Volodimir Zelensky aurait sans doute pu s'épargner ce voyage à Washington. Mardi, le président ukrainien n'a pas réussi à surmonter l'impasse entre les démocrates et les républicains dans le conflit sur les nouvelles livraisons d'armes à l'Ukraine. Il est reparti bredouille de la capitale, avec comme seul réconfort les nombreux encouragements qu'il a reçus lors de ses rencontres avec les dirigeants politiques.
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Ce résultat n'était pas surprenant, et on ne sait pas vraiment pourquoi le président Joe Biden a lancé une invitation de dernière minute à son homologue ukrainien.
Des républicains de haut rang avaient déjà annoncé en début de semaine que d'éventuelles négociations avec les démocrates ne pourraient pas être conclues avant le début de la longue pause de Noël et du Nouvel An. Mardi, Mitch McConnell, le chef du groupe républicain au Sénat, a réaffirmé cette position:
Concrètement, il y a de plus en plus de risques que les livraisons d'armes américaines à l'Ukraine doivent être stoppées en janvier, car les caisses de Washington sont vides. De nouveaux crédits de plusieurs dizaines de milliards de dollars ne pourront toutefois passer le cap du Parlement américain que si les démocrates acceptent au préalable la principale revendication des républicains, c'est-à-dire une réforme complète des lois sur l'immigration.
La situation à la frontière américaine avec le Mexique serait «absolument catastrophique», a déclaré, mardi, le président de la Chambre des représentants, Mike Johnson. Selon lui, il faut s'attaquer à ce problème maintenant, car «une frontière étanche est essentielle pour la sécurité des Etats-Unis».
Les démocrates ont jusqu'à présent refusé d'accéder aux demandes des républicains et d'accepter des concessions. La Maison-Blanche et le Capitole considèrent que cette manœuvre est du chantage et la décrivent comme étant un «cadeau de Noël prématuré» des républicains à Poutine.
Le parti de droite semble toutefois avoir, pour une fois, les meilleures cartes en main dans ce poker de négociation – de nombreux électeurs démocrates sont également mécontents de la porosité de la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique. C'est dans ce contexte que des représentants du gouvernement de Biden auraient présenté mardi de nouvelles propositions et invité à de nouvelles négociations.
Les idées des républicains sont néanmoins trop radicales pour de nombreux députés démocrates. Selon eux, le droit d'asile, jusqu'ici très généreux, ne peut pas être aboli en quelques jours. On ne sait donc pas encore si un compromis serait en mesure de réunir une majorité à la Chambre des représentants, dominée par les républicains, et au Sénat, contrôlé par les démocrates.
Certaines voix à Washington affirment que le parti de droite n'est pas du tout intéressé par un compromis bipartisan sur la politique migratoire, par peur de perdre, au début de l'année électorale 2024, un thème avec lequel les républicains pensent pouvoir gagner des voix.
Il n'y a certes aucune preuve à l'appui de cette thèse. Il est toutefois frappant de constater que le président de la Chambre des représentants Mike Johnson a mis mardi un point d'interrogation derrière la stratégie de guerre de l'Ukraine, alors que les pertes des forces armées russes sont entre-temps tout de même énormes.
La Maison-Blanche a déclaré mardi que la Russie avait perdu 315 000 des 360 000 soldats qui avaient envahi l'Ukraine en février 2022. Le républicain, en poste depuis fin octobre, semble ainsi déjà dresser un nouvel obstacle que Kiev devra franchir.
Lors de ses entretiens à Washington, Zelensky s'est montré confiant quant à l'évolution de la guerre. «L'Ukraine fait des progrès», a-t-il déclaré selon le magazine Politico, en faisant également référence à la mer Noire. Il souligne toutefois que Kiev a besoin de systèmes de défense aérienne pour pouvoir mieux se défendre contre l'armée d'invasion russe.
Le président ukrainien semblait fatigué et n'avait pas l'air de vouloir froisser Biden. Lorsqu'on a demandé à Zelensky, lors d'une conférence de presse commune, si son pays continuait à faire pression pour être admis dans l'alliance de défense de l'Otan, il a simplement souri. Puis il a déclaré qu'il s'agissait d'une question très compliquée à laquelle le «grand ami» serait mieux à même de répondre.
"I will pass this question to our big friend, President Biden."
— CBS News (@CBSNews) December 12, 2023
Pres. Zelenskyy drew laughs at a White House press conference when he punted a question about whether Ukraine will be a NATO member. Biden followed him by saying "NATO will be in Ukraine's future, no question." pic.twitter.com/ZA1KuqpEyC
Traduit et adapté de l'allemand par Léa Krejci