Aucune amélioration n'est à l'horizon dans le conflit des gangs suédois, bien au contraire. Ces derniers jours, des familles ont été victimes à deux reprises d'attaques à l'arme à feu. Au sud de Stockholm, les auteurs ont attaqué une maison familiale, tuant le père de deux enfants et blessant grièvement la mère.
Selon les premières investigations, la famille était une «fausse cible». En effet, elle porte en effet le même nom de famille qu'un membre de la bande du quartier, mais n'a rien à voir avec le gang criminel. Selon la police, ces attaques erronées se multiplient, car ce sont de jeunes délinquants inexpérimentés qui reçoivent les ordres de meurtres.
Dans un deuxième cas, une jeune fille de 15 ans et une femme de 60 ans ont été abattues. Des adolescents ont pénétré de nuit dans une maison et ont ouvert le feu sur la jeune fille et sa grand-mère qui dormait sur le canapé. La maison appartient à un homme dont le frère fait partie d'un gang, mais aucune des victimes n'a jamais été impliquée dans des activités criminelles.
La police pense que ces agressions font partie d'une stratégie brutale de bandes rivales: elles s'attaquent aux proches innocents afin de propager la peur.
Parallèlement, des experts de la police tirent la sonnette d'alarme sur un autre problème: «Les fonds publics ne doivent pas aller à des criminels qui achètent ensuite des voitures de luxe, des hélicoptères ou des villas», a déclaré Sara Persson, du département de la criminalité économique, dans une interview. Pourtant, certains signes montrent que les membres des gangs ne s'en mettent pas seulement plein les poches grâce à la drogue, mais s'enrichissent aussi en fraudant les impôts et l'aide sociale, et en commettant d'autres formes de criminalité économique.
Il est particulièrement effrayant de constater que les criminels s'installent dans des institutions sociales, des foyers pour enfants ou des entreprises médicales, dans le but de détourner des fonds.
Selon les enquêteurs, la situation peut être comparée à des structures mafieuses, car il y a des conseillers fiscaux, des employés de banque et même des employés publics qui aident les criminels. D'après Sara Persson, ce type de criminalité frauduleuse est aussi fréquent que les attaques violentes des gangs, mais beaucoup moins visibles.
L'une des arnaques les plus répandues est celle des prestataires dans le domaine social ou de la santé qui se font payer par les pouvoirs publics des prestations externalisées à des privés, sans toutefois les fournir. Les contrôles des autorités sont la plupart du temps totalement insuffisants, selon Sara Persson.
Déjà pendant le Covid, plusieurs centres de test ont été dénoncés pour avoir délivré de faux tests et certificats. D'autres cas font état de cabinets médicaux douteux qui facturent à la caisse nationale d'assurance maladie des examens qui n'ont jamais été effectués.
Souvent, ils siègent à la direction de l'entreprise, détournent parfois des fonds par le biais d'hommes de paille – et finissent par mettre l'entreprise sur la paille.
Dans la ville de Södertälje, un procès est actuellement en cours contre un membre d'un gang qui, par le biais d'une entreprise, procurait des places dans des familles à des enfants en situation compliquée – un service que la ville rémunérait grassement. L'accusé a ensuite détourné plus de deux millions de francs d'impôts sur le revenu.
La police a également enquêté sur des entreprises qui géraient des logements pour réfugiés ou sur une organisation qui voulait protéger les enfants de tomber dans le banditisme.
Les avocats qui travaillent pour des gangs posent également problème. Au cours des dernières années, au moins une demi-douzaine d'avocats de la défense se sont vu retirer leur licence pour avoir, entre autres, divulgué des secrets d'enquête à des membres de gangs, permis à ces derniers de communiquer de manière interdite depuis la prison ou même pris en charge des transports d'armes.
Pour venir à bout des structures mafieuses, les enquêteurs demandent une collaboration plus étroite entre les différents services publics. Il ne faut pas seulement une police et un parquet spécialisés dans la criminalité économique, mais aussi des autorités sanitaires avec plus de compétences. Les experts ne voient toutefois pas de solutions rapides – pas plus que contre les meurtres.
Traduit et adapté de l'allemand par Tanja Maeder