Une manifestation «largement pacifique» de citoyens «excédés» par le «vol d'une élection injustement menée». Peut-être même une «mise en scène» de la part des démocrates pour faire tomber Donald Trump. C'est ainsi que le présentateur Tucker Carlson résume l'assaut du Capitole du 6 janvier, dans son très populaire talk-show Tucker Carlson Tonight.
Appuyée par des extraits de vidéos de caméra de surveillance jamais diffusés, la star de Fox News a avancé que l'évènement était bien plus «pacifique» que ce que les démocrates et les médias ont bien voulu nous faire croire.
Le présentateur, qui draine quelque 3,5 millions de téléspectateurs aux heures de grande écoute, a eu accès à ce contenu VIP par le président de la Chambre des représentants, Kevin McCarthy en personne. Une condition sine qua non de son élection comme nouveau speaker, imposée par un groupe de députés républicains proches de Trump.
Au total, ce sont donc quelque 41 000 heures de bandes, encore inaccessibles au public, qui ont pu être dévorées par la star de Fox News.
Sur les séquences diffusées lundi et mardi, des manifestants flânant tranquillement dans les couloirs du Capitole en prenant des photos, escortés par des policiers - des «guides touristiques». Parmi eux, on devine la toque poilue du désormais célèbre «chaman QAnon», Jacob Chansley.
Bref, selon Tucker Carlson, pas de «soulèvement meurtrier» qui fasse: l'assaut du Capitole n'est qu'une manifestation en grande partie pacifique, en réponse à une élection truquée.
Il s'agit de l'effort le plus flagrant, à ce jour, de l'animateur et porte-parole historique des partisans de Trump, pour minimiser l'insurrection. Difficile de saisir quels sont ses objectifs, au-delà d'attiser une vague méfiance à l'égard des élites «corrompues» de Washington. La position de Carlson s'avère particulièrement ambiguë, à la lumière des dernières révélations dans la presse américaine.
En effet, des conversations privées publiées cette semaine montrent que l'animateur, malgré son discours pro-Trump à l'antenne, n'a jamais porté l'ancien président dans son coeur. Bien au contraire: «Je le hais passionnément», écrit la vedette de télé dans un texto à un collègue, le 4 janvier 2021.
Quelles que soient ses pensées personnelles, le discours de la star de Fox News a provoqué un tollé à l'échelle nationale, y compris dans les cercles républicains.
Le chef de la police du Capitole, Tom Manger, a fustigé une émission «remplie de conclusions offensantes et trompeuses». Selon lui, les quelques images pacifiques et non violentes ne sont pas représentatives des événements dramatiques du 6 janvier.
Il a réitéré ses déclarations selon lesquelles les agents, en minorité, avaient opté pour la désescalade.
Quant à la famille du policier Brian Sicknick, décédé durant l'assaut, elle a regretté dans un communiqué que «chaque fois que la douleur de ce jour-là semble avoir un peu diminué, des organisations comme Fox rouvrent à nouveau nos blessures».
«Je ne pense pas avoir jamais vu un présentateur traiter le peuple américain et la démocratie américaine avec un tel dédain», a regretté mardi le chef de la majorité au Sénat, Chuck Schumer. «Une conduite comme la leur ne demande qu'un autre 6 janvier.»