Un Big Mac tous les soirs, ce n'est pas très conseillé et McDonald's n'a plus rien du modeste troquet de quartier. A moins d'une révélation fracassante, il ne viendrait donc à l'idée de personne d'en faire un (énième) manifeste. Sauf à celle de Juan Branco, téméraire vient-ensuite, qui a décidé de se réchauffer une tranche d'Hanouna, façon cheddar industriel.
160 pages, en librairie depuis jeudi, pour nous dire grosso merdo que la malbouffe télévisuelle est possiblement un fléau. Que le «guignol» de Bolloré «fait du vide» sa fortune. Qu'il n'est que le «pion d'un système», «l'idiot utile» de tous les pouvoirs, un faux banlieusard, mais un véritable homme d'affaires se goinfrant «chez Robuchon». Saviez-vous d'ailleurs que Cyril Hanouna incarne aussi le pire pourvoyeur de gamineries outrancières? Qu'il a fait de son émission un tribunal populaire, en s'appuyant sans broncher sur le malheur des autres pour se hisser au sommet du PAF? Oui, nous aussi, on le savait.
Au bowling, dès lors qu'on a levé les gouttières aux abords de la piste pour s'assurer un strike, le plaisir ne sera jamais total. Juan Branco s'épuise à taper sur le punching-ball préféré des Français en espérant sortir du lot. Un livre entier dédié à celui que le sniper en mousse décrit pourtant comme n'étant «rien. Nada. Keutchi». Usant des mêmes ressorts snobinards pour redire que le menu servit par Hanouna aux Français les moins regardants, c'est quand même un peu de la merde.
Branco dispose d'une plume plus agile que Chat GPT, mais il faut s'accrocher. Car l'auteur pousse le sadisme à dénoncer la télévision poubelle en invoquant des philosophes dans des formules beaucoup trop habillées. A saupoudrer d'insultes bas de gamme des phrases aussi longues que la carrière d'Hanouna. On est face à la dissertation d'un premier de classe qui jouerait au loubard à la récré.
En enfilant des perles tièdes, l'avocat sait très bien que le spectateur de Cyril Hanouna ne sera jamais son lecteur. Tous les autres n'ont pas attendu le «petit enfant de bourgeois», l'ami de Catherine Deneuve, l'avocat des Gilets jaunes, le meilleur ennemi de Macron pour dénigrer doucement le «bouffon» de TPMP. Le président français qui, au passage, se prend une balle perdue. Au cas où on aurait oublié que Juan Branco ne le porte pas dans son petit cœur.
Si les attentes étaient si fortes, il faut en vouloir à ses nombreux portes-parole autoproclamés, encombrants et parfois peu fréquentables. En tête, Booba, deuxième meilleur ennemi d'Hanouna, qui n'a eu de cesse de faire monter la sauce sur les réseaux sociaux, promettant une bombe à retardement, une avalanche de révélations, un tremblement de terre médiatique. Plouf.
Au final, on referme ce petit livre teigneux (mais inoffensif) en ayant l'impression que Juan Branco, par cette obsession et cette détestation toutes personnelles, ne fait que renforcer l'influence de Cyril Hanouna dans le paysage audiovisuel français. L'animateur avait raison lorsqu'il avouait n'en «avoir rien à carrer». Peut-être faudra-t-il attendre la longue investigation de Complément d'enquête pour se caler un peu de scandale frais du jour sous la dent.
Branco fait finalement pire que de rater sa cible: il vise dans le mille après tout le monde et armé d'un pistolet à eau.