Tandis qu’Israël et le Hamas poursuivent leurs négociations au Qatar, l’armée israélienne, appuyée par de lourds bombardements aériens, a lancé une offensive terrestre attendue depuis plusieurs jours dans la bande de Gaza. L’armée a indiqué dimanche que ses troupes avançaient dans plusieurs zones du territoire. Selon les autorités sanitaires gérées par le Hamas, plus de cent personnes auraient été tuées par des frappes aériennes et d’artillerie d'ici à la mi-journée.
Quels sont les objectifs de l’offensive israélienne? Où en sont les pourparlers? Et quelle est la situation de la population à Gaza?
Ces derniers jours, les bombardements aériens et d’artillerie ont touché à plusieurs reprises des hôpitaux, notamment l’hôpital européen de Khan Younès. Dimanche, le ministre israélien des Affaires étrangères, Israel Katz, a déclaré que l’une des frappes visait le chef du Hamas, Muhammed Sinwar: «Il n’y a pas encore de confirmation officielle, mais tout porte à croire que Muhammed Sinwar a été éliminé», a-t-il affirmé. Sinwar avait accédé à la tête du mouvement après la mort de son frère Yahya Sinwar en octobre.
L’opération baptisée par Israël «Les Chars de Gideon» vise en priorité la «défaite du Hamas» et le «contrôle opérationnel du territoire», selon le quotidien Haaretz qui cite un document interne de l’armée. Le retour des quelque vingt otages israéliens encore en vie ne figure qu’en sixième position des priorités, après la «concentration et le déplacement de la population».
Des sources gouvernementales ont indiqué la semaine dernière dans les médias israéliens que la bande de Gaza devait être «conquise» et que l’armée y établirait une «présence permanente». La population civile serait repoussée vers le sud de l’enclave. L’objectif déclaré est de faire capituler le Hamas par la pression militaire, afin qu’il dépose les armes et libère les otages restants.
Des voix critiques accusent, toutefois, Benjamin Netanyahou de prolonger la guerre à des fins politiques. D’après les sondages, une majorité écrasante d’Israéliens est favorable depuis des mois à un échange: la fin de la guerre contre la libération des derniers otages. Au lieu de cela, le premier ministre a, plusieurs fois, exprimé son soutien à un plan proposé par l’ex-président américain Donald Trump, prévoyant le départ «volontaire» d’une large partie de la population palestinienne vers d’autres pays.
Les frappes touchent une population déjà affamée. Depuis des semaines, des experts mettent en garde contre un risque de famine dans le territoire côtier. Israël continue, cependant, de nier les rapports faisant état de malnutrition et de famine, accusant le Hamas de détourner l’aide humanitaire à son profit.
Désormais, une organisation humanitaire privée devrait assurer la distribution de l’aide depuis quelques rares points de distribution. Ces installations, principalement situées dans le sud de Gaza, seraient sécurisées par des troupes israéliennes et des sociétés de sécurité américaines privées. Mais les ONG ont rejeté cette solution, la jugeant irréaliste et potentiellement contraire au droit international, et refusent d’y participer. L’organisation humanitaire privée soutenue par les Etats-Unis a d’ailleurs reconnu récemment qu’elle ne pourrait atteindre qu’une partie des personnes dans le besoin à Gaza — et pas avant début juin au plus tôt.
L’offensive israélienne a suscité de vives critiques à l’international. Le ministère des Affaires étrangères à Berlin a fait part de sa «profonde inquiétude» quant aux objectifs stratégiques d’Israël et à la situation humanitaire à Gaza. Mais depuis le début du conflit, ce type de mises en garde ne provoque guère plus que des haussements d’épaules à Jérusalem.
Les espoirs de stopper l’offensive reposaient plutôt sur Donald Trump. Certains observateurs avaient perçu une tension croissante entre lui et Netanyahou, après que l’ex-président américain a évité Israël lors de sa première visite dans la région la semaine dernière. Vendredi, Trump s’est limité à déclarer: «Nous allons nous occuper de Gaza, beaucoup de gens y meurent de faim», sans préciser le sens de ses propos.
Les discussions sur un cessez-le-feu, longtemps au point mort au Qatar, semblent connaître une avancée: selon plusieurs sources médiatiques, le Hamas aurait accepté une proposition de trêve de 60 jours contre la libération de neuf otages et de prisonniers palestiniens. Netanyahou a évoqué la possibilité de mettre fin à la guerre, à condition que le Hamas dépose les armes et parte en exil.
Or, les négociations ont déjà échoué par le passé sur ce point: le Hamas refuse de se désarmer, et le premier ministre israélien ne veut pas mettre fin à la guerre tant que le mouvement islamiste reste au pouvoir à Gaza.