Même les superpuissances parviennent parfois à évoluer de manière rapide et efficace, surtout lorsqu'il est question de millions de dollars. Aux Etats-Unis, le ministère des Finances a mis en service en début d'année un registre de transparence pour les entreprises. L'objectif de cette base de données est d'identifier les ayants droit économiques des personnes morales:
Le processus d'inscription semble à première vue assez simple:
Selon l'ordonnance correspondante, ces informations pourront à l'avenir être mises à la disposition des banques, des autorités étrangères ou des autorités d'enquête dans le cadre d'une procédure juridique.
Avec ce nouveau registre, créé après des années de tergiversations, Washington réagit aux critiques persistantes de l'étranger concernant les paradis fiscaux réels ou supposés dans des états comme le Delaware, le Dakota du Sud ou le Wyoming. Rien que dans le petit état du Delaware, dont le président Joe Biden est le plus célèbre habitant, près de deux millions d'entreprises sont actuellement recensées.
Des efforts similaires sont en cours en Suisse, pour répondre au même genre de critiques. En novembre dernier s'est achevée la période de consultation pour une nouvelle loi fédérale «sur la transparence des personnes morales», qui prévoit un registre comparable. Cette consultation a suscité un vif intérêt: les prises de position recueillies représentent 637 pages.
Aux Etats-Unis, la tentative du ministère des Finances d'instaurer plus de transparence fait l'objet d'une controverse. La faîtière NSBA (National Small Business Association) qualifie l'ensemble de la procédure d'«anticonstitutionnelle».
En collaboration avec des petits entrepreneurs, la NSBA a donc déposé une plainte en Alabama contre la ministre Yellen. Les contestataires se plaignent de trop de bureaucratie, l'enregistrement de l'entreprise devant constamment être mis à jour en cas de changement d'adresse, de nom ou de but commercial.
Le véritable problème de cet outil fraîchement instauré serait donc plutôt l'avalanche de données qui attend désormais le département FinCEN (Financial Crimes Enforcement Network) du ministère des Finances.
Des millions d'entreprises sont concernées par les nouvelles dispositions, y compris les petites filiales de groupes suisses. Des exceptions sont prévues, entre autres, pour les firmes américaines comptant plus de 20 employés à temps plein, les institutions financières et les organisations à but non lucratif.
L'administration fédérale américaine n'est pas réputée pour son efficacité; la pratique montrera avec quelle vigueur le gouvernement appliquera l'obligation d'enregistrement. Sur le site Internet de FinCEN, on peut lire que les personnes qui ne respectent pas la nouvelle réglementation risquent jusqu'à deux ans de prison.
Traduit de l'allemand par Valentine Zenker