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«Mahsa Amini»: 6 questions pour comprendre le drame en Iran

«Mahsa Amini»: 6 questions pour comprendre le drame dont tout le monde parle

Une jeune Kurde iranienne a succombé vendredi à son coma, dans des circonstances impliquant la police de Téhéran et qui, pour l'heure, demeurent encore floues. Voici pourquoi Mahsa Amini est aujourd'hui le visage du combat contre l'oppression théocratique.
20.09.2022, 16:5623.02.2024, 09:52
Team watson
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C'est l'affaire qui fait grand bruit depuis quelques jours. Sur les réseaux sociaux, le hashtag #MahsaAmini s'est mué en un symbole d'indignation dans un contexte politique iranien dénoncé par des opposants au régime toujours plus nombreux.

Mahsa Amini, décédée le 16 septembre «pour une mèche de cheveux qui dépasse» – comme des internautes l'ont déploré sur Twitter – sera peut-être la goutte d'eau qui fera déborder un vase déjà trop plein. Explications en six questions.

Qui est Mahsa Amini?

Mahsa Amini était une Kurde d'Iran. La jeune femme de 22 ans était en visite avec son frère Kiareshm à Téhéran afin de rendre visite à des proches. Mardi 13 septembre, elle a été arrêtée par la police des mœurs, chargée de faire respecter des lois strictes dictant aux femmes leurs tenues vestimentaires. Lesquelles imposent notamment le port du voile, à défaut de quoi ces dernières peuvent être «réprimandées en public, amendées ou arrêtées», indique le National news.

Alors, parce que son voile aurait été mal mis, Mahsa Amini a reçu des «instructions» relatives à la bienséance, rapporte le Huffington post. Problème: deux heures après son interpellation, la jeune femme a perdu connaissance au commissariat où elle avait été conduite de force et a dû être emmenée à l'hôpital de Kasra. Hospitalisée durant trois jours, la native du nord-ouest du pays est tombée à cette occasion dans le coma. Vendredi 16 septembre, elle a perdu la vie.

Mahsa Amini a été inhumée le lendemain, dans sa ville natale. Les médias locaux ont fait état de funérailles mouvementées, entre deuils et protestation.

Que dit la police?

Comment un contrôle a-t-il pu conduire à cette issue dramatique? Dans un communiqué relayé par Fars – l'agence de presse iranienne qui, selon plusieurs médias occidentaux, serait contrôlée par le gouvernement, les autorités de Téhéran affirment ne pas avoir eu de «contacts physiques» avec Mahsa Amini. D'après eux, sa disparition serait plutôt due à une «soudaine crise cardiaque».

«Elle s’est soudainement évanouie alors qu’elle était avec d’autres personnes dans une salle de réunion. [...] il n’y avait pas eu de contact physique entre les agents de police et la jeune femme»

«Cet incident est malheureux de notre point de vue et nous souhaitons ne jamais être témoins de tels incidents», a ajouté le commandant de la police Hossein Rahimi avant d'expliquer que la Kurde avait été emmenée au poste afin d'être «rééduquée» sur les règles vestimentaires en vigueur en Iran.

Que dit sa famille?

La famille de Mahsa Amini a vivement contesté la déclaration officielle de la police. Comme elle l'a déclaré à de nombreux médias locaux, la Kurde de 22 ans était «en bonne santé» et ne souffrait d'«aucun problème de santé», si l'on en croit les informations relayées par le Guardian.

Parmi ses proches, qui affirment avoir été informés de l'hospitalisation de la jeune femme quelques heures après son arrestation, une voix a porté l'affaire sur les réseaux sociaux: celle de Mojgan Amini. Sur la Toile, cette mère qui refuse que la mort de sa fille demeure impunie a accusé le gouvernement iranien de meurtre:

«Faites-le savoir au monde, ils ont tué ma fille»

La mère de Mahsa Amini a indiqué dans un entretien à la radio locale Radio Farda avoir déposé plainte contre la police de Téhéran: «Ma fille était en parfaite santé avant son arrestation», a-t-elle insisté, la voix écorchée. De son côté, Kiareshm, le frère de la défunte a déclaré auprès du site d'information Iran wire n'avoir «rien à perdre» et ne pas vouloir que cela se termine «sans faire de bruit».

