L'hôpital al-Shifa a été pris d'assaut par les forces israéliennes (Tsahal) la semaine dernière. Dimanche, 31 des prématurés qui s'y trouvaient ont été évacués vers l'hôpital Emirati de Rafah, près de la frontière avec l'Egypte. De là, 28 des bébés ont traversé la frontière lundi – trois autres sont restés dans la bande de Gaza.
🚨 A few moments ago, the Palestine Red Crescent ambulance teams departed from in front of the Emirati Hospital in Rafah to transport 28 premature infants to the Rafah Crossing, in preparation for their transfer to receive medical treatment in Egyptian hospitals.
— PRCS (@PalestineRCS) November 20, 2023
📌This comes… pic.twitter.com/PiXNuIAF2T
Ayat al-Daour est la mère des jumelles qui ont été transportées à l'hôpital Emirati de Rafah, peut-on lire dans le New York Times. Elle les a mises au monde cinq jours après le début des combats et a pu quitter l'hôpital al-Shifa peu après – mais sans ses deux filles, Mera et Dahab. Ayat a dû attendre 39 jours pour les revoir.
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Lorsqu'elle a quitté le bâtiment, elle s'est enfuie vers un camp de réfugiés, puis peu après vers le sud de la bande de Gaza. Durant cette période, elle n'a pas pu contacter l'hôpital al-Shifa et ne savait donc pas comment allaient ses filles. Lorsqu'elle a appris que tous les prématurés avaient été transférés à l'hôpital Emirati dans le sud de la bande de Gaza, elle s'est mise en route à pied. Elle était d'ailleurs très inquiète, car les médias avaient annoncé qu'un bébé prématuré était mort et ne savait pas s'il s'agissait d'un des siens. Après des heures de marche, le soulagement: elle a pu voir ses jumelles, qui se portaient bien. Celles-ci ont néanmoins été emmenées en Egypte pour recevoir des soins supplémentaires.
Many babies in critical condition, all fighting infections. @EleniGiokos reports on the plight of Al-Shifa Hospital’s premature babies. Doctors say 5 babies died while 28 babies are now in Egypt for treatment. pic.twitter.com/ZgzIhunDJ3
— Christiane Amanpour (@amanpour) November 20, 2023
Warda Sbeta craignait également pour son nouveau-né, comme elle l'a raconté mardi à Reuters. Son mari et elle ont désespérément vérifié la liste de noms publiée par le service de néonatologie de l'hôpital de Rafah. Et c'était écrit noir sur blanc: Anas. Leur petit garçon était en sécurité.
Warda aurait eu la possibilité de se rendre en Egypte avec son fils. Mais cette mère de 32 ans a sept autres enfants dont elle doit s'occuper avec son mari. Elle a donc décliné l'offre, et vit maintenant avec son mari, son bébé et ses sept autres enfants dans le centre d'accueil pour réfugiés de Khan Younis. Anas est donc l'un des trois prématurés qui sont restés dans la bande de Gaza. Selon les médecins de l'hôpital de Rafah, l'un des deux autres bébés n'a pas encore pu être identifié. Ils n'ont donné aucune information sur le troisième bébé.
Pour au moins cinq des bébés, il était trop tard. Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (BCAH) a annoncé que cinq bébés nés prématurément étaient morts à l'hôpital al-Shifa en raison du manque d'électricité et de carburant. Reuters parle quant à lui de huit bébés prématurés décédés. Lorsque l'hôpital a donné l'alerte le 12 novembre, le personnel soignant s'occupait encore de 39 bébés.
This past weekend 31 babies were rescued from Al-Shifa hospital in northern Gaza as part of an interagency UN effort alongside the Palestinian Red Crescent Society.
— UNICEF (@UNICEF) November 20, 2023
Many of these babies have now been transferred to hospitals in Egypt to receive the care they urgently need. pic.twitter.com/LJn86yT8QT
L'OMS a annoncé dimanche que tous étaient malades. Onze ou douze d'entre eux sont dans un état critique. L'Unicef, qui a participé à l'évacuation des bébés, a également déclaré que l'état des bébés s'était rapidement détérioré avant l'évacuation.
