Un accord de paix pourrait-il mettre fin à la guerre en Ukraine? Sous quelles conditions? A l'approche du sommet sur la paix en Ukraine, qui se tiendra au Bürgenstock en juin, ces questions deviennent de plus en plus pressantes.
Selon la chercheuse Alexandra Dienes, «l'heure ne semble pas être à la diplomatie, du moins pour le moment». Seule exception, a-t-elle ajouté, «l'échange de prisonniers, qui se déroule très lentement». Pourtant, à l'avenir, «la diplomatie sera la seule voie», a-t-elle souligné lors d'une table ronde à Vienne.
Lors de la même manifestation, Stephanie Fenkart, directrice de l'International Institute for Peace (IIP), a esquissé les perspectives pour les deux parties en guerre. Selon elle, les conflits armés peuvent en principe se terminer de deux manières:
Selon la chercheuse, les belligérants ne sont toutefois prêts à négocier que lorsqu'ils sont fatigués de la guerre et que l'usure est telle que l'on pense ne plus pouvoir prendre l'avantage sur l'adversaire. «Nous en sommes loin», conclut-elle.
Comment la guerre d'Ukraine pourrait-elle se terminer dans un avenir proche? Un retour en arrière dans l'histoire pourrait peut-être nous aider. Nous avons choisi quatre guerres de l'époque moderne pour illustrer les mécanismes qui ont conduit à la fin des hostilités.
L'invasion inattendue de la République de Corée par le Nord communiste en juin 1950 a mené les deux camps au bord de la défaite au cours de trois années de guerre extrêmement sanglantes, avant que le front ne se stabilise le long du 38ᵉ parallèle, après un bilan estimé à 3,5 millions de morts.
Le premier grand conflit par procuration de la guerre froide a pris fin avec l'armistice de Panmunjeom, signé après de longues et âpres négociations, principalement parce que les grandes puissances derrière les belligérants – l'Union soviétique après la mort de Staline, la Chine et les Etats-Unis – ont compris la nécessité d'une fin de guerre rapide. Les deux parties ont cependant tenté de gagner du terrain jusqu'au dernier jour avant l'arrêt des combats.
Depuis lors, la guerre de Corée est considérée comme un conflit gelé qui a survécu à la fin de la guerre froide. La paix n'a jamais été signée et deux armées suréquipées et toujours prêtes à en découdre se font face de part et d'autre de la zone démilitarisée. Pour sa sécurité, la Corée du Sud mise en outre largement sur le déploiement de troupes américaines et sur le bouclier nucléaire de son principal allié.
La série de guerres qui a suivi l'éclatement de la Yougoslavie dans les années 1990 s'est terminée par différents accords qui avaient tous un point commun: après une pression massive de la communauté internationale, les belligérants, en premier lieu la Serbie de Slobodan Milosevic, ont dû accepter les plans de paix respectifs; le plus connu étant l'accord de paix de Dayton en 1995, qui a mis fin aux massacres de la guerre de Bosnie.
Pour mettre fin à la guerre du Kosovo en 1998-1999, l'Otan a même eu recours à la force militaire directe par des bombardements, avant que la Serbie ne cède. Un an plus tard seulement, Slobodan Milosevic a été renversé et extradé vers La Haye. Pour le politologue allemand Carlo Masala, cette issue montre qu'il fallait amener l'agresseur serbe au point où «il craignait de perdre plus que de gagner en continuant la guerre» – une leçon transposable à la Russie actuelle.
La fin des guerres ouvertes n'a toutefois pas apporté une stabilité durable. Le conflit du Kosovo, en particulier, ne cesse d'engendrer de nouvelles tensions, le déploiement de la force de maintien de la paix des Nations unies ayant jusqu'à présent permis d'éviter des affrontements de grande ampleur.
Le retrait des troupes soviétiques d'Afghanistan, après une décennie d'occupation sanglante, a été motivé par deux facteurs décisifs: les affrontements contre les moudjahidines islamistes, de plus en plus perçus comme inutiles par la population soviétique, et le bouleversement de la politique intérieure initié par Mikhaïl Gorbatchev.
Ce n'est que sous la nouvelle direction soviétique que l'on s'est rendu compte que l'engagement en Afghanistan, qui se trouvait dans une impasse stratégique, ne se justifiait pas, tant sur le plan militaire que politique et économique. Pourtant, les pertes humaines et matérielles soviétiques de l'époque ne représentent qu'une fraction de ce que la Russie paie aujourd'hui pour sa guerre contre l'Ukraine.
Pour l'Union soviétique, le retrait d'Afghanistan en février 1989 a constitué le point de départ visible de la désintégration de l'Etat. Une guerre civile permanente s'en est suivie dans un Afghanistan déchiré et, après le 11 septembre, une nouvelle intervention, menée par les Etats-Unis.
La guerre Iran-Irak, aujourd'hui largement oubliée, est l'exemple type d'une guerre qui se termine par une usure militaire mutuelle, sans qu'aucun des deux belligérants n'en tire un avantage significatif. Le dictateur irakien Saddam Hussein n'a pas pu, par son incursion en 1980, renverser le régime des mollahs de l'ayatollah Khomeini, arrivé au pouvoir l'année précédente, et l'Iran n'a pas pu, en retour, imposer sa révolution islamique à son voisin.
Au contraire, la guerre a mené les deux grandes nations productrices de pétrole au bord du gouffre économique. La reconnaissance mutuelle d'une résolution d'armistice de l'ONU en août 1988 n'a fait qu'ouvrir la voie à une escalade en chaîne au Proche et au Moyen-Orient: Saddam Hussein a cherché son salut deux ans plus tard en attaquant le Koweït, ce qui a marqué le début de la Guerre du Golfe (1990-1991).
L'Iran poursuit à ce jour ses guerres par procuration dans la région avec l'aide d'organisations terroristes alliées telles que le Hamas et le Hezbollah chiite, avec comme point culminant l'attaque de missiles contre Israël le 14 avril 2024.
Traduit et adapté par Tanja Maeder