L'un des plus grands festivals de BD annulé après d’une crise historique
Séisme dans la BD: le festival international d'Angoulême, plombé par le boycott d'auteurs, a été officiellement annulé par la société organisatrice 9e Art+. Celle-ci rejette sur les financeurs publics «la responsabilité» de cette décision quasi inédite annoncée lundi.
Depuis plusieurs semaines, la plus grande incertitude entourait la 53e édition du Festival international de la bande dessinée (FIBD) prévue du 29 janvier au 1ᵉʳ février, l'un des plus grands rendez-vous du secteur qui attire chaque année des auteurs du monde entier et 200 000 visiteurs. C'est l'un des plus grands festivals du monde dans le genre.
Après une édition 2025 sous tension, de nombreux auteurs et autrices, dont la lauréate du Grand Prix de la BD 2025 Anouk Ricard, avaient annoncé boycotter l'édition 2026, critiquant l'opacité et la dérive commerciale du festival.
S'appuyant sur des révélations du quotidien L'Humanité, ils reprochaient également à 9e Art+ d'avoir licencié une salariée qui venait de porter plainte pour un viol survenu en marge du festival en 2024.
«Confiance rompue»
Face à la tempête, les grandes maisons d'édition de BD avaient récemment jugé l'édition 2026 «compromise», estimant «la confiance (...) rompue» avec les organisateurs, avant que les financeurs publics du festival, qui contribuent pour moitié à son budget d'environ six millions d'euros, n'appellent le 20 novembre à une annulation pure et simple.
Face à la pression, la société 9e Art+, qui organise l'événement depuis 2007, a décidé d'annuler la prochaine édition du festival pour la première fois depuis sa création en 1974, excepté en 2021 en raison de l'épidémie de Covid.
«L'édition 2026 est annulée», a indiqué à l'AFP Me Vincent Brenot, l'un des deux avocats de la société 9e Art+, confirmant une information du journal La Charente Libre.
«La responsabilité en incombe aux financeurs publics qui n'ont cessé de s'immiscer dans la gestion, pourtant privée, de l'événement, avec la volonté manifeste d'en évincer l'organisateur historique», détaillent-ils.
Une accusation rejetée auprès de l'AFP par la région Nouvelle-Aquitaine, un des principaux financiers publics du festival, qui évoque une «pirouette».
Frédéric Vilcocq, conseiller culture de la région Nouvelle-Aquitaine:
Après l'édition 2025, les opposants à 9e Art+ avaient obtenu de l'association FIBD, détentrice des droits du festival, le lancement d'un appel d'offres dans l'espoir qu'un nouvel organisateur soit désigné après l'édition 2027.
9e Art reconduit
A l'issue du processus, critiqué pour son manque de transparence, 9e Art+ avait toutefois été reconduit début novembre, provoquant une nouvelle levée de boucliers.
Face au tollé, la reconduction avait été annulée par l'association FIBD qui avait même décidé d'écarter 9e Art+ du futur appel d'offres, sans toutefois réussir à éteindre l'incendie. Les financeurs publics (Etat, région, collectivités) avaient alors fait part de leur intention de «reprendre la main» sur l'organisation future de l'événement.
Les avocats de 9e Art+ estiment:
Selon le communiqué, la société 9e Art+ affirme par ailleurs s'inquiéter «des conséquences humaines et économiques de l'absence d'édition 2026» et pointe la «lourde incertitude» qui entoure l'édition 2027, dont l'organisation lui «appartient juridiquement».
«Une solution concertée peut, et doit, maintenant être trouvée», assure le communiqué. (jah/ats)
