Onze morts et deux étages qui partent en fumée: le gîte de vacances de Wintzenheim, qui accueillait des personnes handicapées, n'était ni déclaré en mairie ni conforme aux normes de sécurité.
Le bâtiment incendié, une ancienne grange rénovée il y a quelques années, n'avait «aucune autorisation» pour son activité, a déclaré jeudi le maire adjoint de la petite ville du Haut-Rhin, Daniel Leroy.
«Le gîte qui a brûlé n'a fait l'objet d'aucune autorisation pour l'activité (que la propriétaire, NDLR) y a exercé, il n'avait pas fait non plus l'objet d'autorisations de travaux pour pouvoir accueillir des personnes handicapées», a-t-il rapporté.
De son côté, Nathalie Kielwasser, vice-procureure de la République de Colmar, a souligné que la structure n'avait pas reçu la visite de la commission de sécurité.
Cette commission «donne des préconisations sur la capacité d'accueil, etc. On va vous imposer un certain nombre de règles de sécurité», a-t-elle expliqué. Ainsi, la maison disposait bien de détecteurs de fumée mais pas du type prévu pour des structures accueillant du public.
Quant à l'éventuelle responsabilité pénale de la propriétaire du gîte, qui a donné l'alerte et se trouve en état de choc, c'est quelque chose qu'on «ne peut pas du tout affirmer» pour le moment, a-t-elle insisté.
Il faut «corréler juridiquement la raison du sinistre (...) est-ce que ça a un lien avec les règles de sécurité? Je n'ai pas le retour des investigations criminelles pour le moment», a ajouté la magistrate, qui organise une conférence de presse vendredi à 15h00 pour faire le point sur l'enquête.
Mercredi, Kielwasser avait indiqué que «l'origine serait vraisemblablement pour le moment un feu qui a couvé», sans pouvoir «à ce stade» déterminer les causes de ce sinistre, le plus meurtrier en France depuis l'incendie d'un bar à Rouen en 2016.
Jeudi, le calme était revenu autour du bâtiment éventré. Les enquêteurs de la gendarmerie ont investi le site où deux équipes de l'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN) ont été envoyées, soit un peu plus d'une vingtaine de personnes.
Ils sont appuyés par un laboratoire mobile pour l'identification des victimes. Il permet des analyses rapides d'ADN, avec des résultats obtenus en l'espace de deux à trois jours.
Mercredi, les pompiers ont dû lutter contre un «embrasement généralisé». Arrivés en moins d'un quart d'heure, vers 06h45, ils n'ont rien pu faire pour venir en aide aux vacanciers installés pour la nuit dans les étages du bâtiment.
Au total, 28 personnes se trouvaient dans le bâtiment, dont 17 ont pu sortir à temps, selon la préfecture du Haut-Rhin. Les 13 pensionnaires logés au rez-de-chaussée par Idoine, une association de Besançon, ont été rapatriés indemnes en Franche-Comté.
Onze personnes, dont 10 adultes souffrant de handicaps mentaux légers, ont péri parmi les résidents logés dans les étages. Plusieurs d'entre eux dormaient dans une mezzanine qui s'est effondrée.
«Un drame inqualifiable», a déclaré la ministre chargée des Personnes handicapées, Fadila Khattabi, venue à Nancy jeudi au siège de l'AEIM (Adultes enfants inadaptés mentaux), une association qui prend en charge des personnes présentant un handicap intellectuel et dont cinq de ses membres s'étaient inscrits de manière individuelle à ce séjour. Seule une jeune femme de 25 ans a survécu.
La ministre, qui a rencontré les familles des quatre victimes (trois hommes et une femme âgés de 23 à 49 ans, prénommés Jennyfer, Claude, Jérôme et Jimmy) s'est ensuite rendue en Moselle d'où sont originaires sept autres victimes. Deux personnes ne sont plus en urgence absolue et sont sorties de l'hôpital, a rapporté la ministre, «c'est plutôt une bonne nouvelle».
L'unique rescapée a été «réveillée» par l'incendie et a réussi à sauter du premier étage et a été rattrapée par «un résident du rez-de-chaussée qui était déjà sorti», a expliqué Denis Renaud, président de l'AEIM. Elle était «excessivement choquée, en pleurs pendant une partie de la journée» de mercredi, a-t-il confié, mais «elle a récupéré ensuite» et a «fait preuve d'énormément de résilience».
La salle des fêtes de Wintzenheim sera ouverte vendredi pour un hommage aux victimes. (chl/ats)