Le Rwanda, accusé de soutenir les rebelles M23 dans l'est de la RDC, dénonce «des actes de cannibalisme» de «milices génocidaires» contre les Tutsis congolais. Mercredi au Conseil des droits de l'homme de l'ONU à Genève, il a aussi mis en cause le Burundi.
De nombreux acteurs, dont le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, redoutent une guerre régionale, alors que le M23 avance dans l'Est de la République démocratique du Congo (RDC). Estimant que l'«idéologie génocidaire» fait son retour contre les Tutsis, le chef de la diplomatie rwandaise Olivier Nduhungirehe a ciblé et avancé des «discours de haine, des persécutions, des lynchages et même des actes de cannibalisme».
Ceux-ci sont «devenus tristement fréquents», a-t-il dit, mettant en cause des milices hutus rwandaises opérant depuis la RDC et parlant de «menace existentielle» à laquelle il associe des reproches contre le président congolais Félix Tshisekedi. Un officier de l'armée congolaise d'origine rwandaise a été lynché et tout est connu publiquement, a-t-il dit aux correspondants accrédités à l'ONU à Genève (ACANU), s'en remettant aux réseaux sociaux.
Et le ministre de dénoncer des crimes contre l'humanité soutenus par les autorités congolaises qu'il accuse d'une politique de «violations systématiques» dans tout le pays. Il reproche aussi Tshisekedi d'avoir exclu le M23 du dialogue et d'avoir «saboté» les discussions en faisant venir une force régionale et des mercenaires. Celui-ci n'est pas prêt au dialogue, ajoute Olivier Nduhungirehe.
Au Sud-Kivu, les Tutsis «sont bombardés» et «font face à des persécutions sans précédent», insiste-t-il, demandant au Conseil des droits de l'homme de mettre un terme à cette situation.
Le ministre met aussi en cause le Burundi, où des dizaines de milliers de Congolais ont fui ces dernières semaines. Il affirme que des Tutsis sont encerclés et emmenés dans des sites inconnus.
Lundi, la Première ministre congolaise Judith Suminwa Tuluka avait dit à Genève que plus de 7000 personnes ont été tuées depuis début janvier dans l'est de la RDC, dont des milliers ont été enterrées sans être identifiées. Environ 3000 d'entre elles sont décédées à Goma, reprise en janvier par les M23. Des centaines de milliers d'individus ont fui les affrontements.
L'ONU a aussi dénoncé des cas de violences sexuelles par le M23 dans des prisons. De la «désinformation», selon le ministre rwandais qui reproche aussi à l'armée congolaise d'avoir armé des enfants à Bukavu qui ont été, selon les Nations Unies, exécutés sommairement.
Il rejette tout «massacre» des M23 à Goma. De même que les accusations congolaises contre son pays selon lesquelles Kigali veut contrôler les minerais et les territoires de l'Est de la RDC. «Le Rwanda n'a pas de revendication territoriale en RDC», a insisté le ministre. Alors que Washington et Londres ont décidé de sanctions ces derniers jours, il ajoute que celles-ci «ne sont pas la préoccupation actuelle» et n'empêcheront pas les autorités rwandaises de «protéger sa population».
Le ministre rwandais balaise aussi le scénario d'une guerre régionale, après les formats décidés récemment par les dirigeants d'Afrique australe et de l'Est. «Il y a un cessez-le-feu dans les faits», dit-il.
Il ajoute, tout en rejetant toute médiation internationale:
Trois facilitateurs ont été nommés. Les sanctions «affectent» le dialogue, selon le ministre. Lundi, Olivier Nduhungirehe avait rencontré à Genève le conseiller fédéral Ignazio Cassis. «Il n'a pas offert de bons offices. Il soutient le processus régional», a-t-il dit, appelant la communauté internationale à elle aussi appuyer ce dispositif africain. (ats/svp)