Ça ne pouvait être qu'une urgence.
Mais laquelle?
Mardi, William a boudé la cérémonie en mémoire de son parrain, le roi Constantin II, décédé le 10 janvier. Au dernier moment et pour une «affaire personnelle». Nous n'en apprendrons pas davantage et ce sera précisément le cœur du drame. Qu'est-ce qu'une «affaire personnelle», lorsque le papa affronte un mystérieux cancer et que l'épouse est mise au repos forcé pour cause d'«opération planifiée à l'abdomen»? Entre un énième pépin et l'aggravation soudaine de l'une des emmerdes existantes, l'opinion publique a fait son choix.
Kate Middleton a disparu.
Entendez par là que la princesse de Galles est sur le point de mourir. Ou qu'elle est déjà décédée. Ou qu'elle a offert un organe à beau-papa. Ou qu'elle a profité de son hospitalisation pour se faire greffer un popotin brésilien. Ou que c'est simplement beaucoup plus grave que prévu. Depuis quarante-huit heures, ces théories, qu'elles soient loufoques ou alarmistes, rassemblent densément les internautes les plus angoissés.
A vrai dire, on peut difficilement les contredire. Kate Middleton, dont le métier consiste à apparaître, n'a pas été vue en public depuis soixante-six jours et la messe de Noël matinale du 25 décembre 2023, déployée à l'église de Sandringham.
Vingt-deux jours plus tard, elle s'enveloppera comme «prévu» dans le luxe discret de la London Clinic. Et dès l'impénétrable opération réalisée «avec succès», le palais va se fendre d'un communiqué dont la longueur est inversement proportionnelle aux informations qu'il abrite. On apprendra surtout que l'intervention requiert une période de repos d'une précision chirurgicale: Kate ne mettra pas un talon dehors jusqu'à Pâques. Et «aucune mise à jour de son état de santé» ne sera publiée, en l'absence de «nouvelles informations importantes».
Mardi, face à l'ampleur des théories qui éreintent Internet, une «source» (comprenez, le palais de Kensington mais de façon détournée) va jaillir d'un chapeau magique pour rassurer tout le monde. Une mission délicate: jurer que Kate n'est pas morte, mais sans risquer de trahir le secret des dieux qui barricade la cause de son passage sur le billard. Hélas, les quelques mots qui feront quatre fois le tour du globe achèveront l'espoir d'une princesse en pleine forme.
Personne «continues to be doing well». Dans la vraie vie, ça n'existe pas. On va mieux, moins bien ou rien du tout. Surtout lorsqu'on est sommée de se calfeutrer pendant trois interminables mois. Kate Middleton a disparu. N'en déplaise aux aristocrates les plus actifs de la planète. Elle a disparu des radars, des feux des projecteurs, des boîtiers des photographes, des pupilles de l'opinion publique, mais surtout des tuyaux de la communication royale. En somme, tout ce qui justifie son titre, son rôle, son statut, sa popularité. Tout ce qui fait la sève du grand cirque monarchique. Elle a disparu pour une raison objectivement inquiétante (sa santé) et en raison d'une décision de la couronne (se taire, mais qu'à moitié).
On ne peut pas reprocher aux roturiers qui nourrissent la royauté de spéculer sur les drames qu'ils traversent. On peut en revanche couper court à l'angoisse qui les étreint. Il suffit souvent de s'afficher bruyamment pour s'éclipser dans le calme. Alors qu'on pensait le règne de Charles catapulté dans le grand bain de la transparence, il joue en réalité au roi du jeu de piste. Sa prostate atrophiée est glissée sous le nez du monde, mais son cancer est bouclé à double tour. La durée exacte de la convalescence de Kate est d'intérêt public, mais son affection sera tue. Une «affaire familiale» a bouleversé l'agenda de William. Voilà, c'est tout.
Rebelote ce jeudi, quand un «représentant» de la princesse juge opportun de souffler le chaud et le froid sur le média américain Page Six, se bornant à rappeler que «le palais a clairement indiqué en janvier le calendrier du rétablissement de la princesse». Circuler, il y a tout à imaginer.
Début février, les escrimeurs de la communication royale étaient également sortis du bois pour dire à quel point ils trouvaient «ridicules» les rumeurs du coma de Kate, propagées par une chaîne de télévision espagnole. Encore raté: une rumeur ne devient ridicule qu'une fois solidement démentie. Tout autre bavardage sera inlassablement considéré comme louche.
De deux choses l'une. Soit la famille royale tire sciemment un hypothétique profit de ce tintamarre faisandé, soit la future reine se porte réellement moins bien que prévu. Remarque, on peut pointer une troisième explication à tout cela. Les (trop) nombreux silences bavards qui s'échappent maladroitement des différents palais suggèrent, hélas, que la fraîche couronne a toutes les peines du monde à maîtriser son image.
Alors, jusqu'à nouvel ordre, on a très envie de croire à la théorie du popotin brésilien. Parce que c'est une explication autrement moins angoissante que d'imaginer une princesse de Galles qui «continue de bien se porter».