisageable que le ministre vaudois rencontre Linda McMahon, à l'Education ou Howard Lutnick, au commerce. Un tête-à-tête Keller-Sutter - Donald Trump semble par ailleurs peu probable.
Quelles seront les cartes à jouer de Berne pour décrocher un accord? D'après des proches du dossier, il y aurait quatre atouts:
La proposition helvétique la plus alléchante réside, selon la NZZ am Sonntag, dans les investissements. Ils pourraient s'élever à 150 milliards de francs sur les quatre prochaines années. On sait aujourd'hui que Roche veut à elle seule investir 50 milliards aux Etats-Unis et Novartis 23 milliards. Stadler Rail prévoit également 70 millions.
Ces chiffres donnent le tournis. A l'image de l'offre de Giorgia Meloni à son grand ami: l'Italie veut investir 10 milliards aux Etats-Unis dans les prochaines années, a-t-elle déclaré. Et la première ministre ne représente pas moins que la troisième économie d'Europe.
(Adaptation en français: Valentine Zenker)