A l'occasion d'un sommet militaire organisé près de Moscou, le chef du Kremlin, Vladimir Poutine, a déclaré que la Russie avait des «partenaires sur de nombreux continents», en faisant référence aux représentants des 70 pays invités au sommet, selon les chiffres officiels. Mais qui sont-ils?
Peu de temps après le début de l'invasion de l'Ukraine, l'Assemblée générale de l'Organisation des Nations unies (ONU) a demandé à la Russie de se retirer immédiatement de l'Ukraine en condamnant la guerre d'agression. 141 pays ont voté pour la résolution, 35 ont voté blanc – ils se considèrent comme neutres. Douze n'ont pas voté du tout – généralement pour des raisons de forte dépendance vis-à-vis de la Russie (par exemple le Turkménistan et le Venezuela).
Mais quatre pays ont explicitement voté en défaveur de cette condamnation. Les «amis» de Poutine semblent donc se tenir les coudes, même dans les moments difficiles. La Biélorussie, par exemple, a d'ailleurs voté contre la résolution de l'ONU. Sur le plan économique et politique, le pays dirigé par Alexandre Loukachenko est entièrement dépendant du régime du Kremlin. Et, ce, notamment depuis que le dictateur a brutalement réprimé un mouvement de protestation dans le pays en août 2020 – avec l'aide de son voisin russe.
Loukachenko a même permis à Poutine de stationner des troupes dans son pays et d'envahir l'Ukraine à partir de ce dernier. Peu avant le début de l'invasion, les deux pays ont organisé un exercice militaire commun et pendant l'attaque de Kiev, des soldats russes blessés ont été soignés en Biélorussie. De plus, des missiles sont régulièrement tirés sur l'Ukraine depuis la Biélorussie. Loukachenko semble profiter de la guerre en Ukraine, car il ne cesse de parvenir à ne pas impliquer directement son pays. Il peut ainsi se présenter à son peuple comme un garant de la paix.
La Syrie a également voté contre une condamnation de la Russie lors de l'Assemblée générale de l'ONU. Rien d'étonnant à cela: le dirigeant syrien Bachar el-Assad et Poutine sont de proches amis. Ce n'est que grâce à l'intervention russe dans la guerre civile syrienne à partir de 2015 qu'Assad a pu conserver le pouvoir. Avec le soutien de la Russie, il a aujourd'hui repris le contrôle de la majeure partie de son pays.
Pour la Russie, la stabilité de la Syrie est tout à fait pertinente pour son accès à la Méditerranée. La marine russe dispose même d'une base dans le pays, à Tartous. Selon des rapports, des mercenaires syriens se battent, en outre, du côté des agresseurs russes en Ukraine.
L'Erythrée s'est également opposée à une condamnation de la Russie. Le pays est largement isolé sur la scène internationale, mais en raison de sa localisation dans la Corne de l'Afrique, l'Erythrée est géopolitiquement intéressante pour la Russie. Le dirigeant autocratique Isayas Afewerki n'est évidemment pas hostile à un bailleur de fonds, puisque le pays fait également l'objet de sanctions de l'UE.
La Corée du Nord est le quatrième Etat du groupe à avoir voté contre la résolution de l'ONU en mars. Ce n'est guère surprenant, car la Russie est l'un des rares Etats au monde à se montrer amical envers le pays communiste.
La Corée du Nord est également largement isolée sur le plan international. Au siècle passé, l'Union soviétique entretenait déjà des relations avec l'«Etat frère» communiste nord-coréen. La Russie, par ailleurs, a aidé la famille dictatoriale nord-coréenne Kim à développer son programme nucléaire.
35 pays se considèrent comme neutres dans le conflit ukrainien. L'un de ces pays est l'Iran. Cette puissance régionale du Proche-Orient a beaucoup en commun avec la Russie de Vladimir Poutine. Tous deux sont confrontés à des sanctions de la part des pays occidentaux.
Il y a quelques jours, un lanceur russe a mis en orbite un satellite iranien qui, selon les experts occidentaux, pourrait être utilisé par la Russie pour surveiller l'Ukraine. L'Iran nie le fait.
Le pays s'est montré plus ambivalent au sujet des accusations selon lesquelles l'Iran fournirait des drones de combat à la Russie. Téhéran a déclaré que le secteur de l'armement était l'un des domaines dans lesquels il coopérait avec la Russie. Il en va de même dans le secteur de l'énergie: Gazprom veut investir 40 milliards dans les champs de gaz et de pétrole iraniens au cours des prochaines années.
Mais la contrainte commune des sanctions engendre également des rivalités. Depuis que la Russie propose son pétrole à des prix fortement réduits en raison des sanctions occidentales, l'Iran a également dû baisser ses prix.
La Chine se considère également comme neutre. Le rôle du géant rouge dans le conflit semble néanmoins très ambivalent. Dès le début, Pékin a évité de critiquer l'attaque russe. Le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi a par ailleurs affirmé que l'amitié avec la Russie était «solide comme le roc».
Le chef d'Etat et du parti Xi Jinping a pour sa part reconnu l'intégrité territoriale de l'Ukraine – tout en critiquant les sanctions occidentales contre la Russie. Pékin suit ainsi sa doctrine en matière de politique étrangère, selon laquelle aucun pays ne doit se mêler des affaires intérieures d'autres Etats.
Au sein du Conseil de sécurité de l'ONU, la Chine et la Russie défendent souvent des positions similaires, généralement en opposition aux Etats-Unis. La Chine, tout comme la Russie, considère l'alliance de défense occidentale de l'Otan comme un danger. Pékin a également critiqué à plusieurs reprises les livraisons d'armes occidentales.
La position économique de la Chine vis-à-vis de la Russie est également ambivalente. La Russie a certes récemment élevé ses exportations de pétrole vers la Chine à un niveau record et est depuis longtemps un exportateur d'armes apprécié de Pékin. Mais en même temps, le groupe énergétique public chinois Sinopec a suspendu les discussions relatives à une coopération avec la Russie. En effet, l'économie chinoise est dépendante des marchés d'exportation des Etats-Unis et de l'Union européenne (UE). Pour éviter les sanctions, la Chine tente donc un numéro d'équilibriste.
Le troisième pays «neutre» devant être mentionné dans la question russe est l'Inde. Dans le conflit ukrainien, le pays insiste sur la «désescalade des tensions en tenant compte des intérêts légitimes de tous les pays en matière de sécurité». Malgré cela, l'Inde entretient des liens avec la Russie, qui repose entre autres sur une politique d'armement commune.
L'Inde est l'un des plus grands importateurs d'armes au monde – et la Russie est son principal fournisseur. Le pays continue également d'acheter du pétrole à prix réduit à la Russie. L'Inde – tout comme les autres pays partenaires des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) – s'oppose fermement aux sanctions contre les agresseurs russes. Et ce, malgré tous les efforts diplomatiques de l'Occident pour inciter le deuxième pays le plus peuplé de la planète à changer sa position. (bzbasel.ch)