En 2023, le fromage helvétique ne séduit plus autant les consommateurs internationaux qu'auparavant. La guerre en Ukraine est responsable de la situation, mais pas que. Une situation qui affecte le Gruyère en première position et de célèbres autres produits de la branche.
04.07.2023, 14:4704.07.2023, 18:39
L'un des symboles mondiaux du savoir-faire suisse est en berne. En 2022, 76 951 tonnes de fromage helvétique ont été exportées, c'est 6,7% de moins en quantité qu'en 2021. Le montant se porte à 734,3 millions de francs, rapporte mardi 4 juillet Le Temps.
Et l'année 2023 n'est pas encore terminé qu'elle montre, elle aussi, une tendance défavorable. Toujours selon le quotidien romand, entre janvier et mai, bien que l'augmentation globale des prix ait permis aux fromages suisses de gagner en valeur (+0,5%), en ce qui concerne le volume exporté, les spécialistes ont constaté une baisse de 3,8%.
Poutine et deux autres raisons
Ces pertes s'expliquent par trois principaux éléments. Le Temps cite, notamment, la guerre en Ukraine. Un argument déjà soutenu par l'Agence d'information agricole romande (Agir), qui rappelait en janvier dernier que le principal marché du fromage suisse était l'Allemagne, premier importateur devant l’Italie puis la France. Or:
«L’Allemagne est particulièrement impactée, car tributaire de la Russie pour plus de la moitié de ses importations de gaz jusqu’en 2022»
Jacques Gygax, directeur de l'association faîtière des artisans suisses du fromage Fromarteagir
Outre ce contexte politique, Jacques Gygax, directeur de l'association faîtière des artisans suisses du fromage Fromarte s'accorde avec un autre élément mis en lumière dans Le Temps: la faiblesse persistante de l’euro vis-à-vis du franc:
«Une hausse du franc suisse peut avoir des répercussions allant jusqu’à quatre euros sur le prix final d’un fromage à l’export. On peut comprendre le consommateur qui s’y détourne au profit d’un produit moins coûteux»
Jacques Gygax, directeur de l'association faîtière des artisans suisses du fromage Fromarteagir
Dans Le Temps, David Escher, directeur de l’association faîtière Switzerland Cheese Marketing (SCM), souligne, finalement, les conséquences de la montée de l'inflation:
«Les consommateurs sont plus enclins à acheter des produits d’entrée de gamme ou des actions. Les fromages suisses, qui se trouvent dans la fourchette haute des prix, sont donc pénalisés»
David Escher, directeur de l’association faîtière Switzerland Cheese Marketing (SCM)le temps
Ces articles pourraient vous intéresser:
Le Gruyère, nouveau produit de luxe
Rien n'aurait pourtant pu augurer un déclin aussi rapide. Car l'année 2021 a été marquée par une seconde année record consécutive pour les exportations de fromage suisse. Fortes de 82 470 tonnes du produit laitier expédiées, les ventes à l'étranger avaient crû de 9,1%, à 756,7 millions de francs. La SCM, soulignait dans un article de la RTS «l'effet bénéfique de la pandémie». Lequel avait notamment élevé au rang de star le Gruyère. Aujourd'hui, c'est ce même produit qui souffre:
«A l’étranger, le Gruyère se situe en général dans le moyen haut de gamme. Mais dans certains pays, c’est presque devenu un produit de luxe. Par exemple, aux Etats-Unis, le gruyère se vend entre 50 et 80 francs le kilo, alors qu’il oscille autour de 20 francs en Suisse»
Philippe Bardet, directeur de l’Interprofession du gruyère (IPG) le temps
Mais les exportations d’Emmentaler, autre poids lourd, sont également en proie à un sensible repli de 11,1%. Une lueur d'espoir semble cependant se montrer grâce à l'Appenzeller. Selon Rudolf Hegg, directeur d’Appenzeller Switzerland: «En mai 2023, après une longue période de baisse, nous avons pu livrer pour la première fois des volumes plus élevés qu’en mai 2022 (+8,8%) en Allemagne, notre principal marché d’exportation.» (mndl)
Ces «sportifs» se jettent d'une colline pour attraper un fromage
Video: watson
Ceci pourrait également vous intéresser:
Un tiers des PME dans l'industrie manufacturière ont supprimé des postes. Deux tiers souffrent d'un manque de commandes, et 30% vivent au jour le jour. L'ambiance est aussi morose que pendant la pandémie.
L'économie suisse a longtemps été étroitement liée à celle de l'Allemagne, si bien que tout ralentissement de son voisin avait des répercussions importantes sur l'industrie helvétique. Cependant, au cours des 20 dernières années, cette dépendance s'est atténuée. Heureusement, car la crise majeure qui frappe actuellement l'industrie allemande aurait auparavant eu des conséquences encore plus graves pour la Suisse.