Cela fait maintenant cinq semaines que l'Ukraine a lancé sa contre-offensive. Ceux qui s'attendaient à des avancées fulgurantes sont restés sur leur faim. Kiev n'a pas répété l'exploit réalisé l'automne dernier, quand ses troupes ont libéré de larges portions de territoire occupé dans le nord-est du pays.
Bien que les responsables ukrainiens et plusieurs analystes aient affirmé à plusieurs reprises que les conditions actuelles sont radicalement différentes, l'opération de Kiev a été accueillie avec une certaine déception jusqu'à présent. «La contre-offensive n'a pas répondu aux attentes», titrait assez sèchement CNN la semaine dernière, à l'image d'autres importants médias américains. Le Wall Street Journal décrit des troupes à court d'armes et d'effectifs, se battant contre un ennemi profondément retranché.
Moscou profite bien évidemment de la situation pour présenter l'attaque ukrainienne comme un échec retentissant. Le ministre russe de la Défense a affirmé lundi que Kiev avait perdu 26 000 soldats et 1244 blindés depuis le début de la contre-offensive, le 4 juin. Il s'agit d'estimations «très exagérées», selon le centre de réflexion américain «Institute for the Study of War» (ISW), qui rappelle que même des blogueurs pro-Kremlin ont mis ces bilans en discussion.
Selon l'ISW, la «lenteur» des opérations reflète une décision délibérée, une stratégie asymétrique consistant à épuiser progressivement l'ennemi. Cela permettrait aux forces de Kiev de préserver leurs effectifs, au prix de gains territoriaux moins spectaculaires.
L'absence d'avancées retentissantes ne signifie pourtant pas que Kiev n'ait pas progressé du tout pendant les cinq dernières semaines. Des calculs formulés par l'ISW montrent plutôt l'inverse: les troupes ukrainiennes ont réalisé des gains territoriaux significatifs, notamment si on les compare à ceux réalisés par les Russes:
Autrement dit, les forces ukrainiennes ont libéré en cinq semaines environ deux tiers du territoire que les forces russes ont capturé en plus de six mois.
Ces chiffres diffèrent de ceux diffusés par l'armée ukrainienne, qui affirmait lundi avoir repris 193 km2 de territoire aux occupants russes. Cet écart s'explique par le fait que Kiev a calculé différemment son contrôle initial du terrain, explique l'ISW. Le think tank s'appuie sur ses propres données afin de mieux comparer les gains des deux belligérants.
Ce qui est sûr, c'est que l'invasion russe stagne. Selon les données élaborées par le collectif de cartographes Warmapper, la Russie contrôlait 17,5% du territoire ukrainien à la fin du mois de juin, un pourcentage qui n'a pratiquement plus bougé depuis novembre dernier.
(asi)