L'ancienne star du X Stormy Daniels, personnage central du procès de Donald Trump à New York, a livré mardi un témoignage cru sur la relation sexuelle qu'elle affirme avoir eue en 2006 avec l'ex-président des Etats-Unis, un épisode au coeur du dossier.
Dans une autre affaire sensible, pour laquelle le milliardaire républicain est accusé d'usage négligeant de documents classifiés, une juge fédérale de Floride a reporté mardi sine die le début du procès pénal. Cette décision, prise par une magistrate nommée par l'ancien président, rend très improbable la tenue d'un procès dans ce dossier avant l'élection présidentielle du 5 novembre pour laquelle il est candidat.
A New York, le témoignage de Stormy Daniels était particulièrement attendu car Donald Trump, qui nie toute relation sexuelle avec elle, est poursuivi pour la dissimulation d'un paiement de 130.000 dollars à l'actrice pour acheter son silence à la toute fin de la campagne présidentielle de 2016.
L'audition s'est déroulée dans une ambiance tendue. Le juge Juan Merchan a même demandé en aparté à l'avocat de Donald Trump de modérer l'attitude «méprisante» de son client qui n'a cessé de «jurer de manière audible», selon un procès-verbal relayé dans la presse américaine et sur les réseaux sociaux.
La défense a demandé, en vain, l'annulation du procès tout entier, au motif que les questions des procureurs sortaient du cadre et que les réponses s'avéraient «extrêmement préjudiciables» pour le candidat des républicains à la présidentielle de novembre contre le sortant démocrate Joe Biden.
Après l'audience, Donald Trump a assuré devant les journalistes que c'était «un jour important, très révélateur» et que «le dossier s'effondre». Mais il n'a fait aucun commentaire sur Stormy Daniels, après que le juge l'a menacé de prison s'il s'en prenait encore aux témoins.
Nerveuse mais volubile, l'actrice de 45 ans raconte avec force détails ce jour où, en marge d'une compétition de golf, elle a fait la rencontre de Donald Trump, alors une figure du monde des affaires et de la jet-set. Après «une très brève rencontre», un membre de la sécurité «(m'a) dit 'M. Trump voudrait savoir si vous souhaitez dîner avec lui'», a-t-elle raconté, devant des jurés absorbés. L'intéressé est resté impassible.
En tailleur pantalon noir, Stormy Daniels, de son vrai nom Stephanie Clifford, décrit une suite d'hôtel «qui faisait trois fois la taille de (son) appartement». Donald Trump l'y a accueillie «habillé d'un pyjama en soie ou en satin».
La conversation est badine, le milliardaire lui fait miroiter une apparition dans sa célèbre émission de téléréalité «The Apprentice», raconte-t-elle. Puis ce moment où, dit-elle, sortant de la salle de bains, elle trouve Donald Trump dévêtu sur le lit.
Si elle ne s'est pas sentie menacée, elle assure que l'intention de l'homme d'affaires «était assez claire» et le «rapport de force déséquilibré».
«J'ai fini par avoir une relation sexuelle avec lui», ajoute-t-elle, précisant, à la demande de la procureure, que Donald Trump ne portait pas de préservatif.
Le juge Juan Merchan a paru agacé par certaines questions de la procureure, alors que la défense de Donald Trump demandait que la relation sexuelle ne soit pas évoquée.
Stormy Daniels dit avoir recroisé Donald Trump quelques fois, puis avoir perdu contact. Selon son récit, lorsque le milliardaire s'est lancé dans la campagne présidentielle, son agente lui a conseillé de monnayer son témoignage. Un tabloïd américain, dont le patron était proche de Donald Trump, avait déjà payé à deux reprises pour acheter l'exclusivité des droits sur des histoires similaires, jamais publiées.
«L'argent ne m'intéressait pas», assure-t-elle, en racontant avoir été menacée en 2011, par un inconnu dans un parking de Las Vegas, pour ne pas parler. Les 130'000 dollars avaient été versés à Stormy Daniels par l'ancien avocat du milliardaire, Michael Cohen, via une société-écran. Il avait été remboursé en 2017 par la holding de Donald Trump, la Trump Organization, des dépenses maquillées selon l'accusation en «frais juridiques» qui sont au centre des poursuites.
Le candidat républicain est poursuivi pour 34 falsifications de documents comptables, qui pourraient lui valoir la première condamnation pénale d'un ancien président des Etats-Unis et, en théorie, une peine de prison. Donald Trump est également poursuivi dans trois autres affaires pénales, dont celle des documents classifiés. Même condamné, il pourrait toujours se présenter le 5 novembre contre Joe Biden.
A New York, Stormy Daniels a aussi raconté mardi le «chaos» qui a suivi dans sa vie quand le paiement a été révélé par le Wall Street Journal en janvier 2018, en pleine présidence Trump. «Soudain, j'étais au premier plan partout», accusée par le président et ses partisans d'être une menteuse, explique-t-elle.
Durant son contre-interrogatoire, l'avocate de Donald Trump, Susan Necheles, a cherché à la dépeindre en personnage vénal, rappelant que Stormy Daniels avait perdu une affaire en diffamation contre l'ex-président et lui devait toujours des centaines de milliers de dollars pour frais d'avocats.
L'actrice a répondu «oui» quand l'avocate lui a demandé si elle détestait Donald Trump. Elle dit souhaiter qu'il aille en prison s'il est condamné. Le ton est encore monté quand l'avocate a affirmé qu'elle avait cherché à extorquer l'ancien président. «Faux», a répondu séchement Stormy Daniels. Son témoignage se poursuit jeudi. (hun/ats)