Le 5 mars, coup de tonnerre dans le petit monde de YouTube: Mcfly et Carlito (David Coscas et Raphaël Carlier de leurs vrais noms) annonçaient vouloir tirer le frein dans leur production de vidéos.
Leur message posté sur Instagram👇
Un burn-out. Le mot est lâché. Le duo déluré aux 7,2 millions d'abonnés, qui a passé une décennie à déposer ses galettes humoristiques chaque dimanche sur son canal, est fatigué du cirque digital.
Mais que se cache-t-il derrière un terme que l'on associe plus volontiers aux cadres de multinationales qu'aux stars d'internet? Comment un twitcher pourrait-il se retrouver débordé? «Se montrer très occupé, c'est aussi une stratégie qui fait vendre», songeait un collègue en plein briefing. Pas faux. On décrypte.
En 2010, le monde se prenait de bec via LinkedIn pour savoir si, oui ou non, être youtubeur était un vrai métier. En 2023, des pontes du domaine s'en curent les dents, et n'hésitent pas à faire cavalier seul en sortant l'artillerie lourde et les grosses productions.
RIP les petits lives intimistes au coin du lit; désormais, il n'est pas rare de voir les starlettes du like embarquer dans leur sillage cameramen, monteurs, preneurs de son, sans oublier le manager. Dans cette catégorie, Mcfly et Carlito n'ont rien à envier à leurs grands frères. De Pierre Niney à Emmanuel Macron, en passant par Patrick Bruel et DJ Snake, la bande n'a pas lésiné sur les moyens pour offrir des concepts soigneusement léchés, ornés d'une brochette d'invités triés sur le volet - car oui, jusqu'à preuve du contraire, le naming, ça fait vendre.
Et sur ce tronçon, c'est la course à qui mieux mieux. A qui sortira le concept le plus dingue, le plus drôle, le mieux produit, dans le studio le plus abouti, au sein du collectif le plus hype. Cette course à la superproduction est justement pointée du doigt par le duo d'amuseurs Mcfly et Carlito:
A n'en point douter, derrière l'éclat d'une ring light, il y a des coûts, psychologiques, cachés. A tel point que les youtubeurs les plus installés sont de plus en plus nombreux à souhaiter revenir à des formats plus modestes. A l'instar de Squeezie, qui admettait en décembre:
Indexée aux gros formats, la recherche perpétuelle de la performance pèse sur la création. Cette quête peut même distordre la perception de son propre succès. Du haut de ses 17,8 millions d'abonnés, le créateur de contenu de 27 ans a peur de stagner. Lors d'un live Twitch, Squeezie s'est même dit très inquiet du «peu» de vues récoltées par l'un de ses formats, dans lequel il raconte des histoires d'horreur.
Tirer sur la corde et ne plus trouver la créativité nécessaire pour faire le job est justement ce qui motive Mcfly et Carlito à se retirer:
Autre facteur de ras-le-bol, une visibilité trop soudaine. Partis de leur chambre, les youtubeurs les plus renommés sont projetés dans la sphère publique, sans grande préparation pour la plupart - et parfois, sans savoir comment gérer l'emballement populaire.
A plusieurs reprises, Léna Situations (Léna Mahfouf de son vrai nom), 2,47 millions d'abonnés sur YouTube, s'est exprimée sur la vague de cyberharcèlement à laquelle elle devait faire face, qui l'impacte psychologiquement. La jeune femme de 25 ans avouait même parfois avoir perdu foi en ses idées, et passé «des journées entières à rester au lit, sans avoir la force de prendre une douche», relaie le média français Marie-Claire. En 2021, la jeune femme avait même quitté temporairement Twitter sous la pression des messages haineux et des insultes.
Il y a deux mois, c'est Mastu qui confiait vouloir faire une détox digitale. En cause: sa notoriété, qu'il décrit comme trop pesante, et dont il souhaite temporairement se déconnecter.
Le vidéaste aux 5 millions d'abonnés expliquait, images à l'appui, que certains de ses fidèles l'alpaguaient brusquement dans la rue, sonnaient en continu à sa porte, quand d'autres passaient ses sons à plein volume sous ses fenêtres. «Mastu, sors, tu es un homme mort», lui aurait même crié une voix anonyme.
«Je ne me plains pas de me faire reconnaitre dans la rue», nuance encore le vidéaste, mais ça ne justifie pas le manque de respect. ça me rend aigri au fil du temps.»
Dès le début de l'année, Mastu avait déjà repris le chemin des studios. La détox digitale, c'est bien, mais par dose homéopathique. Ou peut-être était-ce un bon moyen de faire du teasing, le saurons-nous jamais... Au final, nos youtubeurs en pause: gros burn-out, simple coup de mou, ou bon coup de pub? Difficile de trancher, mais une chose est certaine, on n'a (toujours) pas fini d'en entendre parler.