Le 28 mars dernier, Joe Biden affichait la mine des grands jours. Au célèbre Radio City Music Hall de New York, entouré de Bill Clinton et de Barack Obama, le président a dragué les porte-monnaie bien remplis avec un bilan carrément réjouissant. En quelques heures, 25 millions de dollars seront récoltés. Selon son équipe, ce serait ni plus ni moins que la plus grosse collecte politique en un seul événement.
Dix jours plus tard, au tour de l'adversaire du candidat démocrate, que Biden traite désormais de «Trump le fauché», d'asseoir les grandes fortunes à sa table, à Palm Beach, en Floride. Autre ambiance, même mission: financer une campagne présidentielle qui s'annonce déjà comme la plus onéreuse de l'histoire américaine. Au concours de celui qui pisse le plus loin, le républicain affirme avoir écrasé le président, avec un total de 50 millions de dollars amassés en une soirée.
Ce n'est pas une surprise. Aux Etats-Unis, non seulement l'argent n'est pas un tabou, mais la santé financière d'une campagne est un argument politique de haut vol. Pour Donald Trump, qui accumule les amendes judiciaires et les frais d'avocats, le défi est semé d'embûches. D'autant que Joe Biden devance méchamment le candidat MAGA, une fois penché sur l'écran de la calculette: rien qu'en mars, 90 millions sont tombés dans la caisse des démocrates, 50 millions du côté républicain.
Des montants qui ne pourront être confirmés que dans les semaines à venir, lorsque les comptes se déshabilleront une nouvelle fois devant les électeurs américains. D'ici là, revenons à rapidement sur cette collecte de fonds du week-end, organisée au manoir d'un ami de Donald Trump, un certain John Paulsen.
John Paulsen est l'un des rares businessmen à avoir tiré son épingle du jeu au moment de la crise des subprimes. En 2008, ce gérant de hedge fund empochera trois milliards de dollars de commission et sa société va générer plus de 15 milliards en une année.
Samedi en fin d'après-midi, la cour de son cossu manoir (estimé à 110 millions de dollars) a accueilli un dense ballet de voitures de luxe. Confortablement assis à l'arrière, des gens riches et disposés à lâcher quelques liasses pour catapulter Trump à la Maison-Blanche. Pour Paulsen et les conseillers du candidat, la pression était donc forte. Donald, lui, s'est contenté de résumer la petite sauterie avant même que les invités n'aient touché au moindre biscuit apéritif.
Selon ABC News, il fallait débourser 814 600 dollars pour avoir le droit de manger à la «table du président». Tous les autres ont payé 250 000 dollars par personne pour se contenter de scruter Trump de loin. Au total, une centaine d'invités ont pu faire ripaille et écouter tout un tas de discours, dont celui du candidat, d'une durée de 45 minutes.
Parmi eux, des milliardaires anonymes, mais aussi d'anciens candidats républicains comme Vivek Ramaswamy, le sénateur Tim Scott ou le gouverneur Doug Burgum et, bien sûr, la famille Trump. Et Donald a pu frimer (et souffler?) un bon coup, puisque son épouse a montré le bout d'un nez qu'on ne voit pas beaucoup depuis le début de la campagne. Un crève-cœur pour le 45ᵉ président des Etats-Unis qui, selon le New York Times, tente férocement de convaincre Melania de s'afficher à ses côtés, tant sa popularité peut faire pencher la balance électorale.
Durant son discours le candidat républicain est revenu longuement sur l'une de ses anciennes déclarations, qui avait suscité une vague d'indignation au moment de sa présidence. Alors qu'il causait immigration dans le Bureau ovale, Donald Trump avait décrit Haïti et certains pays africains de «pays de merde». Selon le New York Times, samedi, ce fut l'heure d'en rire et... de «féliciter» une nouvelle fois la Suisse pour ses immigrants de bonne facture.
Un discours qui lui a permis de rappeler que l'immigration en provenance de l'Amérique latine est une «plaie», car ses gangs font passer «les Hells Angels pour des gens extrêmement gentils».
Une fois les manteaux de retour sur les épaules des invités, John Paulsen l'hôte de la soirée s'est félicité de la réussite de sa levée de fonds. Dans un entretien avec Bloomberg, a considéré que «le 6 janvier n'était pas une insurrection ni une tentative de renversement du gouvernement, mais une manifestation qui est devenue incontrôlable». Il ne se fait pas non plus de souci pour les milliardaires qui ont sèchement tourné le dos à Trump, puisque «le président n'a jamais semé le chaos, mais il a fait un phénoménal dès de son premier mandat».
Trump, lui, rêve déjà de «louer le Madison Square Garden», dans un avenir proche, pour écraser la sauterie des démocrates à New York. Et pour rendre ses collectes de fonds «populaires». En d'autres termes, qu'importe d'où vient l'argent, pourvu qu'il atterrisse, au plus vite, dans sa poche. La suite au prochain épisode.