Vladimir Poutine adore les poses machos. Torse nu ou imitation de James Bond, le président russe ne laisse rien passer. Sa mégalomanie politique ne connaît non plus aucune limite. C'est pourquoi il se compare volontiers à Pierre le Grand, le légendaire tsar qui a fondé l'empire russe au 18e siècle.
Fiona Hill a longtemps été conseillère en sécurité à la Maison-Blanche et est considérée comme une experte reconnue de la Russie. Dans le dernier numéro de Foreign Affairs, elle résume ainsi les ambitions géopolitiques de Poutine:
Les plans géopolitiques ambitieux de Poutine ont connu un sérieux coup de frein ces derniers jours. Avec une attaque éclair réussie, l'armée ukrainienne n'a pas seulement affirmé avoir repris environ 6000 kilomètres carrés de territoire, ce qui correspond à peu près deux fois la taille du canton de Vaud, elle a aussi humilié les soldats russes.
«Ils (les soldats russes) ont abandonné leurs chars et laissé leurs armes, ils ont même volé des vélos pour s'enfuir», explique dans le Financial Times Petro Kuzyk, un commandant de l'armée ukrainienne, en décrivant les événements de ces derniers jours.
Ce n'est pas un hasard si les soldats ukrainiens ont remporté leur succès le plus important à ce jour. «Notre contre-offensive a été minutieusement préparée», poursuit Kuzyk. Les commandants en chef de l'armée russe ont été piégés comme des débutants, les Ukrainiens feintant une offensive à Kherson.
Les troupes russes ont été démoralisées par des tirs incessants. Cela a montré une fois de plus que le moral des soldats russes est très modeste. «Dès qu'ils ne sont plus en surnombre grâce à l'artillerie, ils ne cessent pas seulement de se battre, ils s'enfuient», explique Serhiy Kuzan, un conseiller militaire ukrainien. «C'était le secret de notre opération. L'armée russe est un ballon gonflable».
Ce ballon a éclaté dans le Donbass, offrant à l'armée ukrainienne un problème de luxe. En quelques jours, elle a reconquis plus de territoires que les Russes n'en ont conquis pendant des mois. Défendre ce territoire ne sera toutefois pas une tâche facile. Oleksiy Reznikov, le ministre ukrainien de la Défense, déclare d'ailleurs au Financial Times: «Nous devons bien sûr rester sur nos gardes, mais cette guerre nous y oblige pour des années».
Le succès de l'armée ukrainienne n'est pas seulement un énorme coup de pouce au moral des soldats et de la population. Il devrait également conduire l'Occident à intensifier à nouveau ses livraisons d'armes. La preuve que les Russes sont tout sauf invincibles est ainsi définitivement apportée et l'affirmation souvent répétée du président Vladimir Zelensky selon laquelle ses soldats libéreraient tous les territoires occupés est prouvée par les faits. C'est pourquoi Gabrielius Landsbergis, le ministre des Affaires étrangères de Lituanie, déclare:
Le Kremlin tente de minimiser de son mieux cette honteuse défaite. Même les meilleurs spécialistes de l'intox ne peuvent pas nier le retrait des troupes russes, mais ils tentent de le minimiser. La version officielle des événements dans le Donbass est qu'il s'agit d'un regroupement stratégique.
Pendant ce temps, Vladimir Poutine se montre d'un détachement aveuglant. Comme si rien ne s'était passé, il a inauguré une grande roue à Moscou le week-end dernier et a plaisanté de manière démonstrative avec quelques soldats. Mais même le président russe ne semble plus être invulnérable. Son ancien rédacteur de discours, Abbas Gallyamov, déclare ainsi au New York Times: «La force est la seule légitimité de Poutine, et s'il s'avère que Poutine n'est plus fort, sa légitimité tombera très vite vers zéro».
C'est probablement pour cette raison que Poutine imite un autre tsar russe légendaire, Ivan le Terrible. Il fait à nouveau tirer des missiles sur des installations civiles, ce qui n'a aucun sens sur le plan militaire. La population héroïque d'Ukraine ne se laisse pas impressionner. Le président Zelensky fait savoir à Poutine par le biais du canal de communication Telegram que l'Ukraine n'a pas besoin de l'aide de la Russie: