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Une «tromperie éhontée»: comment la Russie recrute ses soldats

Recrutement honteux Russie
Moscou utiliserait une méthode pernicieuse afin de garnir les rangs de son armée.Image: Keystone/imago

La Russie utiliserait cette «ruse honteuse» pour piéger ses recrues

Moscou attirerait de nouvelles recrues par le biais d'offres d'emploi malhonnêtes. Les enrôlés trompés pensaient en effet postuler pour un job très différent.
02.06.2025, 05:2902.06.2025, 05:29
Julian Alexander Fischer / t-online
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Ils postulent en tant qu'ouvriers du bâtiment, ingénieurs ou chauffeurs et ils se retrouvent sur le front en Ukraine. Le ministère russe de la Défense adopte visiblement de nouvelles méthodes discutables pour recruter des soldats. Il tromperait sciemment les candidats afin de renouveler ses effectifs.

Les offres d'emploi ne mentionnent pas que des missions sur le champ de bataille sont également possibles, rapporte Verstka, un média russe en exil. Les annonces fallacieuses sont apparues ces dernières semaines sur de nombreuses plates-formes, notamment sur Avito.

Un travail dans dans «l'arrière-pays»

Si on mentionne clairement l'armée comme employeur, le domaine d'intervention reste lui délibérément flou. Le Kremlin évoque simplement la possibilité de servir dans l'arrière-pays, comme chauffeur pour l'aide humanitaire, constructeur de fortifications ou gardien de «nouveaux territoires».

Selon l'annonce, les futures recrues intégreront des troupes spéciales de l'arrière-pays ou du génie. On présente par exemple un ouvrier du bâtiment comme «un soldat responsable de la construction, du renforcement et de la réparation des installations qui garantissent la capacité de combat de l'armée». Toujours selon l'annonce, il s'agirait de:

«L'une des spécialités les plus importantes et les plus prestigieuses, indispensable à toute opération de défense ou d'attaque»

Un collaborateur de l'administration moscovite explique à Verstka qu'il existe un quota pour chaque spécialité. Si ce quota est atteint, le responsable du recrutement donne alors l'ordre de former le candidat dans un autre domaine où les effectifs manquent. Une information niée par une source officielle interrogée par le médi russe:

«Ce ne sont que des on-dit. Quel quota, quels ordres?»

Annonces aux allures de «ruse honteuse»

Ainsi, Verstka rapporte le cas d'un chauffeur qui a postulé à une offre d'emploi, puis a été convoqué dans un bureau douteux de la capitale pour signer un contrat d'un an. On l'a finalement conduit au centre de recrutement militaire de la rue Yablotchkova, au nord de la ville, comme de nombreux autres.

Un employé d'une agence de recrutement qui diffuse les annonces pour le ministère de la Défense raconte qu'il n'est pas possible de garantir une affectation dans le domaine souhaité.

«Cela ne dépend pas de nous, et surtout pas de moi. Différentes personnes vous promettent que vous serez chauffeur et que vous irez ici ou là, mais tout ne se déroule pas toujours comme prévu ensuite. Tout cela n'est qu'une ruse honteuse pour attirer plus de monde.»
«En vérité, ce sont les commandants des unités qui ont le dernier mot. Et si vous êtes affecté comme tireur d'élite, vous n'irez nulle part ailleurs»

Un schéma clair se dessine

Une autre source se confie aussi:

«Je vous le dis très honnêtement: si on vous emmène sur le terrain d'entraînement, vous finissez généralement là où le commandant le veut.»

Même le contrat d'un an relèverait de la supercherie. Il pourrait en effet être prolongé de manière indéterminée, soit jusqu'à la fin de la mobilisation russe. Ces détails pernicieux prennent de court les futurs soldats au moment de la signature. Selon Verstka, presque personne ne ferait machine arrière, ou n'y serait autorisé.

L'un des responsables du recrutement décrit le candidat type:

«L'image typique est celle d'un provincial, naïf, ignorant, inconscient et qui n'a jamais servi auparavant»

La plupart du temps, ils arrivent dans la capitale depuis des petites villes. Les agences leur paient le voyage et insistent jusqu'à ce qu'ils acceptent.

Lancement d'une nouvelle campagne

Ce stratagème ferait partie d'une récente et gigantesque opération d'enrôlement. La publicité pour les contrats militaires s'est à nouveau intensifiée dans les rues moscovites, à grands coups d'affiches et des flyers distribués en porte-à-porte. Le nombre de messages sur Telegram a, lui aussi, explosé depuis mars.

Poutine lui-même avait affirmé que le Kremlin recrutait 60 000 soldats par mois, soit deux fois plus que l'Ukraine. Impossible cependant de vérifier ces chiffres de manière indépendante. En plus de ces annonces déguisées, la Russie miserait aussi sur des primes élevées pour attirer du sang neuf. Selon l'expert Janis Kluge:

«Le Kremlin attribuerait des valeurs cibles par régions. Cela exerce une pression sur les gouverneurs, qui la répercutent en partie sur les communes et les entreprises. Chacun essaie donc de remplir son quota. Et là où il s'avère plus difficile de recruter, les bonus augmentent.»

Dans la majorité des cas, cela représente plus d'un million de roubles, soit l'équivalent de plus de 11 000 euros.

«Et il ne s'agit là que de la prime de recrutement. À laquelle il faut ajouter les salaires courants. Poutine doit donc débourser toujours plus pour trouver des soldats pour sa guerre.»
Janis Kluge

(Adaptation en français: Valentine Zenker)

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