Depuis le 17 mai, les pourparlers de paix sur la guerre d'agression russe sont au point mort - les exigences des belligérants étant trop différentes dans ce conflit armé. Rien n'a changé jusqu'à présent.
Et pourtant, de plus en plus de voix s'élèvent à présent pour réclamer une reprise des négociations. L'influent chef de l'état-major américain, Mark A. Milley, a récemment déclaré:
Ses déclarations font écho à un débat qui a lieu aux Etats-Unis, mais aussi dans d'autres pays. Selon le Washington Post, des fonctionnaires américains ont demandé, il y a quelques semaines, aux dirigeants ukrainiens de se montrer ouverts à des négociations avec la Russie, en vue d'une paix en Ukraine. Cela serait valable au moins tant que le chef du Kremlin Vladimir Poutine est encore au pouvoir.
La paix est-elle donc possible à la table des négociations? À quel point la Russie et l'Ukraine sont-elles réellement éloignées des pourparlers de paix?
Selon l'historien Jörn Happel, la réponse à la deuxième question est la suivante: on en est très loin. Du moins, tant que l'Ukraine et la Russie ne parviennent pas à se mettre d'accord sur leurs exigences territoriales maximales. En outre, il faudrait probablement un médiateur fort. «Mais celui-ci fait défaut en vue des pourparlers de paix», souligne l'expert.
Des pays comme la Chine et l'Inde pourraient avoir une influence indirecte sur les décisions du Kremlin, comme l'a montré la déclaration finale du sommet du G20. Et pourtant, Happel, enseignant et chercheur à l'université de la Bundeswehr à Hambourg, exclut aussi bien ces deux Etats que les nations occidentales.
Une raison à cela, selon l'expert: la stratégie de guerre russe. Laquelle se caractérise par deux éléments essentiels: d'une part, la Russie tente à tout prix d'obtenir des progrès militaires en Ukraine. En bombardant massivement les infrastructures civiles, l'armée accepte que la population ukrainienne soit confrontée à des problèmes essentiels en hiver, sans chauffage ni énergie.
«D'autre part, la Russie essaie de ne pas perdre complètement sa fiabilité sur la scène internationale», poursuit l'historien. Pour y parvenir, l'armée russe ne détruit pas des villes entières, comme autrefois à Marioupol, mais des bâtiments isolés de l'infrastructure civile. Selon Happel, c’est une astuce:
Hanna Notte, experte en politique étrangère russe, est du même avis. Elle ajoute que la Russie tentera de geler les lignes de combat actuelles afin de se réapprovisionner en missiles et en munitions pendant les mois d'hiver et d'amener une nouvelle partie des soldats mobilisés sur le front.
«La Russie espère probablement que la combinaison de ces deux efforts permettra à Moscou, au printemps, de forcer le camp ukrainien démoralisé à faire des concessions territoriales ou même, dans le pire des cas, à lancer de nouvelles offensives», précise Hanna Notte.
Qu'est-ce que cela signifie pour d'éventuels accords de paix? L'experte explique:
Selon elle, les discussions entre Kiev et Moscou assureraient un répit pendant lequel la Russie pourrait régénérer ses ressources pour la guerre.
«Etant donné que le Kremlin n'a aucunement signalé qu'il avait révisé ses objectifs de guerre initiaux, il ne faut malheureusement pas s'attendre à ce que la Russie renonce à de nouvelles attaques contre l'Ukraine après les négociations», prédit la spécialiste.
Il n'y a que peu de chances que la Russie révise ses objectifs de guerre tant que l'Ukraine n'aura pas libéré d'autres territoires occupés. Dernièrement, l'armée ukrainienne a repris la région de Kherson.
Au vu des exigences de certains fonctionnaires américains, l'experte a expliqué: «Il serait judicieux que Kiev signale - tout à fait fondamentalement - qu'elle est ouverte à des négociations dans le futur, sous certaines conditions.» Mais cela ne doit pas encourager l'affirmation russe selon laquelle l'Ukraine est responsable de la guerre.
Contrairement aux Etats-Unis, de nombreux représentants du monde politique européen estiment qu'il est trop tôt pour ouvrir des négociations. Selon eux, l'objectif doit être que l'Ukraine existe à nouveau dans ses anciennes frontières d'avant la guerre. Il ne doit pas y avoir de récompense pour la Russie en cas de violation du droit international, de meurtres, de viols et de crimes de guerre.
De son côté, l'expert en politique étrangère et député allemand, Roderich Kiesewetter, a affirmé que des garanties de sécurité crédibles, une force internationale de maintien de la paix, le paiement de réparations par la Russie ainsi que le traitement obligatoire de tous les crimes de guerre devraient être à l'ordre du jour des discussions.
Il a ajouté:
(Traduit de l'allemand par Léon Dietrich)