On le surnomme «l'Espagnol». Stanislav Orlov est l'un des leaders du groupe d'ultras «Red Blue Warriors» qui soutient le CSKA Moscou. Mais depuis quelques mois, c'est dans les tranchées boueuses de la guerre en Ukraine que ce Moscovite de 42 ans se fait un nom.
L'homme s'est illustré à la tête du groupe l'«Hispaniola», une milice réunissant des fans de football qui ont décidé d'abandonner les stades pour rejoindre la première ligne de l'offensive russe.
«Les fans les plus inconciliables se sont unis au nom d'un objectif commun», affirme-t-il, avant de rappeler que les signes distinctifs des différentes équipes ne sont pas admis, pour ne pas nourrir une rivalité et former «une puissante équipe russe».
Orlov n'est pas à sa première guerre. En 1999 déjà, il faisait partie de la 106e division aéroportée, dans les combats durant la Seconde guerre de Tchétchénie. Il répondait aussi présent en 2014, pour combattre dans le Donbass.
Pas rassasié par les horreurs vécues, ce Moscovite âgé de 42 ans a remis le couvert sur le front en 2022, lors du déclenchement de la guerre en Ukraine. C'est même le créateur du bataillon «Hispaniola», qui regroupe des hooligans radicaux, et fondé en 2022.
Ce groupe de combattants, aperçu lors de la bataille d'Azovstoval, se trouve désormais dans les régions de Zaporijjia et de Kherson. Les hommes d'Orlov seraient également en train de combattre dans la petite ville de Vouhledar dans l'oblast de Donetsk, où se déroule une bataille féroce.
En première ligne, les hommes d'Orlov charpentent une unité militaire privée, composée de trois sections bien définies:
L'«Hispaniola» est une unité de reconnaissance, bien organisée, avec des éclaireurs, des tireurs d'élite, des médecins de combat, des communicateurs, des soldats au sol, des opérateurs de drone. Les postes sont occupés par une grande part d'ultras de clubs russes de football, ces clans de supporters homophobes, racistes et violents.
Outre le CSKA, d'autres supporters radicaux proviennent du Dynamo, Spartak (réputés dangereux), Lokomotiv, Torpedo, Zenit St. Petersburg, Ural Yekaterinburg, Yaroslavl Shinnik, Oryol, Rostov, Nizhny Novgorod, Krasnodar Kuban et Ramenskiy Saturn. Des ultras ukrainiens renforcent aussi les pro-russes, comme ceux du Shakhtar Donetsk, Marioupol ou encore le Tavria Simferopol.
Des grappes de fans au sang chaud qui comptent même d'anciens joueurs pros, comme Andrey Solomatin, ancien international à treize reprises avec l'équipe russe. Le retraité des pelouses avait pris part à l'aventure de la «Sbornaïa» au Mondial 2002 en Corée du Sud et au Japon.
Stanislav Orlov prétend même que son unité est financée par des fans de foot, ainsi que certains clubs de football, tels que le Chinnik Iaroslavl (club végétant en deuxième division russe) et Khimki. Il affirme d'ailleurs qu'il est prêt à lever, selon ses dires:
Il loue d'ailleurs ces jeunes hommes qui, selon lui, sont d'excellents éléments grâce à leur expérience «dans les combats de rue». Mais les fadas de football et les hommes ne sont pas les seuls à rejoindre les rangs: les femmes aussi, selon leurs réseaux sociaux, sont admises, mais uniquement en tant que snipers.
Orlov cite volontiers comme exemple une figure incontournable des années Milošević: Željko Ražnatović, surnommé «Arkan», chef du groupe paramilitaire appelé «Garde volontaire serbe» ou, alternativement, «Les Tigres d’Arkan». Il coiffait aussi la casquette de président du club des supporters de l’équipe Red Star de Belgrade.
Le Moscovite souligne les accents pro-russes des Serbes, entrevus dans les communautés et beaucoup plus marqués que chez les Russes. Il dit:
Très actif pour propager la propagande russe, et un patriotisme renforcé depuis la guerre dans le Donbass, Orlov décrit également le travail en amont, et envoie ses hommes s'entraîner aux combats dans les forêts de la périphérie de Moscou:
L'unité «Hispaniola» compterait près de 550 hommes, dont 100 opérateurs de drones kamikazes utilisés pour fragiliser les forces ukrainiennes. Les fans de foot sont cette fois-ci sur le terrain et non dans les gradins.