Il n'y a jamais eu autant de vols en jet privé dans le monde qu'en 2022. Cette pratique a explosé pendant la pandémie, alors même que l'aviation commerciale s'effondrait à cause des restrictions sanitaires. Depuis 2020, le nombre de vols privés effectués aux Etats-Unis a augmenté d'environ 20%. L'année passée, on en a recensé 5,3 millions au total, un chiffre qui pulvérise le record précédent, atteint en 2007 (4,8 millions).
C'est ce qui ressort d'un rapport publié lundi par le groupe de réflexion «Institute for Policy Studies» avec Patriotic Millionaires, une organisation d'Américains fortunés qui milite pour taxer davantage les riches.
Le secteur de l'aviation privée se porte donc très bien, malgré le fait que ce moyen de transport est de plus en plus critiqué en raison de ses émissions polluantes. La flotte mondiale est en constante expansion, avance le rapport. De quelque 9895 jets privés en 2000, on est passé à 23 133 en 2022. Soit une augmentation de 133% en 22 ans, avec un ajout moyen de 602 nouveaux avions par an.
Mais qui les utilise? Qui sont ces personnes qui se servent de ce «symbole de l'excès», pour reprendre les mots du rapport? Très peu de gens, selon ses auteurs:
Les auteurs de l'étude ont dressé leur profil. Ainsi, le propriétaire type d'un avion privé est:
Ce profil correspond à une «écrasante majorité» des cas, selon les auteurs du rapport. Qui résument:
En effet, la valeur nette médiane d'un propriétaire de jet privé oscille entre 140 et 190 millions de dollars. Il n'y a qu'environ 63 000 personnes ayant une valeur nette supérieure à 100 millions de dollars dans le monde. Cela signifie que le propriétaire de jet médian représente environ 0,0008% de la population mondiale.
A titre de comparaison, un adulte américain lambda a une valeur nette médiane d'un peu plus de 79 000 dollars. Les jets privés sont donc «tout simplement inabordables pour le ménage américain moyen», affirment les auteurs de l'étude, avant de formuler l'exemple suivant:
Les personnes qui possèdent des jets privés peuvent être propriétaires à part entière de leur avion, ou opter pour la «propriété fractionnée». Cela présuppose qu'ils n'achètent qu'une part de l'avion et qu'ils ne sont pas responsables de l'entretien et des autres exigences logistiques. Pourtant, la différence de richesse entre ces deux types de profil n'est pas très importante, assure le rapport.
Une troisième option consiste à choisir des programmes d'adhésion permettant aux utilisateurs de payer à l'avance le nombre d'heures de vol qu'il souhaite effectuer à titre privé. Même dans ce cas, on a toujours affaire à «un petit groupe de personnes très fortunées».
La personne qui, selon le rapport, a le plus eu recours au jet privé l'année passée est bien connue: il s'agit d'Elon Musk. Le patron de SpaceX a effectué 171 vols privés en 2022, dont un qui n'a duré que six minutes, pour une consommation totale de kérosène supérieure à 800 000 litres qui a émis plus de 2000 tonnes de dioxyde de carbone. Soit un chiffre 132 fois supérieur à l'empreinte carbone moyenne d'un habitant des Etats-Unis.
Les émissions, justement. Aucun moyen de transport n'est aussi polluant. Les jets privés émettent au moins 10 fois plus de substances nocives que les avions commerciaux par passager, avancent les auteurs de l'étude. «Par conséquent, les multimillionnaires et les milliardaires, soit environ 1% de la population, sont responsables d'une quantité très disproportionnée d'émissions de carbone dues aux voyages aériens».
Sans compter que, souvent, ces vols en avion privé sont courts, voire très courts, rappelle le rapport. Et de conclure: