International
ukraine

Guerre en Ukraine: Poutine a une nouvelle stratégie

L'artillerie ukrainienne en action contre les Russes. La première neige est tombée en Ukraine.
L'artillerie ukrainienne en action contre les Russes. La première neige est tombée en Ukraine.Image: sda

La guerre s'enfonce dans la boue, mais Poutine a une nouvelle stratégie

En Ukraine, les chars et les soldats s'enfoncent de plus en plus dans la boue, alors que les tranchées se remplissent d'eau. Qui est le mieux préparé à l'hiver?
07.12.2022, 05:5507.12.2022, 07:19
Patrick Diekmann / t-online
Plus de «International»
Un article de
t-online

L'invasion russe en Ukraine se transforme de plus en plus en une bataille de boue. De fortes pluies ont rendu les routes impraticables. Les véhicules s'enlisent, les tranchées dans l'est du pays se remplissent d'eau et pour de nombreux soldats, la situation sur le front s'est encore durcie ces dernières semaines.

Cette saison des pluies est caractéristique de la région: elle s'appelle «Raspoutitsa» en russe et «Bezdorozhie» en ukrainien. Les deux signifient la même chose: «saison des mauvaises routes».

Pour les deux camps, cela a surtout pour conséquence qu'il n'y a guère de mouvement sur la ligne de front. Les grandes offensives motorisées ne seront pas possibles pendant le mois de décembre. Car même si certains chars sur chenilles peuvent franchir les trous de boue, les véhicules avec leur équipement d'entretien, leur ravitaillement et leurs munitions ne le peuvent pas.

C'est pourquoi une nouvelle guerre de position sanglante fait actuellement rage en Ukraine et les deux parties attendent surtout une chose: le changement d'année et le moment où le sol aura probablement gelé et où les trous de boue auront disparu.

Lutte brutale pour Bakhmout

Jusqu'à présent, de nombreux experts militaires s'attendaient à des pauses opérationnelles dans la guerre. Il s'agit généralement de phases pendant lesquelles les deux parties regroupent leurs troupes et construisent des lignes de défense, comme après l'échec de l'offensive russe sur Kiev au printemps. Mais si les déplacements sont rares sur les fronts, les combats restent acharnés sur certains tronçons.

La situation dramatique est particulièrement visible à Bakhmout, dans la région de Donetsk. Depuis six mois, l'armée russe tente de s'emparer de cette ville stratégique, sans succès. Le président russe Vladimir Poutine ne cesse de faire attaquer Bakhmout et les pertes humaines et matérielles sont élevées des deux côtés, mais elles sont présumées plus importantes du côté des assaillants russes.

La bataille fait rage à Bakhmout

1 / 12
La bataille fait rage à Bakhmout
partager sur Facebookpartager sur X

L'armée russe gagne certes peu à peu du terrain à Bakhmout et veut encercler la ville, mais cette lutte acharnée n'a en fait que peu de sens sur le plan militaire. A ce sujet, le groupe de réflexion américain «Institute for the Study of War» affirme:

«Les coûts liés à six mois de combats brutaux et épuisants autour de Bakhmout dépassent de loin tout avantage opérationnel que les Russes peuvent tirer de sa prise»

La ville est un symbole de toute la guerre de Poutine en Ukraine. En psychologie, il existe un terme pour désigner ce phénomène humain: l'escalade de l'engagement. Il s'agit d'un état d'esprit dans lequel une personne a déjà beaucoup investi dans une cause: temps, argent, prestige ou vie humaine. Dans cet état, les gens ont tendance à s'accrocher à une chose et à ignorer les avertissements. Après tout, les investissements ne doivent pas être vains, ils doivent porter leurs fruits.

La nouvelle stratégie russe

La Russie en est toutefois très loin en Ukraine, et plus encore: il manque actuellement au Kremlin un objectif de guerre qui soit réellement réalisable. C'est pourquoi les dirigeants russes laissent cette guerre s'envenimer de plus en plus; avec des crimes de guerre, des attaques contre la population civile et l'infrastructure.

Poutine poursuit une double stratégie dans laquelle la souffrance des gens doit à la fois faire pression sur Kiev et dans laquelle un grand nombre de réfugiés ukrainiens pourrait déstabiliser les Etats européens qui soutiennent l'Ukraine. La bonne nouvelle pour l'Ukraine et l'Occident c'est que, jusqu'à présent, cette tactique ne fonctionne pas.

Mais la terreur causée par les missiles russes montre surtout que le Kremlin n'est actuellement pas intéressé par des négociations sans condition préalable. «L'opération militaire spéciale se poursuit bien entendu», a déclaré le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov à l'agence de presse russe Interfax vendredi, selon laquelle il n'y a pas d'accord préalable. «Mais en même temps, le président Poutine était, est et reste ouvert aux contacts, aux négociations». Mais dans quelle mesure le Kremlin est-il réellement prêt à négocier?

La Russie pourrait bien sûr arrêter unilatéralement les combats, mettre fin à son invasion et donc à l'effusion de sang. Mais pour Poutine, il s'agit, comme condition préalable aux négociations, de reconnaître les quatre régions d'Ukraine que Moscou veut s'approprier par des annexions contraires au droit international. Cet objectif du président russe est toutefois illusoire. Les dirigeants ukrainiens ne peuvent pas et n'accepteront pas une paix qui leur coûterait 20% de leur territoire national.

L'hiver sera rude

L'Ukraine s'apprête à passer un hiver de guerre difficile, car il n'y aura pas de progrès militaire ni de grands pas vers la paix dans un premier temps. Après la boue, le froid en janvier et février. Mais quel camp y est le mieux préparé?

On entend régulièrement parler de la mauvaise formation et du mauvais équipement des réservistes mobilisés dans l'armée russe. On trouve des vidéos de recrues russes sur Telegram qui expliquent qu'elles doivent acheter elles-mêmes les vêtements d'hiver.

Vidéo: watson

Le problème n'est pas nouveau: le matériel et l'approvisionnement des troupes semblaient être un problème majeur pour l'armée russe depuis le début de la guerre en Ukraine. Entre-temps, le conflit s'est également transformé en une bataille de matériel. L'Ukraine a pour cela le soutien des pays de l'Otan et surtout des Etats-Unis.

C'est pourquoi l'armée ukrainienne peut espérer obtenir des avantages cet hiver. Par exemple, le Canada fournira à l'armée ukrainienne 500 000 pièces d'équipement hivernal et d'autres pays occidentaux mettront à disposition des équipements hivernaux supplémentaires. De plus, malgré la mobilisation partielle russe de 300 000 soldats officiellement, les forces de défense sont en surnombre.

Une chose est sûre: l'hiver sera rude pour les deux belligérants et surtout pour la population civile ukrainienne. Beaucoup dépendra du moral des soldats, qui patientent actuellement dans les tranchées par des températures négatives, dans la boue. L'armée ukrainienne a un avantage psychologique, une plus grande motivation à mener cette guerre. Car pour eux, il s'agit de défendre leur pays et leurs familles.

Traduit de l'allemand par Nicolas Varin

Ce champ de bataille en Urkraine rappelle la Première Guerre mondiale
Video: watson
4 Commentaires
Comme nous voulons continuer à modérer personnellement les débats de commentaires, nous sommes obligés de fermer la fonction de commentaire 72 heures après la publication d’un article. Merci de votre compréhension!
4
Comment Poutine a accédé au pouvoir grâce à la Tchétchénie
L'attentat de Moscou commis par l'Etat islamique rappelle les années 2000, lorsque Poutine s'était érigé face au terrorisme tchétchène et islamiste. Mais le maître du Kremlin s'obstine à pointer l'Ukraine du doigt. Au cœur de sa logique: l'évolution de la relation complexe entre Moscou et la Tchétchénie.

Septembre 1999, Vladimir Poutine n'est alors que premier ministre de la Fédération de Russie. Une vague d'attentats tchétchènes vient de frapper le territoire russe et le futur maître du Kremlin ne mâche pas ses mots. Les jours précédant cette conférence de presse, des explosions de voitures piégées au pied de bâtiments locatifs ont fait des centaines de morts en Russie.

L’article