Ce qui s'est passé entre le moment où Mahsa Amini a été séparée de ce dernier afin d'être «rééduquée» dans un poste de police et celui où elle a été transportée d'urgence à l'hôpital de Kasra reste imprécis. La famille exige la diffusion intégrale des vidéos de surveillances du poste de police.

Que montrent les éléments partagés par les médias?

Suite aux déclarations de la famille de Mahsa, plusieurs extraits ont commencé à fuiter de part et d'autre au cours du week-end dernier. Comme l'indique L'express, des éléments audiovisuels ont notamment fait naître des soupçons de tortures infligées à la jeune femme par les forces de l'ordre iraniennes. Le Huffington post a relayé d'autres éléments. Selon le média:

«La télévision d’Etat a diffusé de son côté des extraits d’une vidéo montrant une salle, visiblement au commissariat, où l’on peut voir de nombreuses femmes. L’une d’elles, présentée comme Mahsa Amini, se lève pour discuter avec une instructrice au sujet de sa tenue vestimentaire, puis elle s’effondre.»

Toujours d'après le Huffington post, un autre extrait montrerait le service d’urgence transportant le corps de la femme vers une ambulance. La famille aurait confirmé aux médias l’arrivée de la future victime à l’hôpital.

epa10191412 Iranian daily newspapers reporting Mahsa Amini���s death, in Tehran, Iran, 18 September 2022. Mahsa Amini, a 22 year old girl, was detained on 13 September by the police unit responsible f ...
La Une d'un journal quotidien iranien affichant une photo de Mahsa Amini le dimanche 18 septembre 2022.Image: sda

Comment l'affaire a-t-elle été reçue par l'opinion publique?

Sur Twitter, le hashtag #MahsaAmini s'est très vite imposé parmi les sujets les plus débattus en France et en Suisse. En marge des éléments à charge contre la police de la capitale iranienne, d'autres extraits montrant les conséquences d'un possible acte de barbarie ont circulé en abondance à travers le Net.

Des photographies de Mahsa visiblement inconsciente dans un lit d'hôpital avec des bleus, des bandages et des tubes respiratoires ont en effet créé une onde de choc, faisant de la jeune femme de 22 ans un nouveau symbole de la lutte contre l'oppression du régime iranien, de nature théocratique.

Comme l'évoque par ailleurs le Guardian, de nombreux organismes, dont Amnesty international, ont contesté la mort accidentelle de Mahsa et réclamé une «enquête criminelle». Le directeur du Centre pour les droits de l’Homme en Iran, basé à New York, Hadi Ghaemi, a lui décrété que:

«Le gouvernement en Iran est responsable. Elle a été arrêtée en vertu de la loi discriminatoire sur le voile et est décédée alors qu’elle était dans un centre de détention de l’Etat.»
Hadi Ghaemi, directeur du Centre pour les droits de l’Homme en Iran, basé à New York

L'affaire a pris une ampleur telle que de nombreuses manifestations de soutien ont eu lieu dans la région natale de Mahsa, au Kurdistan, mais aussi sur le campus de la capitale iranienne, comme l'ajoute le Courrier international ou encore devant l'hôpital de Kasra, où la jeune femme est décédée.

Qu'évoque la mort de Mahsa Amini dans l'actuel contexte politique iranien?

Le décès de Mahsa Amini relance un débat houleux. Alors que le gouvernement doit statuer sur la question de savoir si les méthodes de la police des mœurs iranienne protègent ou maltraitent les femmes, un débat plus large sur l'oppression du régime dit des mollahs est remis sur la table.

Depuis la Révolution islamique de 1979 en Iran, la loi impose un hidjab à toutes les femmes circulant dans le pays. L'arrivée au pouvoir du président ultraconservateur Ebrahim Raïssi, en août 2021, a intensifié ces règles de bienséance, faisant notamment pulluler des patrouilles jugées toujours plus violentes.

De nombreuses femmes vont à l'encontre de ces normes depuis plusieurs années et se révoltent plus particulièrement dans les grandes villes du pays. Cela en portant le voile de manière à laisser entrevoir quelques mèches ou alors en le retirant complètement.

Durant les protestations évoquées, nombreux ont été les manifestants à estimer que la Kurde de 22 ans avait été arrêtée – et, selon eux, violentée – par la police en raison de son origine ethnique. «Les Kurdes d'Iran sont régulièrement ciblés par les autorités», souligne L'express.

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