Marine mise sur Donald Trump.
A force de bavarder avec des Américains au coin d'un bar ou d'une rue, mon sentiment est que nombre d'entre eux sont plus ou moins résignés à voter pour leur ancien président.
Le vote Trump s'étend bien au-delà des seuls trumpistes et zigotos d’extrême droite à lunettes Oakley. Il concerne aussi de nombreux Américains «normaux». Des personnes raisonnables, respectables et tout à fait fréquentables qui pèsent le pour et le contre en matière d’impôts, d'inflation, de business et du moyen le plus sûr de remplir leur frigo. La démocratie est un concept moins concret que «fin du mois».
Sans oublier la trouille presque panique de frontières grandes ouvertes et incontrôlées, avec laquelle Trump joue sournoisement depuis le début de sa campagne.
Alors, oui. Selon moi, beaucoup de citoyens sont prêts à fermer les yeux sur les aspects les plus toxiques. Les mensonges, les théories du complot, les sorties farfelues, les chiens et les chats, les insultes sexistes - et oui, même l’assaut du Capitole du 6 janvier.
Kamala Harris, de son côté, reste aux yeux de beaucoup d'entre eux une illustre inconnue qui porte le poids de l'administration de son prédécesseur, Joe Biden, sans avoir eu le temps de se faire connaître ni de dérouler un programme bien à elle.
Plonger dans l'inconnu est parfois plus effrayant qu'un danger familier.
Fred parie sur Kamala Harris.
Trump va perdre cette élection et il le sait sans doute déjà. Kamala Harris est moins charismatique que Barack Obama, mais plus en forme que Joe Biden. Sa seule force? N’exagérons rien. Si c'est vrai qu'elle n’a pas trouvé l’astuce imparable pour convaincre par elle-même, la vice-présidente finira par fédérer les âmes effrayées par l’ogre orange.
Sa campagne, quasi exclusivement braquée contre le «fasciste assoiffé de vengeance», aura eu le mérite d’assumer une réalité politique tristement à la mode: contentons-nous d’être agréablement déçus. Quatre ans de faux plat, c’est souvent moins long qu’une descente aux enfers.
Le républicain a peur, mais concentre tous ses efforts à persuader ses apôtres du contraire. Contre-intuitif? Machiavélique. Le milliardaire les prépare à sa défaite, en faisant pousser en eux un terrible sentiment d’injustice. Aujourd’hui, mardi 5 novembre, ce moment est arrivé. Rien n’est plus dangereux qu’un desperado humilié sous le goudron et les plumes. Le pays va trembler et la violence promet d’être dans tous ses États.
Et si c’était justement le prix à payer pour hisser, au passage, une première femme sur le toit de la plus grande puissance mondiale? Sur un malentendu et dans un contexte explosif, ça peut marcher.
Une fois n’est pas coutume, faisons confiance à ces bouffeurs de chicken & waffles et arrêtons les âneries. Car beaucoup d’Américains sont conscients que le statu quo promis par Kamala Harris paraîtra moins ridicule lorsque le chaos sera éteint.