C'est un appel téléphonique que l'Europe aura dû attendre pendant 14 mois. Mercredi, pour la première fois depuis le début de l'invasion russe, le chef d'Etat chinois Xi Jinping s'est entretenu avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky. Ce dernier a laissé un compte-rendu sur Twitter, qualifiant l'entretien téléphonique de «significatif». Un échange qui donne «une forte impulsion au développement de nos relations bilatérales.»
I had a long and meaningful phone call with 🇨🇳 President Xi Jinping. I believe that this call, as well as the appointment of Ukraine's ambassador to China, will give a powerful impetus to the development of our bilateral relations.
— Володимир Зеленський (@ZelenskyyUa) April 26, 2023
Et côté chinois, on en pense quoi? La discussion a donné deux résultats tangibles.
Les autres points de discussion relèvent plutôt de la rhétorique symbolique: Xi Jinping a assuré qu'il s'engageait pour des pourparlers de paix rapides et qu'il ne prenait pas parti dans le conflit. Et le dirigeant de 69 ans a réitéré sa mise en garde contre une escalade nucléaire. «Il n'y a pas de vainqueur dans une guerre nucléaire», a déclaré le chef de l'Etat chinois. Il a appelé toutes les parties concernées à la «retenue».
Il n'y a pas d'inflexion fondamentale de la position chinoise, qui peut se résumer à une «neutralité prorusse». L'appareil gouvernemental chinois continue de qualifier la guerre de «crise ukrainienne» par euphémisme. Xi Jinping évite toute critique à l'égard de Poutine et renvoie uniquement aux prétendues provocations de l'Otan et aux livraisons d'armes des Etats-Unis, qui «jettent de l'huile sur le feu».
Dans quel contexte s'est déroulé l'appel de lundi? Tandis que Xi Jinping s'entretient pour la première fois avec Volodymyr Zelensky, il l'a déjà fait cinq fois avec le président russe Vladimir Poutine - y compris lors d'une visite d'Etat en grande pompe à Moscou au début de l'année.
L'approche de Xi Jinping marque-t-elle un tournant? Auparavant, le gouvernement chinois avait toujours pour objectif de satisfaire Washington dans ses mesures de politique étrangère. Mais aujourd'hui, le régime de Pékin montre clairement qu'il veut suivre sa propre voie. En apparence, l'appel téléphonique était une concession à l'Union européenne, que Xi Jinping avait promise lors de sa dernière rencontre avec Emmanuel Macron et Ursula von der Leyen à Pékin. Aux Etats-Unis, il n'a jamais fait une telle promesse.
Et surtout, en téléphonant à Volodymyr Zelensky, la Chine souhaite renforcer sa propre position – en améliorant ses relations avec l'Europe, qui est tout de même le principal partenaire commercial de la Chine. Enfin, l'intérêt de Pékin est d'éviter un rapprochement transatlantique entre Bruxelles et Washington.
Traduit et adapté par Anaïs Rey.