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Guerre contre l'Ukraine

L'échange de prisonniers est une double victoire pour Poutine

Echange de prisonniers entre la Russie et l'Occident
Evan Gershkovich, reporter du Wall Street Journal (à droite), l'ex-soldat Paul Whelan (au centre) et le politicien russe d'opposition Ilya Yashin ont été libérés dans le cadre d'un échange de prisonniers.

Poutine a récupéré son tueur à gages et s'est débarrassé des opposants

C'est le plus grand échange de prisonniers depuis l'époque soviétique: Moscou libère le journaliste américain Evan Gershkovich, plusieurs Allemands et différents opposants russes. En échange, le Kremlin obtient la libération de Vadim Krasikov, le «meurtrier du Tiergarten».
02.08.2024, 06:0402.08.2024, 08:52
Inna Hartwich, Moscou / ch media
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Petit à petit, les confirmations ont afflué jeudi après-midi: oui, Kevin Lick est libre, écrit d'abord le groupe de soutien du jeune germano-russe de 18 ans. Le jeune homme avait passé quatre ans dans une colonie pénitentiaire russe pour «trahison d'Etat».

Oui, écrit peu après le Wall Street Journal, Evan Gershkovich est en route pour rentrer chez lui. Le journaliste américain avait été arrêté à Iekaterinbourg en mars 2023 et condamné à la hâte, il y a seulement deux semaines, à 16 ans de colonie pénitentiaire à «régime sévère» pour espionnage présumé.

Cette précipitation prend désormais tout son sens. Evan Gershkovich était exactement la monnaie d'échange dont le Kremlin avait besoin pour obtenir la libération de Vadim Krasikov, le tristement célèbre «assassin du Tiergarten», un tueur au service de l'Etat, emprisonné en Allemagne pour avoir assassiné un ancien commandant tchétchène au Tiergarten de Berlin.

Un double succès pour Poutine

En plus d'Evan Gershkovich, un autre Américain rentre aussi au pays: Paul Whelan. L'ancien fantassin avait été condamné à 16 ans pour «espionnage» et détenu pendant quatre ans dans une colonie pénitentiaire russe.

Finalement, Ankara a confirmé que le plus grand échange de prisonniers depuis l'époque soviétique avait eu lieu, avec 26 personnes échangées. 16 citoyens russes et étrangers détenus dans des colonies pénitentiaires russes, dont un Allemand condamné à mort en Biélorussie, ont été troqués contre dix Russes condamnés à de lourdes peines de prison par des tribunaux occidentaux.

Pour le Kremlin, l'accord négocié est un véritable succès. Poutine fait d'une pierre deux coups. Il montre qu'il protège ceux qui lui sont fidèles tout en expulsant ceux qu'il considère comme indésirables dans son pays.

Les prisonniers préféraient rester en Russie

Ce commerce humain sauve sans doute la vie des prisonniers politiques russes. Mais certains des opposants à Poutine verront cet échange comme une punition. Sans avoir leur mot à dire, ils se retrouvent devant un fait accompli, expulsés de leur propre pays, perdant tout ce pour quoi ils avaient lutté dans leur Russie bien-aimée.

Les opposants politiques russes Vladimir Kara-Murza et Ilya Yashin, qui militent depuis leur jeunesse pour une Russie libre et libérale et qui avaient choisi de rester dans le pays malgré les dangers croissants, figurent par exemple sur la liste des libérés.

A l'image d'Alexei Navalny, tué en février dans une colonie pénitentiaire, ils souhaitaient vivre en Russie et préserver leur crédibilité en tant que politiciens. Ils ont tout accepté, y compris la brutalité de l'emprisonnement russe.

Navalny a payé son combat de sa vie. De son côté, Vladimir Kara-Murza a survécu à deux tentatives d'empoisonnement par les services secrets russes et se trouvait dernièrement dans un hôpital pénitentiaire à Omsk, en Sibérie. En avril 2023, il a été condamné à 25 ans pour haute trahison, une sentence digne de l'époque stalinienne. Son crime? Il avait publiquement condamné l'invasion russe en Ukraine à la Chambre des représentants de l'Arizona.

Ilya Yashin, quant à lui, avait rapporté sur sa chaîne YouTube les atrocités russes commises à Boutcha et a été condamné à huit ans et demi pour «fausses déclarations sur l'armée russe». Il a plusieurs fois souligné, y compris depuis sa détention, qu'il n'accepterait pas d'être libéré grâce à un échange de prisonniers.

Mais qui lui a demandé son avis? Qui a demandé à Oleg Orlov, militant des droits de l'homme, qui a été condamné à deux ans et demi de colonie pénitentiaire pour «discrédit de l'armée russe»? L'Etat russe les considère comme sa propriété et fait ce qu'il veut avec eux. Tout comme avec Alsou Kurmasheva, Andreï Pivovarov, Lilia Chanysheva, Xenia Fadeeva, Sasha Skotchilenko et encore cinq autres prisonniers politiques. Il les a d'abord emprisonnés, puis les a expulsés du pays contre leur volonté.

L'Ukraine a eu la peau du «char tortue» russe
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