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Cette Ukrainienne a fui l'enfer et aide désormais les siens

Liuba Mirsa
Liuba Mirsa a fui l'Ukraine pour la Moldavie.image patrick rohr / Helvetas

Cette Ukrainienne a fui l'enfer et aide désormais les siens

Après un an de guerre en Ukraine, près de 14 millions de personnes ont été forcées de fuir le pays. Liuba Mirsa est l'une d'entre elles. Réfugiée en Moldavie et engagée par Helvetas, elle aide désormais ses concitoyens en fuite. Interview.
04.03.2023, 16:2804.03.2023, 17:49
Yasmin Müller
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Le 24 février 2022, l'Ukraine se réveillait au son des explosions et des sirènes antiaériennes: les troupes russes marchaient sur le pays. Les médias, watson en tête, ont beaucoup parlé des chars, missiles Himars et Javelin et autres affaires diplomatiques. Mais la guerre, c'est avant tout les gens du quotidien qu'elle touche. Des gens qui, pour beaucoup d'entre eux, ont tout perdu.

Liuba Mirsa est une infirmière et mère de trois enfants, âgée de 29 ans, qui s'est réfugiée en Moldavie au début de l'invasion russe. Mais elle a décidé qu'elle n'irait pas plus loin. Engagée par Helvetas, l'association suisse d'aide au développement, elle aide désormais les autres réfugiés ukrainiens qui fuient leur pays.

Pour watson, elle raconte le quotidien des réfugiés fuyant le pays, comment elle s'informe sur la guerre et si elle compte un jour rentrer chez elle.

Vous vous trouvez en ce moment en Moldavie, mais viviez en Ukraine avant la guerre. Où habitiez-vous ?
Liuba Mirsa: J'habitais à Korosten, une petite ville située à environ 150 kilomètres à l'ouest de Kiev.

Il y a un an, le 24 février 2022, l'armée russe a envahi l'Ukraine. Quel souvenir gardez-vous de cette journée?
Vers 5 ou 6 heures du matin, mon mari a réveillé toute la famille. Il nous a dit:

«Faites vos valises tout de suite!»

Nous avons alors rassemblé le strict nécessaire, avec pour objectif de quitter la ville et de nous réfugier temporairement chez les grands-parents de mon mari. Notre région a été l'une des premières à être bombardée.

Pourquoi avez-vous décidé ensuite d'aller en Moldavie?
L'armée russe se rapprochait de plus en plus. Il y avait une base militaire à proximité du village des grands-parents. L'armée russe a encerclé toute la région pour l'attaquer.

«Ensuite, elle a commencé à bombarder intensément la zone, le sol tremblait à chaque impact»

Lors de votre fuite, toute la région était envahie de soldats russes. Cela a dû être dangereux, non?
Nous sommes restés aussi discrets que possible pour ne pas être repérés par les Russes...

Helvetas Ukraine refugees
image: Nenad Celarevic / Helvetas

Y a-t-il eu des obstacles à l'entrée en Moldavie?
Il y avait des bouchons interminables à la frontière. Nous avons donc avons laissé notre voiture et traversé la frontière à pied. De là, nous sommes allés à Palanca, où vivent mes parents. Palanca est le village le plus à l'est de la République de Moldavie et se trouve juste après la frontière.

Ukraine Flüchtlinge Grenze zur Republik Moldau / Moldawien
La frontière moldavo-ukrainienne à Palanca, au début de la guerre.image: Nenad Celarevic / Helvetas

Votre mari aussi?
Non, il a dû rester en Ukraine. Les hommes ukrainiens âgés de 18 à 60 ans n'ont pas le droit de quitter le pays. Je me suis fait beaucoup de souci pour lui. D'ailleurs, son travail a fini par avoir une utilité directe dans la guerre: il avait une entreprise qui produisait des drones avec des caméras.

Comment se passe votre vie en Moldavie?
Nous sommes en sécurité ici, c'est l'essentiel en ce moment. Avant, nous vivions dans une ville, maintenant nous sommes à la campagne. Pour mes enfants, j'essaie autant que possible de garder une certaine routine: nous nous levons ensemble, ensuite ils vont au jardin d'enfants puis à l'école. Pour eux, tout est différent ici. Et ce, même s'ils parlent le roumain, ma langue maternelle.

Liuba Mirsa mit zwei ihrer Kindern
Liuba Mirsa avec deux de ses enfants en Moldavie.image: Patrick Rohr / Helvetas

En Moldavie, vous travaillez pour l'organisation humanitaire suisse Helvetas et vous vous occupez d'autres réfugiés ukrainiens. Que faites-vous exactement?
J'ai commencé à travailler comme coordinatrice quelques jours après mon arrivée. J'accueille les personnes qui traversent la frontière à la gare routière et je leur donne des informations. Je le fournis aussi toutes les aides de première urgence nécessaires. Nous aidons surtout les mères avec leurs enfants et les personnes âgées ou handicapées.

Cette Ukrainienne a fui l'enfer et aide désormais les siens
Liuba Mirsa accueille les personnes qui ont traversé la frontière à la gare routière.image: Patrick Rohr / Helvetas

De quoi les réfugiés ont-ils le plus souvent besoin?
D'un endroit pour se reposer et se ressourcer un peu. Nous organisons des transports vers la capitale Chișinău et les hébergeons, au besoin, dans des centres ou au sein de familles d'accueil.

«Nous ne posons pas trop de questions, car la plupart des gens qui arrivent sont incroyablement stressés ou traumatisés»

Au final, nous sommes simplement là pour eux s'ils ont besoin de nous.

Helvetas Ukraine refugees
image: Patrick Rohr / Helvetas

Les réfugiés dont vous vous occupez aujourd'hui ont-ils des besoins différents de ceux qui ont fui il y a un an?
Oui. Au début, les gens étaient confus. Ils fuyaient le pays sans savoir où aller. Il y avait tant d'incertitudes. Aujourd'hui, la plupart d'entre eux savent exactement où ils vont. Nous leur préparons donc des informations plus précises. De plus, au début, les gens venaient de toute l'Ukraine. Aujourd'hui ils viennent surtout du centre et de l'est du pays, là où la guerre continue de faire rage.

Les chiffres
7,9 millions de personnes ont fui l'Ukraine l'année dernière pour se réfugier dans d'autres pays européens, et 5,9 millions de personnes ont été déplacées à l'intérieur de l'Ukraine, selon les chiffres de l'ONU. La quasi-totalité de ces personnes sont des femmes et des enfants.

Plus de 770 000 personnes ont franchi la frontière entre l'Ukraine et la Moldavie. 108 000 réfugiés se sont enregistrés en Moldavie, le pays le plus pauvre d'Europe.

Quels sont les problèmes principaux auxquels vous devez répondre?
De nombreuses personnes n'ont pas leurs cartes d'identité et leurs passeports avec eux. Ou alors, ils ne savent pas de quelles pièces d'identité, ils ont besoin pour traverser les frontières, ou même pour passer les points de contrôle militaire en Ukraine même.

Refugees that fled the conflict from neighbouring Ukraine, await for transportation at the Romanian-Ukrainian border, in Siret, Romania, Sunday, Feb. 27, 2022. Since Russia launched its offensive on U ...
Helvetas met à disposition des réfugiés des abris et des cartes SIM.image: keystone

Y a-t-il des histoires qui vont ont particulièrement touchée?
Bien sûr. Je ne sais pas pourquoi, mais les destins de toutes ces personnes âgées en fuite me touchent beaucoup. Tant de ces personnes ont tout perdu.

«Nombre d'entre elles ont travaillé dur toute leur vie, certaines pour réaliser leur rêve d'acheter ou de faire construire une maison, tout cela pour la voir détruite dès les premiers jours de la guerre»

Et après toutes ces années de travail, elles doivent à nouveau trouver un moyen de gagner de l'argent, d'une manière ou d'une autre, pour s'en tirer.

Comment vous informez-vous sur la guerre?
C'est difficile. Je n'ai pas de source d'information sûre. Je connais l'histoire des personnes que nous aidons. En dehors de cela, je dois me fier aux médias, mais ils sont en partie contrôlés par l'État. Je pense que personne ne connaît la vérité complète.

Quand la guerre sera terminée, retournerez-vous en Ukraine?
Non. Je veux que mes enfants puissent grandir dans un pays intact. Et il faudra des années pour que l'Ukraine retrouve le niveau qui était le sien avant la guerre.

A propos d'Helvetas en Moldavie
Helvetas fait partie des rares organisations internationales déjà engagées en Moldavie avant le début de la guerre. Cela a permis à l'organisation suisse d'apporter une aide d'urgence ciblée dès le début de la guerre, notamment grâce au soutien de la Chaîne du Bonheur et de la Direction du développement et de la coopération (DCC) de la Confédération.

Depuis, l'organisation à but non lucratif soutient les réfugiés à la frontière en leur fournissant le nécessaire. En outre, Helvetas soutient des logements collectifs pour les réfugiés ainsi que des familles d'accueil moldaves, qui souffrent elles-mêmes de conditions précaires, de la hausse des prix et de pénuries d'énergie dues à la guerre.

Helvetas veut apporter une aide d'urgence, mais aussi un soutien à moyen terme: des cours de formation professionnelle sont par exemple prévus.
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