Longuement préparée et annoncée, la contre-offensive ukrainienne dans le sud du pays a été lancée, lundi dernier, 29 août. Dans le viseur des troupes de Kiev, la ville stratégique de Kherson, tombée aux mains des Russes au début du conflit.
L'objectif est de taille pour les défenseurs. «Reprendre Kherson ouvrirait aux Ukrainiens la porte de la Crimée», explique Julien Grand, rédacteur en chef adjoint de la Revue militaire suisse. «A cause de la géographie du pays, et notamment du fleuve Dniepr qui le coupe en deux, Kiev n'a aucune chance de projeter des forces vers cette péninsule si elle ne contrôle pas Kherson», ajoute-t-il.
Une semaine après le début de la bataille, où en est-on? Peu d'informations officielles circulent à ce sujet. D'habitude très bavardes, les autorités ukrainiennes tentent de garder le plus de contrôle possible sur le déroulement de l'offensive pour des raisons stratégiques.
Toutefois, rapporte l'Institute for the Study of War (ISW), la contre-offensive ukrainienne progresse «de manière vérifiable» dans le sud du pays. Dans la région de Kherson, les forces de Kiev «avancent le long de plusieurs axes». Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a notamment annoncé que son armée a libéré deux villages, sans spécifier lesquels.
Les responsables ukrainiens, tout comme les observations de l'ISW, indiquent que la stratégie de Kiev vise surtout à épuiser les forces russes. Les défenseurs œuvrent notamment pour priver les Russes du ravitaillement nécessaire, perturber leur commandement et affaiblir leur moral.
«Les Ukrainiens se limitent à faire de l'usure, c'est-à-dire à mener des attaques ciblées plutôt qu'une grande offensive visant de larges conquêtes territoriales», confirme Julien Grand. Et d'ajouter:
L'expert militaire rappelle qu'«il est relativement facile de stopper un adversaire; regagner le terrain perdu est par contre beaucoup plus difficile».
La situation serait donc en train de stagner. Egalement du côté russe, estime Julien Grand. «Les forces de Moscou ne sont plus dans une optique offensive et se limitent à garder le terrain», illustre-t-il. Selon l'ISW, les Russes vont probablement mener des «contre-attaques occasionnelles», tout en continuant à bombarder leurs adversaires avec l'artillerie et l'aviation.
Cette dynamique semble caractériser également le front du Donbass. L'ISW rapporte que les forces russes n'ont pas mené d'attaques terrestres vers les villes de Kharkiv (nord-est) et de Siversk (est). Elles continuent, cependant, de mener des «bombardements de routine» sur ces zones. Dans la région contestée de Donetsk, les avancées russes sont également très limitées.
Comme dans le cas de l'armée ukrainienne, cette stratégie peut fournir des indices sur l'état des forces de Moscou. «Les Russes ont probablement intérêt à avoir une pause. Les annonces de Poutine, qui veut recruter des milliers de soldats, peuvent faire penser que les troupes sur le terrain sont épuisées», commente Julien Grand.
L'ISW rappelle que le rythme de la bataille de Kherson peut «changer de façon spectaculaire d'un jour à l'autre». Il est donc encore trop tôt pour tirer un bilan, estime également Julien Grand: «A l'heure actuelle, il est difficile de savoir si cette contre-offensive peut se solder par un succès ukrainien».
La situation n'est pourtant pas très favorable pour l'armée de Kiev, conclut-il: