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Guerre contre l'Ukraine

Russie: Poutine a une nouvelle arme pour punir ses opposants

Poutine a une nouvelle arme pour punir ses opposants

Le président russe a signé une nouvelle loi dont l'objectif est de dissuader les opposants à la guerre en Ukraine, même ceux qui se trouvent en dehors du pays.
19.02.2024, 14:5919.02.2024, 14:59
Inna Hartwich, Moscou / ch media
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«La loi sur les crapules a été adoptée», s'est réjoui Viatcheslav Volodine. Le président de la Douma, la chambre basse du Parlement russe, l'avait déjà annoncé il y a deux semaines. Tous les participants à la séance – près de 80% des députés de la Douma – avaient alors voté en faveur de la loi permettant à l'Etat de confisquer les biens, les médailles et les titres des critiques du régime.

La semaine dernière, Vladimir Poutine a également signé les modifications. Une nouvelle clause élastique entre ainsi en vigueur, dont l'objectif est avant tout de dissuader les critiques du régime et qui vise en premier lieu les émigrés russes. Ces derniers ne doivent se sentir en sécurité nulle part, même en dehors de leur pays.

«Ils souillent notre pays»

Le régime estime que l'emprisonnement ne suffit plus pour punir les opinions politiques des personnes qu'il ne peut pas tolérer. Avec cette loi sur l'expropriation, il veut surtout se venger de ceux qui condamnent la guerre – ou, selon la Russie, «l'opération militaire spéciale» – et qui ont quitté le pays par centaines de milliers.

Avant le procès à la Douma, Viatcheslav Volodine écrivait:

«Ils mènent une vie prospère, louent leurs biens et continuent à recevoir leurs tantièmes au détriment des citoyens russes. Ils utilisent ces fonds pour soutenir le régime nazi en Ukraine. Ils souillent notre pays et se sentent impunis à l'étranger. Ils pensent sans doute que la justice ne peut pas les atteindre.»

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Il faisait probablement référence à des personnalités russes du show-business et à des opposants qui vivent désormais à l'étranger. Il qualifie de «crapules» et de «traîtres» tous ceux qui osent ne serait-ce que remettre en question l'invasion russe de l'Ukraine. Le président de la Douma ne cesse d'affirmer que le Parlement ne fait que répondre à un «besoin de la société» et que les restrictions correspondent à la volonté du peuple.

Une loi délibérément vague

La modification de la loi fait que davantage de délits peuvent désormais être sanctionnés par la confiscation des biens. Ces délits englobent notamment la «diffusion intentionnelle de fausses informations sur l'armée russe» et de «l'incitation publique à des activités dirigées contre la sécurité de l'Etat». La liste de celles-ci est longue: désertion, franchissement illégal de la frontière, espionnage, trahison, collaboration secrète avec des organisations étrangères, aide à l'établissement de listes de sanctions, réhabilitation du nazisme (ce qui inclut, selon le gouvernement russe, toute déclaration de soutien à l'Ukraine).

Comme beaucoup de lois russes, cette loi est formulée de manière vague. La justice peut ainsi élargir le champ d'application des paragraphes. En fin de compte, personne ne sait ce qui est punissable. Et ce caractère l'arbitraire est tout à fait intentionnel. En plus des peines de prison déjà souvent disproportionnées, les condamnés se voient désormais confisquer les biens avec lesquels ils auraient commis le prétendu délit.

L'Etat peut également confisquer les choses qu'ils ont obtenues grâce au délit qui leur est reproché. Il peut s'agir du téléphone portable d'une personne qui poste quelque chose de critique à l'égard du régime, ou des honoraires d'un journaliste qui écrit sur l'Ukraine et diffuse ainsi, aux yeux de la justice russe, de «fausses nouvelles sur l'armée russe». Si quelqu'un «met en danger la sécurité de l'Etat», la voiture qu'il a achetée bien avant le «délit» pourrait ainsi être confisquée.

Pas d'application rétroactive

La loi ne devrait pas être appliquée rétroactivement. En tout cas, pas pour le moment. Les députés qui l'ont votée à la hâte pensent ainsi protéger les citoyens russes, «nos enfants et petits-enfants», comme l'a dit Irina Iarovaïa, qui a contribué à introduire la loi à la Douma.

Ces durcissements s'inscrivent dans le cadre d'une politique vindicative qui tente de remédier à son impuissance face à la dissidence par une répression toujours plus radicale. Une politique qui mise sur les menaces et qui sème la peur, chez les Russes en Russie comme à l'étranger.

Traduit et adapté de l'allemand par Léa Krejci

Des images extraites du livre Holy Rus, de Vladislav Semenov
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source: vladislav semenov / vladislav semenov
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