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Faillite de Signa: comment René Benko a roulé le fisc

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Près de six mois après la première faillite, un épais brouillard enveloppe encore René Benko et Signa.Image: www.imago-images.de

Faillite de Signa: comment René Benko a roulé le fisc

L'ancien magnat autrichien de l'immobilier aurait utilisé une fondation privée familiale pour frauder le fisc. Un nouveau rebondissement dans l'affaire de la faillite de Signa.
24.05.2024, 18:5324.05.2024, 19:00
Daniel Zulauf / ch media
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Près de six mois après la première faillite, un épais brouillard enveloppe encore René Benko et Signa, son empire immobilier surendetté. En Autriche, la question sur toutes les lèvres reste celle de la corruption qui aurait permis au milliardaire tyrolien d'acheter politiciens et représentants des autorités.

Selon les médias locaux, l'audition de Benko par la commission d'enquête parlementaire à Vienne mercredi n'a pas révélé d'éléments déterminants. Il a refusé de répondre à plusieurs reprises, invoquant les procédures en cours. René Benko, qui ne manquait auparavant presque aucune occasion de s'afficher avec des personnalités importantes lors d'événements, n'est apparu en public que pour la deuxième fois depuis le début de sa chute.

Une fondation remplie de dettes

Au sein du groupe Signa, les administrateurs ont pris les commandes depuis longtemps. Ils fouillent les moindres recoins dans l'espoir de faire apparaître des actifs sains. Pour la première fois, une fondation privée, appelée «Familie Benko Privatstiftung», a dû rendre compte de son patrimoine et ses créances impayées au tribunal régional d'Innsbruck.

Car dans cette société, il n'y a en réalité que des dettes. 854 millions d'euros précisément. Vingt créanciers ont fait valoir des droits pour un montant de 2,3 milliards d'euros. L'administrateur n'en a pour l'instant reconnu «que» 49,5 millions, qu'il considère comme justifiés. Hormis 26 000 euros provenant de la réalisation d'un portefeuille de titres, il n'y a pas d'autres actifs dans la fondation.

Le représentant des créanciers Klaus Schaller - qui dirige par ailleurs l'association autrichienne de protection des créanciers KSV1870 constate que la fondation exsangue occupait néanmoins «une position centrale» au sein de Signa. Selon lui, la fondation a été utilisée pendant des années comme intermédiaire de financement. Une analyse qui s'est renforcée au cours de la procédure. Klaus Schaller veut désormais vérifier si les prêts accordés sans garantie à René Benko ou à certaines sociétés-filles étaient compatibles avec l'acte de fondation.

Les difficultés qui ont conduit au surendettement apparaissent néanmoins déjà assez clairement. Avec sa participation de 10,1% dans la Signa Holding GmbH, également insolvable, la fondation a agi comme un «bloqueuse d'impôts», selon la formule de Schaller. En tant qu'actionnaire de longue date, la fondation jouissait en effet d'une exonération de l'impôt sur les mutations foncières, tel qu'il est prélevé en Autriche et en Allemagne sur les transactions immobilières. La fondation a pu transférer son privilège fiscal à l'ensemble du groupe, lui épargnant ainsi des charges d'environ 1,25 milliard d'euros.

Un «carrousel d'argent»

Cette somme impressionnante a été calculée sur la base d'un taux moyen, qui ne dépasse probablement pas cinq pour cent. De quoi mieux évaluer la valeur colossale des transactions immobilières réalisées par les entreprises Benko rien qu'en Autriche et en Allemagne.

Pour que la machine ne s'enraye pas, la Signa Holding a eu besoin de capitaux frais au fil des ans. La fondation privée Benko a dû s'engager proportionnellement dans ces augmentations de capital afin de maintenir son taux de participation et de ne pas perdre son privilège fiscal.

En conséquence, elle aurait dû recourir de plus en plus à des crédits bancaires et des bailleurs de fonds privés au cours des dernières années. La NZZ a récemment révélé comment cela aurait pu se passer, en présentant l'enquête Inside Signa, co-réalisée par Rainer Fleckl et Sebastian Reinhardt et fraîchement sortie de presse (edition a, 2024).

Elle explique que René Benko a fait transférer les 35 millions d'euros nécessaires à la fondation pour financer sa part de la dernière augmentation de capital par le biais de contrats de crédit avec des sociétés Signa en empruntant des chemins tortueux. Objectif: remettre ensuite l'argent directement à la holding. La NZZ décrit à juste titre ce processus comme un «carrousel d'argent» qui a probablement maintenu les affaires du milliardaire en vie bien au-delà de la date d'échéance effective.

3800 euros par mois

René Benko doit également affronter une procédure d'insolvabilité en tant qu'entrepreneur. Il déclare ne disposer d'aucun patrimoine. Selon les médias autrichiens, il tire un revenu de 3800 euros de la Laura Asset 2018 GmbH, une entité appartenant à la fondation privée Laura, qui porte le nom de sa fille.

La fondation n'est pas en faillite et Benko n'a aucun droit sur elle. Son contenu reste donc pour l'heure un secret de famille.

Les médias autrichiens récoltent des indices et continuent de spéculer sur les actifs faramineux qui seraient encore cachés dans les diverses fondations privées de la famille sous un autre nom que celui de René Benko. On peut désormais s'attendre à ce que, outre les créanciers privés, le fisc cherche à faire toute la lumière sur cette affaire.

(Traduit de l'allemand par Valentine Zenker)

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