C'est le journal finlandais Iltalehti qui a commencé par publier une caricature de Recep Tayyip Erdogan. Le président turc y apparaît nu et hurle avec rage «130, 200 terroristes». Pour finir, il se transforme en chien et jappe «500 terroristes».
Ville Rannan 17.1.2023 Erdogan pilapiirros Turkin median hampaissa. "Jutuissa menevät välillä nimet ja faktat sekaisin, ja suuttumus on kovaa." Että jaksavat vouhkata. 🥱https://t.co/rnGteAlNl3 pic.twitter.com/MSOlmGWuLk
— Päivi Korpivaara 🇫🇮 🇺🇦 (@PaiviKorpivaara) January 20, 2023
Cette caricature fait allusion aux exigences qu'Erdogan a émises envers la Suède et la Finlande pour qu'il accepte l'adhésion de ces pays du Nord à l'Otan. Et c'est des exigences qu'il ne cesse de renouveler: mercredi, il a de nouveau déclaré que les deux Etats ne pourraient rejoindre l'Otan qu'à condition de livrer un grand nombre de prétendus «terroristes» kurdes.
Avant cela, Erdogan avait déjà fait barrage à la Suède après qu'un petit groupe d'extrême droite a brûlé un Coran devant l'ambassade turque à Stockholm le week-end dernier. Cette «manifestation» avait été autorisée en invoquant la liberté d'expression – Ankara l'a qualifiée de «crime haineux».
«Par cette caricature, nous voulons rappeler que nous devons protéger la liberté d'expression», a expliqué le rédacteur en chef d'Iltalehti, Perttu Kauppinen. En même temps, il est clair qu'Erdogan est susceptible. Il avait déjà réagi très vivement face aux dessins satiriques dans les médias occidentaux, comme dans le magazine Charlie Hebdo.
Le journal suédois de gauche Flamman a suivi l'exemple finlandais, notamment dans le but de déclencher un débat sur la question de savoir si et dans quelle mesure la Suède doit se soumettre aux souhaits d'Erdogan. Le journal a tout d'abord organisé un concours, puis a récompensé l'un des 400 dessins reçus par un prix de 1000 euros et a publié 16 autres images «qui se moquent d'Erdogan».
Celles-ci vont du subtil au grossier, montrant le président nu chevauchant le premier ministre suédois, Ulf Kristersson, et l'attirant avec une bombe de l'Otan. Une avec le président turc qui utilise un drapeau suédois comme papier toilette, ou encore en vampire, à qui un petit Kristersson apporte docilement des seaux pleins de sang kurde, et pour finir ces deux hommes en cuir, le Suédois tenu en laisse tandis que le Turc brandit un fouet.
Karikatür yarışmasından diğer karikatürler bunlar kafayı yemiş yunan şizoların Türkiye ve Erdoğan diye diye yatıp kalkmasını anlıyoruz da artık bu şizoluk dünyaya yayılmış vaziyette hastalık bu ''Erdoğan tramvası'' https://t.co/lfdaILLLUh pic.twitter.com/oj6SVLpqL8
— Candy (@AftieL86) January 26, 2023
Peu importe la façon dont vous abordez la question de l'Otan, a écrit le rédacteur en chef de Flamman, Leonidas Aretakis, les autocrates n'ont pas le droit de s'immiscer dans la politique suédoise. Plusieurs publications suédoises et finlandaises ont annoncé qu'elles imprimeraient également certaines des caricatures pour «défendre la liberté d'expression».
Des réactions amères de la Turquie ont suivi tout aussi rapidement. «Les scandales en Suède ne s'arrêtent jamais», a écrit Sabah, un journal fidèle au régime d'Erdogan. Le ministre turc des Affaires étrangères a de son côté déclaré, jeudi, qu'il était inutile de poursuivre les négociations au sujet de l'Otan, du moins pour le moment. Il a cité le Coran brûlé pour expliquer cette situation:
Le gouvernement suédois subit désormais d'énormes pressions. Ulf Kristersson a certes déclaré que les négociations avaient été reportées et non interrompues, mais il a également mis en garde contre de graves conséquences en cas de retard de l'adhésion à l'Otan:
Le chef du gouvernement – sans pour autant préciser quel était, selon lui, le principal problème. Auparavant, Kristersson avait défendu la liberté d'expression comme étant fondamentale pour la démocratie, mais avait aussi qualifié de «profondément irrespectueux» le fait de brûler des livres sacrés.
Les problèmes pour la Suède pourraient bientôt s'aggraver. Des protestations à son encontre ont eu lieu, non seulement en Turquie, mais aussi dans de nombreux Etats islamiques comme l'Irak, l'Arabie saoudite ou la Jordanie. L'influente université Al-Azhar au Caire a appelé à un boycott des entreprises suédoises. Le correspondant au Proche-Orient de la télévision suédoise SVT, la situation pourrait dégénérer lors de la prière du vendredi si des prédicateurs radicaux jetaient davantage d'huile sur le feu avec des slogans anti-occidentaux. (aargauerzeitung.ch)