Un vol historique, baptisé Flight100, a eu lieu ce mardi entre Londres et New York: le Boeing 787 de la compagnie Virgin Atlantic qui a atterri à l'aéroport international JFK dans l'après-midi était totalement alimenté par des carburants durables. C'est une première.
Appelés SAF (de l'anglais «sustainable aviation fuel»), ces combustibles sont fabriqués à partir de plusieurs sources, allant des déchets agricoles au carbone capturé dans l'atmosphère, et émettent 70% moins d'émissions de CO2 que le kérosène traditionnel. Selon les calculs de l'Association du transport aérien international (Iata), les SAF pourraient contribuer à hauteur d'environ 65% à la réduction des émissions nécessaire à atteindre la neutralité carbone dans le domaine aérien en 2050.
Leur grand avantage, c'est que les SAF sont très proches du kérosène traditionnel, nous expliquait en mai Jean-Michel Schulz, professeur auprès de la HES-SO. Par conséquent, ajoutait-il, les avions ne changent pas: ces carburants peuvent être mis dans le même réservoir et peuvent être mélangés avec le kérosène pour créer des mélanges.
«Alors que d'autres technologies ne seront disponibles que dans plusieurs décennies, les SAF peuvent être utilisées dès maintenant», confirme Virgin Atlantic dans un communiqué. Plusieurs compagnies privées, à l'image de Swiss, utilisent des mélanges pour certains vols; aucun avion n'avait, pourtant, jamais traversé l'Atlantique en se servant uniquement de ces carburants.
Le SAF utilisé sur le Flight100 est un «mélange unique» fabriqué à partir de graisses résiduelles et sucres végétaux, ajoute le communiqué.
Virgin Atlantic en est certaine, les SAF constituent «la seule solution viable pour décarboner l'aviation long-courrier». Pourtant, bien que le vol ait été qualifié de «tournant», le chemin à parcourir est encore très long. Actuellement, les normes en matière de carburants n'autorisent qu'un mélange de 50% de combustible durable dans les moteurs des avions commerciaux.
Plus important encore, on estime que les SAF représentent moins de 0,1% de l'ensemble des combustibles actuellement utilisés. Et pour cause: ils sont trois à cinq fois plus chers que le kérosène traditionnel. Selon Jean-Michel Schulz, les SAF pourraient être déployés «en l'espace d'une dizaine d'années», mais de nombreux obstacles restent à franchir, dont le premier est celui de la généralisation de leur production.
«Il n'y a tout simplement pas assez de SAF et il est clair que pour parvenir à une production à grande échelle, nous avons besoin de beaucoup plus d'investissements», déplore Shai Weiss, CEO de Virgin Atlantic.
Des actions politiques ont d'ores et déjà été prises. Ce printemps, l'Union européenne (UE) a par exemple adopté des lois qui obligeront les compagnies aériennes à utiliser 70% de SAF d'ici 2050. Les Etats-Unis ont présenté un plan similaire en 2021.
«Nous constatons beaucoup plus d'attention, beaucoup plus d'activité, d'investissements et d'annonces concernant les partenariats sur les SAF», affirme le chercheur Rocky Mountain Institute dans le Washington Post. «Tous ces éléments sont donc de bons signes, ajoutait-il, mais nous n'en sommes encore qu'au début». (asi)