La plupart avaient été conviées à venir se baigner dans sa piscine, où il imposait le «jeu du requin».
Incarcéré depuis la fin 2018, l'homme de 50 ans devra répondre d'agressions sexuelles sur mineurs de quinze ans, agressions sexuelles incestueuses et de trois viols sur mineurs. S'il a reconnu les attouchements, il nie les viols. Le procès, qui doit durer deux semaines, pourrait se tenir à huis clos, total ou partiel.
Les faits retenus se sont déroulés entre 2007 et 2018 avec, pour beaucoup de victimes, un procédé similaire et des profils semblables, l'homme avouant son désir pour les fillettes âgées de 9 à 11 ans.
Ses deux filles, nées en 2002 et 2006, servaient d'«appât» alors que leur père invitait leurs copines à venir jouer dans la piscine à l'arrière du pavillon familial. Un moyen de banaliser les choses et de «rassurer les enfants».
Prétextant le «jeu du requin», il poursuivait les fillettes dans le bassin, les saisissant par les fesses ou touchant leur poitrine, passant parfois les mains sous les maillots de bain.
A l'heure de la douche ou du bain, il entrait de manière intempestive dans la pièce. Régulièrement, il se rinçait nu face aux enfants et à son tour lavait les fillettes, pourtant en âge de le faire seules.
Une caméra intégrée dans un ordinateur portable censé diffuser de la musique filmait ces agressions sexuelles. Au cours des interrogatoires, le cinquantenaire a déclaré s'être masturbé en revisionnant ces vidéos.
Les amies de l'aînée devenues trop âgées pour satisfaire les perversions sexuelles de l'accusé, les camarades de sa cadette se sont retrouvées dans l'eau face au «requin», qui intimait de garder le secret sur ces «jeux».
Devant l'expert psychiatre, l'homme a reconnu être «attiré par la pré-adolescence, le moment où le corps d'enfant devient un corps d'adulte».
L'affaire, tentaculaire, a fait vaciller Niederroedern, village de 923 âmes, où l'accusé occupait les fonctions de premier adjoint, en charge de la communication. Dans le bulletin municipal de cette bourgade à une trentaine de kilomètres au nord de Strasbourg, de nombreux articles qu'il avait signés relataient les confirmations d'adolescents à l'église ou l'arrivée de nouveaux habitants.
Parfaitement connu aux alentours, l'homme au casier judiciaire vierge officiait comme professeur de physique-chimie dans le collège d'une commune voisine et encadrait également des camps scout, auxquels participaient ses deux filles.
Certaines victimes ont subi des massages sous la tente le soir venu et des élèves se sont plaintes de gestes déplacés et de regards gênants. Son épouse, avec qui il vivait en compagnie de ses deux filles, ne se doutait de rien.
Début 2018, c'est finalement la confidence d'une des fillettes devenue lycéenne, à l'assistante sociale scolaire, qui permettra un signalement de l'Education nationale et libérera la parole des victimes.
Ses parents, à qui elle s'était confiée quelques semaines plus tôt, n'avaient en revanche pas osé déposer plainte face au notable, de peur d'«histoires» dans les villages, si leur fille n'était pas crue.
Le procès doit s'ouvrir en présence de plus d'une cinquantaine de parties civiles, une retransmission des débats est prévue dans une salle attenante.
Jugé pour destruction de preuves, le père de l'accusé comparaîtra libre, en qualité de prévenu. Agé de 80 ans, il encourt trois ans de prison et 45 000 euros d'amende pour avoir brûlé dans sa chaudière plusieurs clés USB à la demande de son fils incarcéré, sur lesquelles se trouvaient des vidéos de victimes. Le verdict est attendu le 14 octobre. (chl/ats)