L'utilisation d'Internet devient une religion numérique quotidienne, particulièrement chez les jeunes. C'est le constat d’un sondage en ligne mené par l'Université de Zurich auprès d'un millier d'internautes suisses âgés de quatorze ans et plus.
Selon cette enquête, les chatbots d’intelligence artificielle (IA) comme ChatGPT ou Bard sont déjà très répandus en Suisse:
Les plus jeunes et les personnes ayant un niveau d'éducation plus élevé connaissent ces services et les utilisent particulièrement souvent.
«Le degré élevé de connaissance et d’utilisation de ChatGPT et d'applications similaires d'intelligence artificielle est surprenant, d'autant plus que ces applications ne sont disponibles que depuis la fin de 2022», note le directeur de l'étude, Michael Latzer, de l'Université de Zurich, cité jeudi dans un communiqué de cette dernière.
La numérisation donne naissance à une nouvelle forme sociale de religion, une religion numérique quotidienne, selon le chercheur. L'utilisation quotidienne des services numériques remplit des fonctions sociales similaires à celles des religions traditionnelles, par exemple la réduction de la complexité, la création de sens ou la cohésion sociale.
Ainsi, près d'un tiers de la population (30%) pense que les contenus proposés sur les réseaux sociaux ou les applications de santé et de bien-être sont contrôlés par une entité supérieure inexplicable. L'utilisation d'Internet est devenue une sorte de rituel pour le quart des internautes (27%): ils commencent et terminent leur journée en ligne.
Entre 10% et 19% des internautes font état d'expériences transcendantales qui dépassent les limites habituelles de la vie quotidienne. Ces indications d’une religion numérique quotidienne sont plus prononcées chez les jeunes: quatre jeunes sur dix de 14 à 19 ans (38%) indiquent que l'utilisation régulière de ces services les aide à aller au-delà de leurs conditions de vie immédiates.
Un bon tiers des jeunes de ce groupe d’âge sont d'accord pour dire qu’utiliser leurs services numériques préférés leur procure une paix spirituelle lorsqu’ils ont des problèmes (36%).
La fusion de l'homme et de la technologie, appelée cyborgisation, renforce le caractère religieux de la numérisation, souligne l'UZH. Les technologies cyborgs sont utilisées pour atteindre des objectifs transhumanistes, c'est-à-dire dépasser les limites humaines.
L'enquête a examiné les technologies cyborgs à but d’auto-optimisation qui ne sont pas requises sur le plan médical, comme les pansements autocollants pour la stimulation électronique du cerveau ou les puces implantées dans la main pour effectuer des paiements.
Un bon tiers de la population suisse en ligne connaît les technologies cyborgs fixées sur le corps (37%) ou implantées dans le corps (35%). Leur distribution est actuellement faible et se situe dans la fourchette basse des pourcentages à un chiffre.
Néanmoins, quatre utilisateurs sur dix pensent qu’elles pourraient rendre leur quotidien beaucoup plus confortable (39%). En même temps, le niveau de sensibilisation aux risques est élevé, particulièrement en ce qui concerne la cybercriminalité (78%) et les violations de la vie privée (70%).
L'enquête, menée pour la septième fois depuis 2011 par Michael Latzer et son équipe, montre encore que quatre internautes suisses sur cinq inhibent leur comportement de communication en ligne en raison d'un sentiment d’être surveillé. Ce travail fait partie du World Internet Project (WIP), une étude comparative à long terme qui recense dans 30 pays la diffusion et l'utilisation d'internet en comparaison internationale.
(tib/ats)