Le directeur général de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a posté sur la plateforme X (anciennement Twitter) une photo d'un Casque bleu de l'ONU s'occupant d'un des bébés prématurés. Il écrit que les bébés ont été évacués avec six soignants et dix membres de leur famille par des employés de l'hôpital dans des conditions extrêmement délicates et hautement dangereuses. Selon le porte-parole de l'Unicef James Elder, 20 bébés n'étaient accompagnés par aucun membre de leur famille. Certains sont orphelins; pour d'autres, la famille n'a pas été identifiée.
.@WHO has led a second @UN and @PalestineRCS mission to Al-Shifa Hospital in #Gaza today, under extremely intense and high-risk security conditions.
— Tedros Adhanom Ghebreyesus (@DrTedros) November 19, 2023
31 very sick babies were evacuated, along with 6 health workers and 10 staff family members.
6 Palestine Red Crescent ambulances… pic.twitter.com/YJc25M0vnc
De nombreux nourrissons de l'hôpital al-Shifa ont été séparés de leur famille après le 7 octobre. Ce jour-là, le Hamas a lancé une attaque sans précédent contre Israël, tuant 1200 personnes et en enlevant 240. En réaction, l'armée israélienne a lancé de nombreuses attaques aériennes sur la bande de Gaza et a pénétré dans la région bouclée avec des troupes au sol. Plus de 13 000 personnes ont été tuées depuis dans la bande de Gaza, selon le Hamas. L'ONU estime qu'1,7 million de personnes ont été déplacées par l'escalade militaire.
Warda Sbeta et sa famille ont également dû quitter leur domicile dans la ville de Gaza pour se réfugier dans le sud. Elle a dû laisser derrière elle le petit Anas, déjà en traitement à l'hôpital al-Shifa avant le 7 octobre. Peu après, elle a reçu un appel de l'hôpital. On lui a demandé d'aller chercher le bébé – mais les routes pour retourner au nord étaient fermées.
L'hôpital était déjà saturé. Les patients étaient soignés à même le sol dans les couloirs, tandis que l'électricité et le carburant venaient lentement à manquer. Lorsque l'hôpital a été pris d'assaut par les forces israéliennes le 15 novembre, Warda n'en pouvait plus d'être séparée de son bébé. Israël a accusé le Hamas d'utiliser l'hôpital comme son centre de contrôle – ce que le Hamas a toujours nié. Après l'assaut contre l'hôpital, les communications avec l'hôpital ont été complètement coupées, et Warda ne savait pas si son bébé était encore en vie.
Le 20 novembre, les prématurés ont finalement été sauvés de l'hôpital al-Shifa. Les forces armées israéliennes ont également participé à l'évacuation – elles écrivent sur Twitter avoir facilité l'évacuation et fourni des couveuses.
The IDF, in cooperation with COGAT, helped facilitate the safe evacuation of newborn babies from the Shifa Hospital to receive medical treatment in Egypt.
— Israel Defense Forces (@IDF) November 20, 2023
IDF teams on the ground assisted UN teams in the evacuation using incubators provided by Israel.
We will continue to… pic.twitter.com/8Vobkjw5OT
Le Dr. Mohammad Salama, responsable du service de néonatologie à l'hôpital Emirati de Rafah, a déclaré à Reuters que l'état des trois bébés qui se trouvaient encore à l'hôpital de Gaza était stable. Mais les 31 bébés prématurés étaient dans un «état catastrophique» lorsqu'ils sont arrivés à Rafah.
Après avoir été soignés dans un premier temps à la maternité de Rafah, les bébés ont été transportés vers la ville d'al-Arish, capitale du gouvernorat égyptien du Nord-Sinaï. Douze d'entre eux ont ensuite été transportés par avion jusqu'au Caire. Jeremy Hopkins, chef de l'Unicef au Caire, a déclaré à l'agence de presse Reuters que l'organisation travaille avec les autorités égyptiennes pour clarifier les conditions exactes des bébés. Il faut déterminer comment les bébés arrivés en Egypte sans parents peuvent être aidés, au-delà de l'aide médicale.
Traduit et adapté de l'allemand par Tanja Maeder