Le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche? Pour certains, c'est un peu comme si quelqu'un venait de rebrancher la prise pour réveiller les plus bruyants de la manosphère américaine.
Depuis l’annonce de sa victoire, des figures de l’alt-right, des masculinistes, et autres partisans d’une Amérique blanche et patriarcale semblent avoir retrouvé une énergie nouvelle, fiers d’étaler leur misogynie sans filtre.
Nick Fuentes est l’un des porte-voix les plus notoires de ce mouvement. Qui est-ce? Un influenceur extrémiste, omniprésent sur les réseaux et infatigable défenseur d’une vision rétrograde de la société. Pour fêter le retour de son héros au pouvoir, il s’est récemment approprié le slogan féministe «My body, my choice», qui soutient le droit des femmes à disposer de leur corps, en le détournant de façon sinistre:
Your body, my choice. Forever.
— Nicholas J. Fuentes (@NickJFuentes) November 6, 2024
Le charmant message, balancé le soir de l’élection, a déclenché une vague de harcèlement misogyne, invitant ses partisans à «rétablir» la domination masculine et à remettre les femmes «à leur place». Bonne ambiance.
Les réseaux sociaux comme TikTok et X dégoulinent de commentaires de supporters galvanisés, remontés à bloc depuis la réélection de Trump. Des hommes qui lancent des discours de haine et des appels à revenir sur des décennies de droits des femmes.
Ce coin sombre d’internet, surnommé la «manosphère», accueille depuis des années ces hommes blessés dans leur virilité par les avancées sociales. Mais le retour de Trump semble avoir donné un feu vert à cette rage, comme une sorte de validation à ces masculinistes qui ne se cachent même plus. Des influenceurs comme Andrew Tate, déjà célèbres pour leur rhétorique anti-féministe, applaudissent en chœur et encouragent une régression ouverte et assumée.
Il est utile de rappeler que Donald Trump lui-même n’est pas franchement un modèle en matière de respect envers les femmes. L’homme est connu pour ses déclarations crues, dont l’inoubliable «grab them by the pussy» («attrapez-les par la chatte»).
Ses déboires juridiques viennent d'ailleurs renforcer ce tableau peu flatteur, comme l’affaire Stormy Daniels. Cette ancienne actrice porno affirme que Trump lui a versé 130 000 dollars juste avant l’élection de 2016 pour acheter son silence sur une liaison qu’ils auraient eue. Une transaction qui a donné lieu à une série de poursuites et abouti, en mars 2023, à une inculpation historique: il s'agit du premier cas où un ancien président américain a été inculpé pénalement.
En mai de la même année, il a été reconnu responsable d'abus sexuels et de diffamation contre E. Jean Carroll, une ancienne journaliste qui l'accusait de l'avoir agressée dans les années 90.
Condamné à lui verser 5 millions de dollars de dommages et intérêts, il a ensuite multiplié les attaques contre elle, notamment sur son propre réseau, Social Truth, ce qui a mené à une nouvelle action en justice. En janvier 2024, Trump a perdu son appel pour obtenir l'annulation de cette condamnation.
Des affaires qui viennent ainsi «légitimer» la virulence des masculinistes. Et les retombées de cette résurgence de l’extrême droite misogyne vont bien au-delà des mots et des slogans. En détournant «My body, my choice», Nick Fuentes et ses camarades révèlent leur projet: défaire les droits reproductifs et remettre en cause la liberté des femmes à disposer de leur corps.
@famousblonde the reality of being a survivor today
♬ original sound - danyscrown 🐉
Dans ce climat de tension, les droits des femmes semblent de nouveau en première ligne, attaqués par une frange de la population qui se sent désormais encouragée par le retour de Trump. Certaines assurent, toujours sur les réseaux sociaux, faire face à des menaces. C'est ce qu'a déclaré par exemple la créatrice de contenu Camila Guadarrama:
Face à cette montée d'hostilité, la résistance se fait entendre: des femmes, mais aussi des hommes, organisent déjà des campagnes sur les réseaux pour contrer cette vague de misogynie et rappeler que ces droits durement acquis ne sont pas à marchander.
Pour l'heure, le terrain de cette nouvelle bataille idéologique est posé. Et il risque fort de secouer les Etats-Unis pour la prochaine législature de Donald Trump.