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L'attentat contre le Kremlin aurait été organisé par la Russie

Le moment de l'explosion, qui a produit des «images spectaculaires et bien filmées».
Le moment de l'explosion, qui a produit des «images spectaculaires et bien filmées».capture d'écran

L'attentat contre le Kremlin aurait été «organisé par la Russie»

Deux drones ont explosé à quelques mètres du Kremlin, dans la nuit de mercredi à jeudi. Moscou accuse l'Ukraine et parle d'un «acte terroriste», mais plusieurs éléments suspects indiquent qu'il s'agit d'une mise en scène.
04.05.2023, 12:0105.05.2023, 14:26
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Dans la nuit de mardi à mercredi, la Russie a affirmé avoir abattu deux drones avant qu'ils s'écrasent contre le Kremlin, à Moscou. Une vidéo partagée par les médias russes montre notamment un engin exploser peu avant d'atteindre la coupole du palais du Sénat.

Pour la Russie, cela ne fait aucun doute. Dans la journée de mercredi, le Kremlin a dénoncé une «tentative d'assassinat» de Vladimir Poutine et a accusé l'Ukraine d'avoir organisé cet «acte terroriste». Kiev a aussitôt nié. Zelensky a affirmé que son pays «mène une guerre exclusivement défensive» et «n'attaque pas le territoire russe».

Vidéo: watson

Ce n'est pas la première fois que l'Ukraine est soupçonnée de mener des attaques de drones sur le territoire russe. Certaines de ces opérations, que Kiev n'a jamais revendiquées ni infirmées, ont frappé des cibles très éloignées des frontières ukrainiennes. Cette fois-ci, pourtant, ce serait différent. Les autorités ukrainiennes n'auraient rien à voir avec les explosions qui ont frôlé le Kremlin. C'est ce que pense le centre de réflexion «Institute for the Study of War» (ISW), qui écrit:

«La Russie a probablement organisé cette attaque»
L'ISW

Selon l'ISW, plusieurs indices suggèrent que l'attaque a été menée en interne et volontairement mise en scène. Les voici.

Plusieurs éléments suspects...

Tout d'abord, les autorités russes ont récemment renforcé la défense aérienne nationale, y compris à Moscou, où plusieurs systèmes de missiles ont été déployés. Il est donc «extrêmement improbable» que deux drones aient pu passer à travers plusieurs couches de défense aérienne pour être abattus juste au-dessus du Kremlin.

L'ISW fait également remarquer que l'explosion des drones a fourni des «images spectaculaires et bien filmées». La scène est en effet parfaitement cadrée, la caméra ne tremble pas, la qualité de l'image est très bonne, et la personne qui a filmait ne semble pas particulièrement troublée par ce qui vient de se produire: exactement l'inverse des vidéos documentant d'autres explosions, comme celles qui avaient secoué la Crimée annexée en octobre de l'année passée.

Concernant les images du crash, l'Associated Press fait remarquer que les vidéos ne sont apparues qu'après la réponse du Kremlin, intervenue quelque 12 heures après les faits. Aucune réaction liée aux explosions n'a non plus été signalée sur les applications de messagerie avant l'annonce officielle.

Autre élément suspect, la réaction «cohérente et coordonnée» du Kremlin après les explosions. Si l'attaque n'avait pas été mise en scène, elle aurait été une vraie surprise pour les autorités russes, pour les raisons évoquées plus haut. Dans ce cas, la réaction officielle aurait probablement été désorganisée, «les responsables s'efforçant de produire un récit cohérent pour compenser les implications rhétoriques d'un tel embarras», note l'ISW. Après le retrait de ses troupes de la ville de Kherson, illustre le think tank, «le Kremlin a échoué à produire une réponse informative cohérente et opportune».

Après la soi-disant attaque de mercredi, c'est l'inverse qui s'est produit:

«Le Kremlin a immédiatement accusé l'Ukraine d'avoir mené une attaque terroriste, et les réponses officielles russes se sont rapidement regroupées autour de cette accusation»
L'ISW

... et des objectifs politiques

En réagissant rapidement et de manière compacte, les autorités russes ont probablement cherché à faire en sorte que «les effets politiques recherchés l'emportent sur l'embarras», indique encore l'ISW.

Les effets politiques, justement. Pour quelle raison Moscou aurait décidé de mettre en scène une attaque potentiellement embarrassante? Selon l'ISW, cette opération fait partie d'une stratégie plus large, visant à présenter la guerre en Ukraine comme une menace existentielle pour la population russe, dans l'objectif de «préparer une mobilisation plus large de la société».

En mettant en scène une attaque au coeur même de Moscou, le Kremlin chercherait à «ramener la guerre à la maison», selon l'ISW. Le fait que l'incident se soit produit à quelques jours de la fête du 9 mai, le jour de la Victoire en Russie, renforce ce soupçon, ajoute encore le centre de réflexion américain. Le pouvoir russe pourrait également exploiter cet événement pour limiter ou annuler les célébrations du 9 mai, dont le traditionnel défilé militaire sur la Place Rouge. Une autre mesure qui permettrait de montrer la guerre en Ukraine sous un angle menaçant.

Plus généralement, il semblerait que la Russie soit en train de modifier son récit concernant le conflit en Ukraine. Après avoir tenté de l'invisibiliser, Moscou met de plus en plus l'accent sur la menace incarnée par l'Ukraine et l'Otan, se montrant ainsi comme une nation résistant à la puissance et à l'agressivité de l'Occident.

Selon une récente enquête du média d'opposition russe Meduza, le Kremlin a conseillé aux médias d'Etat d'insister sur la puissance militaire des adversaires et de «ne pas sous-estimer la contre-offensive annoncée de l'Ukraine avec le soutien de l'Otan». Ce faisant, il est toujours possible de présenter les agissements militaires russes comme des réussites.

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