La France devient, lundi, le premier pays à inscrire explicitement dans sa Constitution l'interruption volontaire de grossesse (IVG). L'Hexagone prend le contre-pied de nombre de pays où le droit à l'avortement recule.
Députés et sénateurs réunis solennellement en Congrès au château de Versailles devraient approuver à une très large majorité la modification de la Constitution proposée par le gouvernement du président Emmanuel Macron.
A quatre jours du 8 mars, journée internationale des droits des femmes, cette réforme introduira à l'article 34 la phrase:
Une majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés est requise pour approuver ce changement. Elle devrait être atteinte sans difficulté, après les votes massifs de l'Assemblée nationale (493 députés contre 30) et du Sénat (267 voix contre 50).
Il s'agira de «la première disposition constitutionnelle aussi explicite et large en la matière, pas juste en Europe, mais dans le monde», a souligné Leah Hoctor, du Center for Reproductive Rights américain.
La réunion du Congrès viendra parachever une longue bataille politique initiée par la gauche, portée par les associations féministes et finalement embrassée par le gouvernement après plusieurs initiatives parlementaires.
«Il n'y a pas de suspense, mais le moment est crucial», a résumé, lundi, la présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet, évoquant «un moment important pour les femmes du monde entier».
Soutenue par plus de 80% des Français, la constitutionnalisation de l'IVG s'est progressivement imposée dans le paysage politique. Même la droite et l'extrême droite, historiquement opposées ou sceptiques devant la formulation retenue par le gouvernement, ont fini par voter majoritairement pour la réforme, malgré certaines réticences.
L'IVG a été légalisée en France en 1975, quatre ans après un appel choc où 343 femmes, dont les actrices Jeanne Moreau et Catherine Deneuve et les écrivaines Simone de Beauvoir, Marguerite Duras et Françoise Sagan, avaient révélé s'être fait avorter.
Les opposants à l'IVG ont annoncé une mobilisation à Versailles lundi après-midi, tandis que les partisans de la réforme se sont donné rendez-vous au Trocadéro à Paris où une retransmission du vote sur écran géant est organisée à l'initiative de la mairie et de la Fondation des femmes.
«C'est un événement mondial, une inspiration pour les femmes du monde entier. Cela a dépassé nos rêves!» a réagi auprès de l'AFP Claudine Monteil, pionnière féministe qui fut la plus jeune signataire en 1971 du «Manifeste des 343». (jah/ats)